Article rédigé par , le 03 janvier 2017
[Source : Le Point]
Le président élu des Etats-Unis Donald Trump a salué dans un tweet vendredi "l'intelligence" du président russe Vladimir Poutine, moins de 24 heures après la longue série de sanctions prises contre Moscou par le président sortant Barack Obama.
De fait le président Wladimir Poutine a créé la surprise vendredi en décidant de "n'expulser personne" en réponse à l'expulsion annoncée par Washington de 35 "agents russes", dans le sillage des accusations d'ingérence de Moscou dans la présidentielle américaine.
"Nous n'allons expulser personne (...) Nous n'allons pas tomber au niveau d'une diplomatie irresponsable", a souligné M. Poutine dans un communiqué, qualifiant les nouvelles sanctions de Washington de "provocatrices" et visant à "miner davantage les relations russo-américaines".
Dans un tweet aussitôt retweeté par l'ambassade russe à Washington, M. Trump a en tout cas salué l'"intelligence" de la réaction de M. Poutine. "Bien joué le report - J'ai toujours su qu'il était très intelligent!", a-t-il écrit, en référence à la décision de M. Poutine de ne pas répondre immédiatement aux sanctions américaines.
"Les Russes mènent tellement @CNN et @NBCNews en bateau - drôle à observer, ils n'ont aucune idée (de ce qui se passe)!", a encore tweeté le milliardaire américain dans la soirée, ajoutant que seule la chaîne conservatrice "@FoxNews comprend totalement" la situation.
- "Triste et dangereux" -
Cette réaction du président élu a en tout cas suscité l'indignation chez ses opposants démocrates ainsi que parmi les membres de son propre parti républicain.
Paul Ryan, président républicain de la Chambre des représentants, a ainsi estimé que ces mesures annoncées "n'avaient que trop tardé". John McCain et Lindsey Graham, deux "faucons" républicains du Sénat, ont eux estimé que Moscou s'en tirait bien, promettant déjà d'"imposer des sanctions plus fortes".
L'ex-candidat républicain à la présidentielle et ancien agent de la CIA, Evan McMullin, a lui déploré sur Twitter que Donald Trump "s'aligne du côté du plus grand adversaire de l'Amérique même quand celui-ci attaque notre démocratie".
Reprenant le terme utilisé par M. Trump, le démocrate Adam Schiff, membre de la commission du Renseignement de la Chambre des représentants, a reconnu ironiquement dans un tweet que "Poutine EST intelligent" car il "sait qu'il peut obtenir presque tout ce qu'il veut de Donald Trump en faisant à peine plus que de le flatter. Triste et dangereux".
La Russie, qui se réserve "le droit de prendre des mesures de rétorsion", "restaurera les relations russo-américaines au vu de ce que sera la politique du président américain élu Donald Trump", a précisé M. Poutine, qui a adressé un message de fin d'année au président élu américain.
Dans ce texte, le chef de l'Etat russe a exprimé l'espoir qu'après l'investiture de M. Trump, le 20 janvier, "les deux Etats (...) pourront prendre des mesures réelles visant à rétablir les mécanismes de la coopération bilatérale dans différents domaines".
Les mesures annoncées jeudi par Barack Obama, moins d'un mois avant son départ de la Maison Blanche, prévoient notamment l'expulsion de 35 personnes accusées d'être des membres du renseignement russe et la fermeture de deux sites russes dans le nord-est des Etats-Unis considérés comme des bases utilisées par ces agents.
Moscou a annoncé l'envoi d'un avion spécial parti chercher les diplomates russes et leurs familles obligées de quitter les Etats-Unis dans les 72 heures. Selon la porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova, 96 personnes au total vont quitter les USA.
Le GRU (services secrets de l'armée) et le FSB (service Fédéral de Sécurité, ex-KGB) font également l'objet de sanctions économiques tout comme quatre dirigeants du GRU, dont son chef Igor Korobov.
- Inquiétudes en Europe -
L'administration américaine a clairement accusé la Russie d'avoir orchestré des piratages informatiques qui ont mené au vol et à la publication de milliers d'emails de responsables démocrates, brouillant le message de la candidate Hillary Clinton.
Barack Obama a ordonné qu'un rapport complet sur les piratages informatiques menés pendant la campagne présidentielle lui soit remis avant son départ de la Maison Blanche.
Cette affaire de piratage informatique inquiète jusqu'en Europe, où 2017 sera une année électorale en Allemagne et en France et où des responsables politiques s'inquiètent ouvertement de l'influence, voire de l'ingérence, de la Russie.
Barack Obama a également appelé à une sorte d'union sacrée internationale pour faire revenir Moscou dans le droit chemin et l'empêcher de mener des actions de déstabilisation dans des pays étrangers.
Les révélations du Washington Post vendredi, selon qui des pirates informatiques russes sont parvenus à pénétrer le réseau électrique américain via un fournisseur du Vermont (est des Etats-Unis), ne vont sans doute pas calmer la colère des Etats-Unis.
Les sanctions décidées par M. Obama sont en tout cas une pierre dans le jardin de M. Trump, qui ne croit pas à l'ingérence de Moscou et veut réchauffer les relations américano-russes. Celui-ci s'est toutefois abstenu de critiquer directement les sanctions annoncées par Barack Obama.