Article rédigé par Roland Hureaux, le 22 décembre 2016
[Source : Roland Hureaux]
Jamais, peut-être depuis des siècles la diplomatie française n’était tombée aussi bas. Laurent Fabius avait été un ministre des affaires étrangères désastreux. Son successeur, Jean-Marc Ayrault s'avère encore pire. Comme il ne connaissait pas le sujet, on pouvait s’attendre au moins à ce qu’il soit prudent, mais il n'en est rien.
La prise d'Alep par les forces gouvernementales syriennes avec l'appui des Russes : tout le monde devrait s'en réjouir puisqu’elle annonce la défaite des djihadistes que notre police pourchasse en France et la fin de la guerre. Au contraire, elle met en rage les gouvernements occidentaux, spécialement le nôtre, qui semblent vouloir regagner par la propagande ce qu'ils ont perdu sur le terrain. Comment cette guerre aurait-elle donc pu finir autrement, sauf à connaître une bataille encore plus cruelle à Damas et la prise de pouvoir finale par les islamistes ? C'est d'ailleurs le sentiment de l’immense majorité de la population de Syrie, chrétiens d'Orient en tête. Jean-Luc Mélenchon l'avait compris avant d'autres.
Au lieu de cela, notre gouvernement est en pleine dénégation. Humilié par la défaite des djihadistes (quel aveu sur ses véritables engagements !), il est conduit à prendre des initiatives absurdes à l’ONU, comme la récente tentative de supprimer le droit de veto quand des vies humaines sont en jeu. Ce qui est idiot : des vies sont toujours en jeu s'il y a guerre. Voilà bien du BHL à l'état pur. Alors que le droit de véto au Conseil de sécurité et le principe de non-ingérence sont les piliers de l'ordre international depuis 1945, cela reviendrait à officialiser le "droit d'ingérence humanitaire" au moment même où il vient de montrer partout son caractère criminel : six pays mis à feu et à sang depuis 15 ans au nom des droits de l'homme -, Trump récuse d’ailleurs ces actions.
Ayrault multiplie les communiqués vengeurs accusant les vainqueurs des pires crimes : " exécutions sommaires, notamment de femmes et d’enfants ; personnes brûlées vives dans leurs maisons ; poursuite du ciblage systématique des hôpitaux, de leur personnel et de leurs patients… De telles atrocités révoltent les consciences" (13/12/2016).
Aucune vérification de ces faits, hautement invraisemblables quand on sait que Russes et Syriens se savent sous les projecteurs de l'opinion internationale et que la plupart des accusations proférées depuis six ans à l'encontre du gouvernement syrien se sont avérées douteuses. Pourquoi d'ailleurs cibler les hôpitaux (où les rebelles avaient planqué leur QG), puisque la bataille est finie ? Tout se passe comme si les Occidentaux voulaient regagner par la propagande ce qu'ils ont perdu sur le terrain.
Aucune mention des horreurs de notre allié Al Qaida , appelé maintenait Al Nosra ou encore Fatah al-Cham, que l'on découvre aujourd'hui , pires que celles dont on accuse le régime.
Qui ne voit que notre diplomatie se déshonore par cette propagande grossière, proche de celle qui émanait autrefois du Kominterm ou de la Propagandastaffel , indigne d'un pays démocratique ?
Outre une grande presse plus servile que jamais, il n'y a plus personne pour la gober, que la Conférence des évêques de France qui s’alarme, à la suite de la reprise d'Alep, d'une arrivée massive de réfugiés et demande de les accueillir. Or, les seuls qui voudraient aujourd'hui fuir la Syrie sont les islamistes défaits : voilà des pasteurs pressent les brebis d'accueillir les loups dans la bergerie !
Ce combat d'arrière-garde hypothèque gravement les intérêts de la France. Même si l'équipe Obama, dans le même état d'esprit que notre gouvernement, elle aussi soucieuse d'empêcher jusqu'au bout le retour de la paix, vient d'aider Daech à reprendre Palmyre, Donald Trump, aux affaires dans un mois, traite déjà sur une ligne réaliste avec Poutine sur ce sujet. Tous les Etats reprennent langue avec Bachar el Assad qui va, que cela plaise ou non, rester en place, sauf nous.
Les adeptes européens de l'idéologie "néo-conservatrice" (adoptée depuis longtemps par la gauche), le gouvernement Hollande en première ligne, sont aujourd'hui doublement frappés : par la défaite des djihadistes et par la défaite de Clinton. Le néoconservatisme ayant perdu la partie à Washington, ils avancent désormais comme un canard sans tête. Il y a en effet de quoi désespérer.
La diplomatie française s'entête dans ses erreurs, ses criailleries la ridiculisent. Elle se montre incapable de faire ce qui est le b a ba de toute action diplomatique : s'adapter à une nouvelle situation. En elle se conjuguent la rigidité française et la rigidité idéologique pour le plus grand préjudice de nos intérêts.