Article rédigé par Constance Prazel, le 15 avril 2019
Connaissez-vous les Escape games ? Le principe de ces jeux dernière génération est simple : il s’agit de vivre une aventure grandeur nature dans un lieu insolite, pour se donner le goût du risque, de la peur et du défi à peu de frais. Généralement, un espace réduit voire confiné, dont il faut sortir avec ruse et inventivité, dans une optique de chasse à l’homme, ou de chasse au trésor d’un nouveau genre.
Si un terrain vague ou une friche industrielle peuvent suffire à servir de décor à un escape game, le fin du fin, c’est d’en expérimenter un dans un lieu mythique chargé d’histoire. L’Opéra de Paris, par exemple, prête chaque été ses décors luxueux à ce passe-temps rigolo pour ados prolongés. Il paraît que cela a été conçu pour rapprocher l’Opéra classique des jeunes publics acculturés. On nous permettra de rester sceptiques sur l’efficacité du procédé.
La dernière trouvaille : un escape game est désormais organisé dans la crypte de la Basilique de Saint-Denis… C’est vrai, ça, la nécropole des Rois de France, le lieu millénaire de sépulture de nos anciens souverains, quel cadre rêvé pour une partie de cache-cache ! « Les caveaux des souverains, la crypte... cela ne se refuse pas ! », vante la page consacrée au jeu sur le site de la basilique. Vous pourrez ainsi déambuler avec bonheur, au milieu des restes des quarante-deux rois, trente-deux reines, soixante-trois princes, et dix serviteurs du royaume, dont les tombeaux furent profanés par les révolutionnaires en 1793. Leurs restes, jetés pêle-mêle dans une fosse commune, désormais masquée derrière une imposante dalle de marbre, tentent vainement de trouver le repos...
Eclairage à la bougie et petits effectifs, pour des effets sensationnels garantis, tout cela pour la modique somme de 40 euros. Pourquoi se priver ? En faisant un peu d’humour noir, on pourrait dire que Mérovingiens, Carolingiens et Capétiens vont se retourner dans leur tombe, mais de cela les sinistres conventionnels se sont déjà chargés. En matière d’histoire, et plus particulièrement de Révolution française, il y a bien longtemps que les bornes de l’indécence ont été franchies.
La rue Saint-Denis est livrée aux sex-shops, le 9-3 est colonisé au dernier degré, et maintenant la basilique royale sert de défouloir à bobos. Il y a comme une malédiction qui touche à ces hauts lieux de la France très chrétienne... Essayons de nous rassurer : quand on touche le fond, on ne peut que remonter !
Constance Prazel