Article rédigé par Constance Prazel, le 09 juin 2020
On se souvient que le directeur du prestigieux établissement d’enseignement catholique parisien avait été licencié, manu militari, dans des circonstances obscures, en plein confinement. Après une contre-enquête, destinée à faire honneur, pensait-on, à la vérité, mais qui n’a pu être menée sérieusement, puisqu’elle s’est faite en une petite semaine alors que le confinement n’était toujours pas terminé, l’archevêque Mgr Aupetit confirmait le licenciement de François-Xavier Clément, sans que soit identifiée clairement la cause de la sanction. La transparence reste bien un vœu pieux pour le diocèse de Paris…
En fin de semaine passée, une Assemblée générale des parents d’élèves s’est tenue, car de nombreux parents ne voulaient pas s’estimer vaincus, et continuaient, à juste titre, à demander vérité et justice dans cette affaire où les querelles de personnes en disputent aux condamnations idéologiques les plus sournoises. A bien des égards, cette Assemblée générale était du jamais vu, tant par l’ampleur de la mobilisation des parents, que par le taux de participation : on sait bien que les AG de l’APEL ne mobilisent jamais les foules, mais cette fois, ce sont près de 50 % des parents qui y ont pris part, et qui ont voté la révocation d’Emmanuelle de la Guillonnière, la présidente de l’APEL de Saint-Jean qui avait voté la destitution de François-Xavier Clément et de Jean Ducret.
Vigoureux démenti pour son action, mais maigre victoire tant l’Assemblée générale a été menée dans des conditions scandaleuses, dignes d’un procès stalinien. La nouvelle équipe n’a pas eu le droit de se présenter et de présenter son programme, autrement que sous la forme d’une déclinaison, en 3 minutes montre en main, des noms et prénoms des candidats. Les prises de parole se sont faites uniquement au profit de l’équipe sortante. Des parents n'ont jamais eu accès à la plateforme de vote. La nouvelle liste n’a pas eu le droit de proposer un assesseur pour le dépouillement… Tout cela avec la bénédiction d’un prêtre, demandant réparation pour les critiques adressées à Mgr Aupetit. Jusqu’à preuve du contraire, l’infaillibilité épiscopale n’est pas un dogme, surtout sur des affaires de gestion temporelle. On reste pantois devant l’accumulation de tant de procédés douteux. Même les païens en font autant… et souvent, ils font même mieux et plus droit : ces manœuvres font rougir d’être catholique, surtout de la part de personnes censées travailler au service des jeunes âmes.
La procédure de renouvellement de l’APEL a été verrouillée par un procédé complexe : il fallait que chaque membre fasse l’objet d’un vote de révocation individuel. L’équipe sortante a eu beau jeu, dès lors, de mettre en avant les innocentes mères de famille dévouées, membres de l’APEL, qu’on ne pouvait révoquer en son âme et conscience… Le procédé était redoutable, et la manipulation a joué à plein. Une grande partie de l’équipe sortante est donc restée en place, créant une situation inextricable : semblable à l’hydre de Lerne, dont les têtes repoussent au fur et à mesure où elles sont tranchées, l'équipe de l'APEL pourra être renouvelée, sur la base de la cooptation des membres restants. Le mal n’a pu être complètement purgé, autant dire que rien n’est réglé.
La présidente de l’APEL a été révoquée, mais elle pourrait être repêchée comme administratrice de Saint-Jean. Manifestement, rien ne semble impossible à ceux qui sont à l’origine du scandale. Nous sommes désormais à des années-lumière de la « culpabilité » réelle ou supposée de François-Xavier Clément. Nous sommes aux prises avec un incroyable nœud de compromissions et de mensonges. La réaction des parents a été très vigoureuse - plus de 5 000 signatures de soutien au directeur ; des échos du mécontentement ont filtré très largement dans des titres de presse de tous bords. L’indignation a été profonde, faisant de Saint-Jean de Passy et de François-Xavier Clément un cas emblématique de ce que nombre de catholiques ne veulent plus accepter, pour l’Eglise, pour la jeunesse. Peut-on sérieusement imaginer qu’on en reste là, et que tout se termine par la mort douceâtre, à petits feux, de cet établissement, replongeant à plus ou moins brève échéance dans la médiocrité tranquille d’un catholicisme purement sociologique, bourgeois et sans idéal ?
Constance Prazel
Rédactrice en chef de Liberté politique