L’avortement et la peine de mort à la lumière du fondement du droit
Article rédigé par Marion Duvauchel, le 13 janvier 2019 L’avortement et la peine de mort à la lumière du fondement du droit

Source [Marion Duvauchel] La philosophie comme aussi la théologie ont élaborées dans des paradigmes tantôt conjoints, tantôt disjoints l’idée de « loi naturelle », une loi qui découle des exigences de la raison, raison qui demeure en l’homme malgré la chute originelle, quoique pas mal endommagée... C’est pourquoi cette raison ne s’exerce pas facilement.

La justice est organiquement liée à la foi, c'est-à-dire ce à quoi on adhère individuellement, mais surtout collectivement. Comme l’a rappelé Thomas d’Aquin, la justice est faite pour la vie de la société, elleconcerne les rapports humains et se trouve de ce fait avoir une portée collective, Si cette foi sur laquelle la justice repose est une superstition, la justice qui en découle est faussée. C'est pourquoi seule une révélation authentiquement divine, acceptée comme base de la foi, peut donner une justice humaine conforme à la véritable cause formelle de la nature humaine.

Et c’est pourquoi Dieu se constitue un peuple qui lui appartient, et qui vit selon sa Loi (entendue comme sa Parole), c’est-à-dire selon un régime différent de celui des droits coutumiers de la plupart des peuples.

C’est dans la loi mosaïque qu’onvoit l'application de cette question du fondement du droit. Ainsi, selon la révélation « on ne doit pas rompre ce que Dieu a uni », fondement du sacrement du mariage. Mais Moïse permet (dans la loi orale) de renvoyer la femme, avec un acte juridique, ce qui est tout de même moins brutal qu'un renvoi pur et simple. Jésus fait remarquer que c'est une concession à « la dureté de cœur » des individus (hommes et femmes). Ainsi une loi divine, fondée sur la Bonté, à laquelle on ne peut adhérer que par la foi théologale, est contrebattue par une loi humaine issue du manque de foi en Dieu. On établit ainsi un régime de moindre mal, mais ce régime est issu d'une foi faussée par le désir de vivre selon une autre loi, celle de la chair comme dit saint Paul. La foi en Dieu est alors mélangée avec une foi en un autre que Dieu. Saint Paul appelle cela l’idolâtrie.

Il n'y a pas de « peuple » sans la donnée d'une loi. Aussi cette loi naturelle se présente terriblement déformée par les passions selon les tribus et les époques. Comment les hommes conçoivent-ils cette loi commune ? Dans le régime de la chute, parce qu'elle a perdu le sens de la vraie justice, l’humanité n’obéit qu'à des lois de conservation, ce qui lui permet d’éviter les ultimes catastrophes. La loi commune (qu’on appelle souvent droit coutumier) s'impose comme mode de conservation de la vie en groupe : d'où les interdits comme celui de l'inceste, évidemment transgressés malgré des répressions féroces.

Tous les peuples se forment par l'établissement d'un droit coutumier, plus ou moins formalisé ensuite en droit rationnel. Ainsi la déclaration des « Droits de l'homme » est ressentie comme fondement d'un droit universel par ses auteurs (qui sont juges et parties) mais comme un droit coutumier occidental par les asiatiques.

C’est parce que l'usage de la raison est extrêmement difficile pour régler les mœurs humaines que la Révélation est obligée de rappeler un droit positif que la seule raison serait suffisante à établir, droit positif dont le premier commandement social s’exprime sous l’interdit : « tu ne tueras pas ».

Contrairement à ce que dit le lexique, le contraire du juste n’est pas seulement l’injuste, mais l'arbitraire.

L’arbitraire est désormais au principe même de nos sociétés. Il se fait sentir tout particulièrement dans une loi sur l'avortement légalisant le meurtre des enfants non nés, mais conçus. La loi permet ainsi de tuer, comme si l'enfant appartenait à sa mère.

C'est la destruction même du pacte social humain, car le pacte social humain comporte intrinsèquement l'interdiction de tuer.

Nous sommes ainsi devant cette terrible absurdité d’une société qui d’un côté prétend juger de la vie et de la mort des innocents. Mais qui se refuse à juger de la vie et de la mort des coupables.

Elle signe ainsi la croyance – la foi - en la toute-puissance de l’homme sur l’homme, déclarant ainsi formellement son apostasie.

La France a donc cessé d'être un pays de droit en 1975.

Mais en décrétant l’interdit absolu de la peine de mort, elle se refuse à assumer un acte de juridiction nécessaire en l’état de nos sociétés.

Car la peine de mortest le fruit d'un jugement de justice affirmant que certains crimes individuels ne peuvent être approuvés ni supportés par le peuple, sauf à le dissoudre. Elle requiert l’exercice difficile et douloureux de la raison. L’Écriture dit en même temps que personne ne doit réclamer la mort d'autrui. Le procureur – dans une terre chrétienne - assume donc, quand il réclame la peine de mort, en lieu et place de la société qu’il représente, un devoir terrible.

En décrétant l’interdit absolu, formel, de la peine de mort, le difficile exercice de la raison en matière de justice est rendu vain, dans ce qu’on appelle les crimes de sang en particulier. L’interdit universel de la peine de mort rend vaine la raison face au droit. La société n’est plus protégée.

En formulant dans la Constitution américaine dans un énoncé formel « le droit au bonheur » la société libérale a inscrit l’arbitraire dans sa loi. Car quoi de plus arbitraire que le bonheur. Il n’y a pas de puissance plus athée et plus brutale que celle des USA, tendant à mettre en esclavage le monde entier.

Quant aux sociétés occidentales, si elles n’ont pas encore inscrit le droit au bonheurcomme énoncé formel, dans les faits, elles vivent massivement selon ce précepte, et même cette croyance déclinée en une multitude droits fondamentaux. L’Europe est donc en train de devenir une puissance plus athée et plus brutale encore que les USA et elle a désormais l’ambition affichée de mettre en esclavage tous les peuples européens qui auront signé ce pacte de mort.

 

 

 

13/01/2019 07:00