Article rédigé par Nicolas Gauthier, le 12 décembre 2017
source[Boulevard Voltaire]Encore un petit effort pour jouer dans la cour des grands, jeune homme.
Laurent Wauquiez est élu, et plutôt bien élu. Ainsi, le nouveau président des Républicains emporte-t-il le scrutin avec près de 75 % des voix, abandonnant seulement 16,11 % et 9,25 % à ses deux concurrents, Florence Portelli et Maël de Calan. Soit beaucoup plus que les 64,50 % obtenus par Nicolas Sarkozy en 2014, lorsqu’il briguait le même poste contre Bruno Le Maire et Hervé Mariton. Seule ombre au tableau : une abstention qui se monte à 42,46 %.
Sa position en est-elle si confortable pour autant ? Rien n’est moins sûr. Que Laurent Wauquiez infléchisse sa ligne de campagne pour camper sur des positions de centre droit et il se macronise, perdant au passage son assise populaire. Qu’il aille à droite toute et c’est le Front national qu’il trouvera sur son chemin, tandis que l’hémorragie de ses troupes plus « modérées » ira grandissant.
Car le Front national est bel et bien au cœur de cette quadrature du cercle. Et Lucie Soullier, journaliste du Monde, de résumer la situation d’un seul tweet : « Plus qu’un refus d’alliance avec le FN, Maël de Calan demande à Laurent Wauquiez un refus de tout rapprochement idéologique, sémantique avec le FN. On verra dans les semaines à venir s’il reçoit le message. » Pour les alliances, on comprend : il y en aura ou il n’y en aura pas. Mais le rapprochement, qu’il soit « idéologique » ou « sémantique », voilà qui est déjà nettement plus subjectif…
Bref, Laurent Wauquiez se trouve désormais sous haute surveillance. À la fois celle de ses adversaires, qu’ils soient de l’intérieur ou de l’extérieur, qui guetteront le moindre faux pas effectué en direction du Front national. Mais également celle de ceux qui l’ont fait roi, qui ne sont pas fondamentalement opposés à de telles alliances, même s’ils peuvent rêver parfois d’une sorte de frontisme sans Front.
Dans un entretien accordé à Causeur, le principal intéressé prétend : « Je veux nouer un pacte fondateur avec tous ceux qui refusent que la France change de nature. Certes, il y a des différences sociologiques entre le bourgeois conservateur et l’ouvrier déclassé victime de la désindustrialisation. Mais ils ont en commun l’attachement à la transmission, à la permanence, le sentiment profond et presque charnel qu’on a mis notre pays la tête à l’envers. » Soit précisément ce qu’écrit Patrick Buisson et ce que clame Marine Le Pen.
Mais, sur le sujet, toujours dans ce même entretien, il poursuit : « Le Front national n’apporte rien à ma vision et à mon projet. Il y a chez ses dirigeants une vision extrêmement rabougrie, diminuée et caricaturale de la France et je ne suis pas du tout sûr qu’ils se soient tous vraiment débarrassés de leur antisémitisme. En réalité, ces gens-là sont la meilleure façon de tuer nos idées. »
Incorrigible Laurent Wauquiez… « Jeune député, j’ai fait le singe savant en récitant la partition qu’attendaient les médias », affirme-t-il. Pourquoi parler au passé, sachant qu’il continue de faire de même aujourd’hui et que ce genre de propos, si attendus par les médias, ne sont sûrement pas ceux qu’attendent ses actuels électeurs ?
Les Amoureux de la France appellent de leurs vœux la constitution d’une droite hors les murs. Fort bien et pourquoi pas. Mais que bâtir de solide avec un homme qui, lorsqu’il ne va pas droit dans le mur, persiste, envers et contre tout, à faire le trottoir ?
Laurent Wauquiez assure à qui veut l’entendre qu’il « a changé ». On le croirait d’autant plus s’il changeait pour une fois de discours et cessait d’insulter des élus que persistent à plébisciter ces électeurs dont il dit guigner les suffrages.
Encore un petit effort pour jouer dans la cour des grands, jeune homme