Article rédigé par Constance Prazel, le 06 mars 2018
Depuis une dizaine de jours, une offensive médiatique sans précédent s’abat sur celles que l’on appelle les « méthodes naturelles » de régulation des naissances, ou plus exactement, les méthodes d’observation du cycle féminin (MOC).
Le Figaro Santé avait ouvert le feu. Le signal de la curée a été donné par un communiqué de la Fédération nationale des collèges de gynécologie médicale, par la bouche de sa présidente, le Docteur de Reilhac, dénonçant des méthodes « dont la fiabilité est un leurre », et responsables selon la Fédération de l’augmentation des avortements, notamment dans la tranche d’âge des 18-24 ans.
Une multitude de média, à la suite, s’en sont donnés à cœur joie : Le Point a relayé le communiqué, mais aussi Sciences et Avenir, Le Parisien, ou encore France info.
Doit-on rappeler ici des arguments de bon sens devant ce déni de réalité ?
Les « méthodes naturelles », pointées du doigt par le communiqué, comme le retrait, ou le calcul approximatif des dates du cycle, semblent être tout ce que connaît le journaliste moyen aujourd’hui en terme de régulation des naissances.
La course au progrès, c’est bien pour le choix de ses enceintes audio ou de son ultra-portable, ou pour déterminer les options de sa voiture.
Mais dans le domaine de la sexualité, on préfère cultiver l’archaïsme, pour mieux s’en gausser, alors que la recherche scientifique, depuis les années 1960, a considérablement avancé dans la connaissance du cycle féminin, par exemple par les travaux des Drs. Billings sur la glaire cervicale, afin de mieux maîtriser sa fertilité. Mais ce n’est pas ce que l’on enseigne aujourd’hui aux futurs médecins : en fac de médecine, lors d’un séminaire sur la contraception pour les internes (bac +7 à bac +9), témoigne une jeune femme, généraliste, formée à la méthode Fertility Care, l'image illustrant la partie "Méthodes naturelles" était une photo de la grotte de Lascaux. Le sous-titre était "Bienvenue dans la pré-histoire". Aucune ficelle n’est trop grosse. L’absence de méthode est elle aussi vue comme une « méthode naturelle ». Dans ces conditions, il est tellement facile de crier au loup et de pointer les « échecs » de méthodes qui n’en sont pas.
Les Méthodes naturelles, vocable auquel on préfèrera l’expression de « Méthodes d’observation du cycle » sont bien autre chose. Elles reposent sur des protocoles rigoureux d’observation et d’analyse quotidienne des signes de la fertilité, et sont les seules, aujourd’hui, à permettre aux femmes de connaître en profondeur leur corps et ses variations physiologiques et hormonales. Elles sont là pour permettre au couple de différer, s'il le souhaite, une naissance, mais aussi pour les aider quand l'enfant ne vient pas.
Au pays du délit d’entrave et des fake news, il est visiblement des sujets sur lesquels on peut soigneusement désinformer le grand public, sans courir grand risque. Tout un ensemble de professionnels de santé, sage-femmes, gynécologues, pharmaciens, se sont insurgés contre un tel feu roulant d’inexactitudes et de contre-vérités. Nous leur laissons la parole :
« Non, la fiabilité de ces MOC (méthodes d'observation du cycle) n'indique pas un indice de Pearl entre 15 et 18% (comme nous le voyons sur de nombreux sites (officiels) d’information sur la contraception, mais une fiabilité comparable à celle de la contraception orale oestro-progestative (première contraception des femmes françaises. A titre d’exemple, la symptothermie est citée par l’OMS comme ayant un Indice de Pearl théorique (IPT) de 0.4, et un IP pratique (IPP) de 2. (Rappel : l’indice de Pearl est le nombre de grossesses observées pour 100 femmes pendant 12 mois d’utilisation d’une méthode contraceptive). Pour la contraception orale oestro-progestative, IPT=1 et IPP=8; pour le préservatif masculin, IPT=2 et IPP=15.
Non, le taux d'IVG n'a pas augmenté depuis cette désaffection pour les hormones de synthèse. Il est même en légère baisse. Il faudrait rappeler aussi que seules 34% des femmes sous pilule déclarent ne jamais l'oublier. Que parmi les grossesses non prévues, 2 sur 3 surviennent chez des femmes utilisant une contraception; ou que 23% des IVG sont pratiquées chez des femmes qui prenaient la pilule. »
Un droit de réponse a été demandé au Point : négatif. La doxa en matière de contraception ne se conteste pas.
Et pourtant le monopole de la pilule est bien entamé, comme en ont témoigné, ces derniers mois, les scandales sur les dégâts collatéraux des pilules de 3ème et 4ème génération, que certains journalistes ont eu le courage de pointer du doigt (cf. l’ouvrage J'arrête la pilule, de Sabrina Debusquat, éd. Les Liens qui Libèrent).
Le problème est que pour ceux qui ont osé remettre en cause la toute-puissance du cachet quotidien, l’alternative proposée est souvent pire – ou au moins équivalente – au mal. Vous ne voulez plus de pilule ? Essayez donc le stérilet ou l’implant ! Soit un peu plus de cuivre, ou encore un peu d’hormones, pour des dispositifs qui peuvent être parfois abortifs.
Le combat est d’autant plus difficile à mener, notamment pour les catholiques, que certains théologiens, comme le Père Maurizio Chiodi, professeur de théologie morale à la Faculté théologique de Milan, nouvellement nommé par le pape François à l’Académie pontificale pour la vie, ajoutent une voie ambiguë au concert, en expliquant que la responsabilité de procréer peut passer par d’autres méthodes que les méthodes naturelles « si celles-ci sont impossibles et impraticables », se prononçant en faveur du recours délibéré à la technique comme moindre mal.
En cette année 2018, où nous fêtons les 60 ans de l’encyclique prophétique du pape Paul VI, Humanae Vitae, il est fondamental de faire entendre une voie différente. A l’heure du bio, la vraie écologie humaine, source de liberté, passe par la connaissance de soi et par le respect de ses rythmes naturels. C’est peut-être cela, « mon corps m’appartient ? »
Constance Prazel
Vous êtes professionnel de santé ? Pour signer la pétition : https://www.unepetition.fr/prosante-profertilite
Vous êtes un particulier, pratiquez ou soutenez le recours aux Méthodes d’Observation du Cycle ? Pour signer la pétition : https://www.unepetition.fr/fertilite-prochoice