Article rédigé par Jean-Michel Léost, le 24 janvier 2017
L’histoire montre que droite et gauche ont une même politique éducative, qui conduit irrésistiblement au déclin.
La campagne des présidentielles en est encore l’illustration. Chacun lance sa formule-choc : « autonomie », « retour aux fondamentaux », « pédagogie innovante », « redistribution des moyens », « plus de maîtres que de classes », etc., mais se garde bien d’analyser les causes profondes de la crise de l’enseignement. Alors, gauche et droite, même combat ?
Quelques exemples suffisent à le démontrer.
Remontons à la loi Haby de 1975, instaurant « le collège pour tous », rapidement appelé « collège unique ». Il fut créé à l’initiative de Valéry Giscard d’Estaing, avec le soutien actif de la FEN, une fédération syndicale proche du Parti socialiste, devenue aujourd’hui le SE-UNSA. « Collège unique, collège inique ! » criaient alors les plus lucides. En vain. Cette convergence entre la gauche et la droite s’est prolongée dans les réformes suivantes.
Depuis des décennies, l’Éducation nationale subit l’influence de prétendus experts en éducation qui ont rarement mis les pieds dans une classe. Des chercheurs en « sciences de l’éducation », d’innombrables rapports répandent la bien-pensance et le prêt-à-penser. Rue de Grenelle, ils font la pluie et le beau temps.
Fréquemment, un même homme occupe des postes importants sous toutes les majorités.
On a vu un ancien directeur de l’enseignement scolaire, sous Jacques Chirac, chargé de mission sur la réforme du lycée sous Nicolas Sarkozy, devenir conseiller éducation auprès de Jean-Marc Ayrault, conseiller enseignement supérieur et recherche auprès de Geneviève Fioraso, Najat Vallaud-Belkacem, puis Thierry Mandon.
François Fillon, qui promet aujourd’hui une transformation radicale de notre système éducatif, est le même qui, dans sa loi de 2005, a introduit le socle commun de connaissances et de compétences, aujourd’hui nommé socle commun de connaissances, de compétences et de culture – sans abroger la calamiteuse loi Jospin de 1989, qui place l’élève au centre du système éducatif et se fixe comme objectif de conduire 80 % d’une classe d’âge au niveau du baccalauréat.
Bien d’autres faits concrets confirmeraient qu’à quelques nuances près ou quelques formules propres à rassurer leurs électorats respectifs, la continuité est de règle sous tous les gouvernements. Ainsi, on a beaucoup reproché à Vincent Peillon, en plein débat sur le mariage pour tous, le soutien apporté par le ministère à la contestable « Ligne Azur ». Mais son prédécesseur Luc Chatel en avait assuré la promotion dès 2010.
Comment expliquer cette concordance ?
D’abord, par la mise en œuvre volontariste de la politique européenne en matière éducative. C’est l’Europe, résolument tournée vers le marché de l’emploi, qui a préconisé l’instauration des « compétences clés pour l’éducation et la formation tout au long de la vie ».
Elle s’explique aussi par une communauté d’intérêts entre la pensée égalitariste et la pensée libérale. Les uns trouvent dans la réforme un moyen d’imposer leurs lubies pédagogiques et de modeler les élèves selon leurs vues ; les autres, un moyen d’adapter l’enseignement aux besoins économiques. Tous veulent créer, avant tout, des exécutants dociles.
Parmi les candidats à la présidentielle, pour trouver une conception de l’enseignement qui ne cède pas aux pressions de la pensée unique, il faut lire les programmes de Marine Le Pen et de Nicolas Dupont-Aignan ou, à gauche, celui de Jean-Luc Mélenchon et, peut-être, de quelque candidat d’extrême gauche pour qui seul le savoir peut émanciper. À l’élection présidentielle de 2007, le candidat qui défendait la conception la plus sensée de l’enseignement s’appelait Gérard Schivardi, soutenu par le Parti des travailleurs…
Source : Boulevard Voltaire