Article rédigé par Henri Saint-Amand, le 12 mars 2018
Source [Boulevard Voltaire] Le FN n’est pas le premier parti politique et ne sera pas le dernier à changer de nom. Nombreux sont ceux qui, au cours du siècle écoulé, ont changé de dénomination, à l’exception notamment du Parti communiste français (PCF).
Ainsi le Front national va-t-il de changer de nom. Il devrait s’appeler Rassemblement national lorsque les adhérents auront voté. Ainsi Marine Le Pen tourne-t-elle la page du FN, créé en 1972 par Jean-Marie Le Pen. Ainsi solde-t-elle une fois pour toutes les comptes avec son père fondateur qui, buvant la coupe jusqu’à la lie, s’est trouvé privé de son titre de président d’honneur du FN. Ainsi soit-il, serait-on tenté d’ajouter.
Mais pourquoi donc changer de nom ? Dans le cas présent, c’est pour marquer une rupture avec le passé, avec ce lien filial qui ne tenait qu’à un fil. C’est pour achever la mutation du parti qui s’est débarrassé d’une partie de son rattachement à une certaine histoire. Pour beaucoup, c’est la suite logique de la dédiabolisation
Le FN n’est pas le premier parti politique et ne sera pas le dernier à changer de nom. Nombreux sont ceux qui, au cours du siècle écoulé, ont changé de dénomination, à l’exception notamment du Parti communiste français (PCF), qui garde son nom depuis la scission du congrès de Tours en 1920. Le Grand Soir socialiste en matière patronymique est arrivé en 1969 quand, au congrès d’Issy-les-Moulineaux, il laisse derrière lui les oripeaux de la Section française de l’Internationale ouvrière (SFIO). Aujourd’hui, le PS existe toujours, mais beaucoup aimeraient rajeunir son nom. Toujours à gauche, Les Insoumis ont été créés à la suite de la défaite de Mélenchon à la présidentielle de 2017, sur les ruines du Front de gauche.
Le Rassemblement du peuple française (RPF), créé par le général de Gaulle en avril 1947, s’est aussi changé, en 1958, en Union pour la nouvelle République (UNR), puis en Union des démocrates pour la République (UDR), puis en Union de défense de la République (1968). C’est sur ces cendres un peu froides que Jacques Chirac a créé, en 1976, le Rassemblement pour la République (RPR), avant d’y agréger une partie de l’UDF et l’appeler, en 2002, Union pour la majorité présidentielle. Celle-ci s’est ensuite transformée en Union pour un mouvement populaire (UMP), puis est devenue, en 2015, Les Républicains. Chaque transformation s’est justifiée : le PS de 1969 entérine l’esprit de conquête du pouvoir qui sera réel douze ans plus tard. L’UMP de 1994 (qui s’est, un temps, appelée L’Union en mouvement – UEM) visait le même objectif, atteint un an après par l’élection de Jacques Chirac. L’UMP était liée à la défaite 2012. Il fallait rompre avec cette image négative ainsi qu’avec les luttes intestines (Copé-Fillon) de 2012.
Marine Le Pen n’échappe pas à cette figure imposée, ce qui signe, au passage, l’entrée de l’ex-FN dans le champ des partis politiques traditionnels, ne serait-ce que parce qu’elle les copie sur cette transformation.
Changement de cap, rupture, chasser le passé, décliner un nouveau programme et de nouveaux objectifs, capter de nouveaux adhérents : le changement de nom d’un parti ne doit rien au hasard. Marine Le Pen prépare clairement sa campagne pour la présidentielle de 2022. Ainsi a-t-elle besoin de rassembler. Aussi ce nouveau Rassemblement national se veut-il plus large et, par conséquent, plus populaire. Au risque de faire bégayer l’Histoire 1et donner l’image qu’on ne rompt pas complètement avec un passé qu’on a tant dénoncé.