Article rédigé par Maxime Tandonnet, le 13 septembre 2016
[Source : Blog Maxime Tandonnet]
Nous sommes nombreux à nous poser la question, ici même, au boulot, sur le marché du samedi matin, ou les dîners entre amis. La réponse n’est pas simple.
Sur le principe, je suis un adversaire, que dis-je, un ennemi des primaires pour des raisons déjà mille fois exposées:
- Elles mettent l’accent que la bataille d’ego et de visages plutôt que sur le débat d’idées, donc favorisent la personnalisation de la politique au détriment de l’intérêt général;
- Elles renforcent le pouvoir médiatique à travers le façonnement de l’image des candidats ;
- Elles trahissent l’esprit de la Ve République en faisant du chef de l’Etat l’homme d’un camp politique contre un autre et non l’élu de la Nation dans son unité;
- Elles entraînent une désintégration de la politique en poussant à l’individualisation des enjeux plutôt qu’au rassemblement;
- Elles contribuent au délitement de la vie publique en allongeant de plusieurs mois la campagne électorale alors que la France a besoin de travailler plutôt que de se déchirer dans les polémiques;
- Elles poussent la vie politique à la médiocrité en favorisant la démagogie, les scoops médiatiques et les pires coups bas pour l’emporter;
- Elles bloquent le renouvellement de la politique en favorisant les notables des partis;
- Elles comportent un risque de manipulation avéré (participation en masse d’adversaires de manière à faire pencher le vote dans un sens qui leur est favorable);
- Elles expriment la déliquescence du sens du bien commun, quand des individus sont incapables de s’entendre et de se mettre d’accord pour l’intérêt de la France.
- Elles encouragent le sectarisme à travers la notion de « valeurs de droite » et de « valeurs de gauche ».
J’y vois donc un poison pour la démocratie et la vie la politique françaises, pour l’avenir de notre pays, pour la république. Et pourtant, peut-on en faire abstraction, les boycotter? L’enjeu des scrutins de 2017 est considérable. Tout peut arriver, y compris le pire, c’est-à-dire un deuxième tour des présidentielles entre le parti lepéniste et le parti socialiste qui signifierait la réélection inéluctable de l’actuel chef de l’Etat et peut-être, dans la foulée – même si rien n’est certain – une nouvelle majorité socialiste à l’Assemblée. Tous leurs calculs et tous leurs espoirs vont en ce sens. Dès lors, malgré l’aversion que suscite le système des primaires, il nous faut être pragmatiques, accepter la réalité telle qu’elle est, aussi désolante soit-elle. Parfois, les compromis empoisonnés sont inévitables car un poison peut servir de contrepoison à un poison encore pire. Donc, il faut aller voter aux primaires mais sans illusion, sans naïveté, sans puérilité d’imaginer élire un sauveur ou un homme providentiel. Le seul et unique enjeu de ces primaires est tout bêtement de sélectionner le candidat qui aura le plus de chance d’éviter la tragédie nihiliste d’un deuxième tour des présidentielles 2017 entre le parti lepéniste et le parti socialiste. Lequel est-il le mieux placé? je n’en sais strictement rien aujourd’hui. Ensuite, pour l’espérance, il faudra attendre autre chose, les législatives, la perspective d’une recomposition politique, de l’émergence d’une avant-garde déterminée à sortir la France de l’impasse, un événement historique majeur, ou que sais-je?