Article rédigé par Libération, le 20 juillet 2020
Source [Libération] Pour le président de l’association Sites & Monuments, Julien Lacaze, les pertes dues à l’incendie de Nantes sont dramatiques.
Julien Lacaze, spécialiste du droit du patrimoine, est président de Sites & Monuments, une association qui défend le patrimoine naturel et bâti en France. Même dans l’hypothèse d’un accident, il considère que l’Etat pourrait être tenu pour responsable.
Un an après l’incendie de Notre-Dame de Paris, qui a anéanti la charpente et la flèche, on aurait tendance à relativiser le sinistre de Nantes : la cathédrale ne perd «que» son orgue, une partie de ses vitraux et un tableau du XIXe siècle. Comment évaluer le préjudice pour le patrimoine ?
La situation est dramatique. On perd des œuvres tout à fait dignes de figurer dans des musées. Les dommages se concentrent ici sur des œuvres «contextuelles», c’est-à-dire conçues pour le lieu qui les abrite. Elles ont longtemps échappé aux vols, aux destructions ou au marché de l’art. Le tableau perdu est de la main de Hippolyte Flandrin, peintre important du XIXe siècle, élève d’Ingres. Réalisé à la villa Médicis, il fut présenté aux Beaux-Arts de Paris. Quant à l’orgue quadricentenaire, il porte la marque des interventions successives des facteurs d’orgue des XVIIe et XVIIIe siècles, qui en ont fait un merveilleux instrument de musique. C’était un élément de patrimoine à la fois matériel et immatériel.
D’après les premiers éléments de l’enquête, le Flandrin était accroché à proximité d’un panneau électrique…
Aucun musée ni même aucun particulier n’oserait conserver des œuvres dans ces conditions ! Cela pose de sérieuses questions. Quelles que soient les circonstances du sinistre, l’Etat, propriétaire des murs et des œuvres, peut être pris à défaut. Option accidentelle : nous sommes dans une situation comparable à Notre-Dame de Paris, l’Etat n’en a retenu aucune leçon et continue d’agir par négligence ou méconnaissance d’un patrimoine exceptionnel. Hypothèse d’un incendie criminel : pourquoi les lieux de culte, et plus largement les grands monuments historiques, sont-ils à ce point dépourvus de sécurité ?
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