Article rédigé par , le 16 mars 2017
[Source : Boulevard Voltaire]
François Fillon est bien tranquille, la frange conservatrice de son électorat, pense-t-il, est acquise.
Après le Penelopegate, voici le Millongate : « Équipe de campagne : Fillon et le mystère Millon » (Le Parisien), « Charles Millon, un rôle pas assumé dans l’équipe de François Fillon » (L’Express), « Caricature, Millon, costumes… la campagne de Fillon devient dangereuse » (Challenges), « Contrairement à ce qu’affirme François Fillon, Charles Millon assure être dans son équipe depuis le début » (« Le Lab » Europe 1), [Charles Millon], « une présence tout sauf anodine tant le personnage a un passé sulfureux » (L’Obs).
Mais quel est donc ce personnage diabolique ? Un Mesrine mâtiné de Madoff, sans doute, qui égorge une portée de chatons chaque matin pour son petit déjeuner ?
Pire ! L’Obs fait entrer l’accusé : « Cet ex-ministre de la Défense de Jacques Chirac, ancienne figure de l’UDF, incarne la fameuse droite hors les murs. » Il est « connu pour avoir fait alliance avec le FN. C’était en 1998, lors des élections régionales. » Enfer et damnation !
Et François Fillon d’aussitôt se justifier : « Je parle avec tout le monde », « Si Charles Millon a envie de me soutenir, je ne vois pas pourquoi je ne chercherais pas à rassembler le plus possible les Français qui, justement, peuvent réduire le FN », mais « Charles Millon n’a jamais fait partie de mon organigramme de campagne, jamais ». Et le coq a chanté pour la troisième fois.
Jusqu’à quand cette mascarade va-t-elle durer ? Ne lui suffisait-il pas, pour couper court, de dire : « Oui, et alors ? »
Fillon fait montre de courage. Courage à la tribune du Trocadéro. Courage en conférence de presse pour se justifier de l’accusation d’emploi fictif. Mais courage au service exclusif de sa personne, visant à ne défendre… que lui. Jamais ses (vrais) amis, ceux qui ne l’ont jamais trahi. « Merci à Alain Juppé de son soutien clair et de son élégance.
C’est tous ensemble que nous redresserons le pays », a-t-il tweeté sans hésiter, à l’endroit de son ancien rival qui l’avait, pourtant, avant de se rallier, copieusement critiqué. Il faut croire que les gens comme Millon ne sont pas clairs, pas élégants et qu’ils ne serviront pas à redresser le pays, tout juste à contenir le Front national.
François Fillon est bien tranquille, la frange conservatrice de son électorat, pense-t-il, est acquise. Cette maîtresse humble et fidèle – qui se sait indécente, pécheresse et infréquentable pour les notables en vue – accepte tous les outrages tant elle est amoureuse, prête à dormir comme un chien sur la carpette, à s’enfuir au petit matin par l’escalier de service pour qu’on ne la voie pas. C’est pourtant elle qui le réconforte dans l’adversité, essuie ses larmes, prodigue ses marques d’affection et ses conseils, organise des manifs et soulève des montagnes. Mais quand le ciel bleu revient, c’est au bras de la favorite volage du centre que François, alangui, se pavane dans le grand monde. On dirait un roman de Maupassant.
Sauf que, dans la vraie vie, ce n’est pas ainsi. Et certain vote, qu’il croit captif, pourrait se lasser du rôle de vieille cocotte. À trop charger la mule – l’investiture de NKM aux législatives, celles de l’UDI, l’improbable déclaration « Mon principal adversaire est madame Le Pen » (sous-entendant qu’il préfère Macron), et maintenant son reniement de Millon… -, il peut recevoir le coup de pied de l’âne.
Mais j’apprends qu’il vient d’être mis en examen. Peut-être, pour un temps, va-t-il aller chercher du soutien vers les seuls qui lui veulent du bien ? Chouette, Millon va prendre du galon !
Gabrielle Cluzel