Article rédigé par lagrif.fr, le 10 novembre 2020
Source [lagrif.fr] Ci-après étude d'éminents juristes sur le décret du 29 octobre 2020 :
Le décret 2020-1310 du 29 octobre 2020 interdit "tout rassemblement ou réunion" au sein des
établissements de culte, "à l'exception des cérémonies funéraires dans la limite de 30 personnes"
(art. 47, I).
En revanche, le décret laisse la possibilité d’exercer le culte en plein-air.
En effet, l'art. 3, I du décret dispose que "Tout rassemblement, réunion ou activité sur la voie
publique ou dans un lieu ouvert au public, qui n'est pas interdit par le présent décret, est organisé
dans des conditions de nature à permettre le respect des dispositions de l'article 1er" (c’est-àdire
la distanciation physique d’au moins 1 mètre entre 2 personnes et le port du masque dans
les villes où il est prescrit).
Or, rien dans le décret n'interdit le culte. Seuls sont interdits, les rassemblements et réunions au
sein des édifices du culte (établissements recevant du public relevant de la catégorie V, autorisés
à demeurer ouverts).
Dès lors, il est possible de déclarer, dans le strict respect des mesures d'hygiène imposées,
une manifestation du culte sur la "voie publique". La voie publique peut viser :
- les places publiques.
- les jardins publics : le principe de laïcité ne devrait pas être ici un obstacle1, et un jardin public
peut être assimilé à une "voie publique"2.
- les parvis d'église (à condition qu'ils ne soient pas inclus dans les "lieux recevant du public",
ce qui pourrait être le cas de ceux qui sont isolés de la voie publique par des barrières, ou
considérés comme une dépendance de l'édifice cultuel).
L'article 3, II, du décret indique la marche à suivre : " Les organisateurs des manifestations sur
la voie publique mentionnées à l'article L. 211-1 du code de la sécurité intérieure3 adressent au
préfet de département sur le territoire duquel la manifestation doit avoir lieu, sans préjudice des
autres formalités applicables [il faut donc en plus déclarer la manifestation au maire dans les
communes où n’est pas instituée la police d'Étathttps://www.gouvernement.fr/partage/11838-conference-de-presse-sur-l-application-desmesures-
contre-la-covid-19).
Un tel discours ne suffit pas à limiter l’article L. 211-1 aux manifestations revendicatives mais
il peut être envisagé, pour « assurer le coup », de déclarer une telle « manifestation
revendicative », c’est-à-dire une manifestation de défense de la liberté de culte, à l’occasion de
laquelle une Messe pourrait être célébrée. On peut alors prévoir quelques pancartes ou une
banderole exprimant la revendication, et pour le reste la manifestation peut parfaitement être
silencieuse, recueillie et priante.
Une fois la manifestation (revendicative ou non) sur la voie publique déclarée, la préfecture
délivre un récépissé de déclaration. À compter de ce jour, elle peut :
- soit interdire la manifestation (par un arrêté notifié immédiatement aux signataires de la
déclaration) pour des motifs d'ordre public (y compris sanitaire). Il est alors possible de
contester ce refus en justice mais, pour éviter l’interdiction, il conviendra de prévoir
précisément les moyens de respecter très strictement les "mesures barrières" (voir
suggestions sur le modèle de déclaration), et de choisir avec discernement les lieux où
se dérouleront les messes en plein air afin d'éviter que des "opposants" ne viennent en
troubler l'organisation (ce qui fournirait ensuite un motif aux autorités pour interdire les
messes suivantes). Il est déconseillé d’organiser de grands évènements : il vaut mieux
privilégier des manifestations modestes, en évitant les lieux assimilés aux
manifestations au sens propre du terme pour privilégier des lieux neutres, qui ne donnent
pas l’idée aux professionnels de l’agitation publique de se mobiliser. Le but n’est pas
de manifester au sens premier du terme, mais d’assister à la Messe, c’est tout.
- soit ne rien dire, et la manifestation peut alors se tenir en toute légalité. Reste alors la
question de l’attestation pour se rendre à la manifestation.
Quelle attestation ?
Le décret prévoit dans son article 4 - I que « Tout déplacement de personne hors de son lieu de
résidence est interdit à l'exception des déplacements pour les motifs suivants » [ceux qui
figurent sur les attestations que nous connaissons].
Le fait de se rendre à une manifestation déclarée ne figure pas dans la liste des déplacements
autorisés, alors même que l’article 3 II prévoit explicitement la possibilité de telles
manifestations.
Le décret comporte donc une contradiction interne en posant explicitement la possibilité de
déclarer une manifestation sans prévoir la possibilité de s’y rendre.
Suggestions :
- Pour ceux qui sont dans le kilomètre autour du lieu de la messe, le motif « activité
physique » devrait fonctionner.
- Pour tous, il est possible de rédiger soi-même son attestation en incluant le fait de se
rendre à une manifestation déclarée : une telle manifestation étant prévue par le décret,
il est conforme au décret de pouvoir s’y rendre même si ce n’est pas dit explicitement.
Un modèle d’attestation est fourni à la fin de ce document.
Autres pistes…
Rien n’interdit que les prêtres disent leur Messe dans leur église aux heures habituelles.
Comme les églises sont ouvertes, les fidèles peuvent venir, sans y être invités.
Quelle attestation faut-il produire pour un déplacement dérogatoire visant à visiter un lieu de
culte ?
Le Conseil d’État, dans sa décision du 7 novembre 2020, précise que les personnes autres que
les ministres du culte et les personnes qui peuvent être regardées comme relevant de leur
personnel « peuvent aussi se rendre dans ces établissements à l’occasion de l’un quelconque de
leurs déplacements autorisés hors de leur domicile, sans se munir d’un autre justificatif, pour y
exercer, à titre individuel, le culte en évitant tout regroupement avec des personnes ne
partageant pas leur domicile. Il résulte, par ailleurs, des déclarations faites lors de l’audience
par l’administration, que des instructions ont été données pour que les fidèles puissent se
déplacer dans le lieu de culte le plus proche de leur domicile ou situé dans un périmètre
raisonnable autour de celui-ci en cochant, en l’état du modèle-type de justificatif qui gagnerait
à être explicité, la case « motif familial impérieux ».
On peut donc cocher la case « motif familial impérieux ».
Cependant, il est possible aussi de compléter le modèle-type en indiquant « visite d’un
établissement de culte » (voir le modèle d’attestation à la fin de ce document) dès lors que ce
déplacement est expressément autorisé par le Conseil d’État.
Remarque 1. Quid de l’intrusion de la police dans un lieu de culte ? Seul un (risque de) trouble
effectif à l’ordre public justifierait une telle intrusion. Mais l’ordre public sanitaire va tellement
loin aujourd’hui que l’on peut imaginer une irruption des forces de police dans l’église qui
pourrait être jugée légale par le juge administratif.
Encore faudrait-il qu’il y ait un trouble à l’ordre public (sanitaire) : il est raisonnable de
considérer que des personnes espacées, avec leurs masques, priant (même si le prêtre célèbre
sa Messe pendant ce temps-là) ne constituent pas un trouble à l’ordre public sanitaire. Mais
sans garantie vue l’incertitude.
Remarque 2. Le Conseil d’État précise que « les ministres du culte peuvent continuer à
recevoir individuellement les fidèles dans les établissements précités [lieux de culte] et à se
rendre, au titre de leur activité professionnelle, au domicile de ceux-ci ou dans les
établissements dont ils sont aumôniers ». Ils peuvent donc aussi y célébrer les sacrements.
Remarque 3. Le Conseil d’État statue en considérant que les dispositions contestées
s’appliquent jusqu’au 16 novembre 2020. Il précise, toutefois, qu’une prorogation de l’état
d’urgence sanitaire implique une concertation avec les représentants des principaux cultes sur
l’éventuelle prolongation des mesures.
Étant donné que l’état d’urgence a en effet été prorogé jusqu’en février 2020, une concertation
devrait avoir lieu entre le gouvernement et les représentants des cultes. A suivre.
Déclaration d’une manifestation sur la voie publique
(en application de l’article 211-1 du code de la sécurité intérieure)
[Nom, adresse et téléphone de l'organisateur]
À [lieu] , le [date]
[Adresse de la préfecture]
Madame ou Monsieur le Préfet,
Je vous informe que l’association [ou le collectif informel, la paroisse, etc] organise une
messe de plein-air
• le [date ou du ...] [au ...] [inclus,]
• à [lieu(x)]
Celle-ci se déroulera dans le cadre de l'art. 3, I du décret 2020-1310 du 29 octobre 2020, et dans
le strict respect des mesures d'hygiène prévues en son art. 1er dont la distanciation physique
d'au moins un mètre entre deux personnes ou groupes de personnes d'une même famille.
Afin d’assurer le respect de ces mesures d’hygiène :
- port du masque
- du gel hydroalcoolique sera fourni aux arrivants
- des chaises seront installées selon les règles de distanciation sociale afin d'assurer le
caractère statique de la manifestation et le maintien de la distanciation (ou bien : une
signalisation au sol indiquera à chaque personne où elle doit se tenir et demeurer, ou
autre. En tout cas, il faut prévoir des « mesures concrètes », on ne peut se contenter de
prévoir « le respect de la réglementation sanitaire »).
- les manifestants resterons assis et aucun déplacement ne sera autorisé
- à la fin de la manifestation, les personnes quitteront la manifestation rang par rang et au
rythme nécessaire à la dispersion pour prévenir toute possibilité d’attroupement après
la manifestation.
- …
Le bon déroulement de la manifestation requiert une occupation temporaire du domaine
public par l'association [ou le collectif, etc] :
• le [date ou du ...au ...inclus]
heure de début : [préciser l'heure]
heure de fin : [préciser l'heure]
• à l'endroit suivant (ou aux endroits suivants) :
place [s] : [préciser]
boulevard [s] /avenue [s] /rue [s] : [préciser]
parc [s] /jardin [s] : [préciser]
abords du [des] bâtiment [s] public [s] : [préciser]
J'estime le nombre maximum de personnes susceptibles d'être rassemblées au même endroit au
même moment à [indiquer le nombre].
Vous trouverez, ci-dessous, la liste des personnes mandatées pour assurer la bonne organisation
de l'événement, avec leurs nom, prénom, domicile et moyens de contact :
[Prénom, nom, domicile des trois organisateurs de l'événement habitant dans le département où
a lieu la manifestation]
Je me tiens à votre disposition pour tout renseignement complémentaire que vous jugerez utile.
Je vous prie d'agréer, Madame ou Monsieur le Préfet, l'assurance de ma considération
distinguée.
[Prénom, Nom et signature de l'un des organisateurs précités]
ATTESTATION DE DÉPLACEMENT DÉROGATOIRE
En application du décret n°2020-1310 du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures
générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de Covid19 dans le cadre de l'état
d'urgence sanitaire
Je soussigné(e),
Mme/M. :
Né(e) le : à :
Demeurant :
certifie que mon déplacement est lié au motif suivant (cocher la case) autorisé par le
décret n°2020-1310 du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires
pour faire face à l'épidémie de Covid19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire4 :
Visite d’un établissement de culte, relevant de la catégorie V, autorisé à rester ouvert
en vertu de l’article 47 du décret susmentionné, déplacement expressément autorisé par
le Conseil d’État dans son arrêt n° 445825 (et suivants) du 7 novembre 2020.
Participation à une manifestation sur la voie publique mentionnée à l'article L. 211-1
du code de la sécurité intérieure, déclarée en préfecture et prévue par l’article 3, II du
décret susmentionné.
Fait à :
Le : à :
(Date et heure de début de sortie à mentionner obligatoirement)
Signature :
4 Les personnes souhaitant bénéficier de l'une de ces exceptions doivent se munir s'il y a lieu, lors de leurs
déplacements hors de leur domicile, d'un document leur permettant de justifier que le déplacement considéré entre
dans le champ de l'une de ces exceptions.