Article rédigé par Constance Prazel, le 16 avril 2019
La tristesse est immense ce matin alors que le soleil s’est levé sur Paris et que Notre-Dame gît désormais à ciel ouvert après le terrible incendie qui s’est déclenché hier dans les combles de la cathédrale.
Le choc est à la hauteur de la magnificence de l’édifice, et les réactions internationales, du plus humble visiteur à l’illustre chef d’État, sont impressionnantes par leur ampleur et leur émotion. A l’envi et avec raison, les organes de presse déplorent la perte d’un symbole universel, patrimoine mondial de l’UNESCO. Mais en ce début de Semaine Sainte, il importe de rappeler avec force que cette capacité à parler au cœur de tous émane seule de la foi rayonnante dans le Christ des hommes qui l’ont bâtie. Malgré ses 13 millions de visiteurs annuels, premier monument visité en Europe, Notre-Dame de Paris est bien plus qu’un Disneyland âgé de 850 ans. Rappeler qu’elle fait partie de notre patrimoine commun est une évidence ; mais ce patrimoine est avant tout un patrimoine spirituel, qui a la grâce unique de toucher des millions d’anonymes parce qu’il est animé par la personne du Christ. En pointant vers le Ciel, Notre-Dame au cœur de Paris nous rappelle que notre condition vaut infiniment plus qu’un quotidien empreint d’une dérisoire matérialité.
Il est douloureux de rappeler aussi à l’occasion de ce drame que, si accidentel l’incendie soit-il, nous ne payons sans doute pas par hasard des années de négligence, de coupes budgétaires, d’accommodements avec le patrimoine, surtout religieux, au profit d’une sous-culture subventionnée qui est bien incapable de toucher les cœurs aussi universellement et avec autant d’intensité que le fait la cathédrale de Paris. Pendant 850 ans, le joyau de Notre-Dame a résisté, à l’image de la devise de la ville de Paris, bon gré mal gré, et en quelques heures, l’auguste nef a failli disparaître. Qui sommes-nous pour nous montrer aussi indignes d’un tel legs des siècles ?
Enfin, l’incendie de Notre-Dame porte à son paroxysme le sentiment d’urgence qui doit être le nôtre devant la multiplication, ces derniers mois, des actes de vandalisme, destruction, mépris et blasphème qui ont frappé calvaires, modestes églises de campagne et édifices plus prestigieux.
Si les suites de l’incendie doivent être placées sous le signe de l’Espérance si chère à Péguy, que ce soit l’Espérance d’un authentique renouveau de la Foi chez la Fille aînée de l’Eglise.
« Et cependant, si beau que soit, Ô Notre-Dame,
Paris ainsi vêtu de sa robe de flamme,
Il ne l'est seulement que du haut de tes tours.
Quand on est descendu tout se métamorphose,
Tout s'affaisse et s'éteint, plus rien de grandiose,
Plus rien, excepté toi, qu'on admire toujours.
Car les anges du ciel, du reflet de leurs ailes,
Dorent de tes murs noirs les ombres solennelles,
Et le Seigneur habite en toi.
Monde de poésie, en ce monde de prose,
A ta vue, on se sent battre au cœur quelque chose ;
L'on est pieux et plein de foi ! »
Théophile Gautier
Constance Prazel