Article rédigé par Jean-Baptiste Noé, le 13 juillet 2016
[Source: Contrepoints]
Le taux de réussite au bac est élevé, mais prétendre qu’il est donné relève du mépris pour les bacheliers comme de l’incompréhension du rôle du diplôme dans le système éducatif français.
Que le taux de réussite au bac dépasse les 88% et nombreux sont ceux qui conviendront que le bac ne vaut plus rien et qu’il est donné. Cette position constitue surtout une forme de mépris pour les bacheliers et une incompréhension quant aux évolutions du baccalauréat sur les vingt dernières années.
Certes, nous conviendrons que le niveau global n’est pas génial. Beaucoup de copies sont truffées de fautes et la réflexion est très souvent indigente. Mais les bacheliers ne sont pas responsables de cela. Ils sont d’abord les victimes d’une structure éducative qui a renoncé à leur apprendre à lire et à écrire convenablement et à les faire réfléchir. Soyons exigeants envers eux, mais ne leur reprochons pas des fautes dont ils ne sont pas responsables.
Dire que le bac est donné est un non-sens. Seuls 40% d’une classe d’âge obtiennent un bac général, ce qui est finalement assez peu. On reproche l’accroissement des mentions très bien, passées de 1% dans les années 1960 à 10% aujourd’hui. 10% de mention très bien, c’est-à-dire plus de 16 de moyenne, n’est pas beaucoup, d’autant que pour obtenir un tel score il faut quand même être très régulier et obtenir partout de bons résultats. Cela n’est pas donné à tout le monde.
La mutation du bac
Entre les années 1960 et aujourd’hui, le baccalauréat a muté. Le bac reste un grade universitaire, le premier de tous, qui permet ensuite de préparer une licence, raison pour laquelle tout bachelier peut s’inscrire en licence à l’université. Autrefois, rares étaient ceux qui obtenaient ce grade ; ils sont aujourd’hui plus nombreux. Mais il faut prendre le bac pour ce qu’il est : il termine et sanctionne trois ans d’étude au lycée. Que presque tous les élèves de Terminale obtiennent le bac dans leur série respective est une chose normale et plutôt rassurante. L’examen certifie ainsi qu’ils ont atteint le niveau minimum qui leur est demandé. À eux ensuite de poursuivre leur formation pour pouvoir entrer sur le marché du travail.
Le bac n’est plus l’enjeu de la Terminale
À se focaliser sur le bac, on oublie qu’il n’est plus l’enjeu de la Terminale. La première priorité de l’année, ce sont les admissions postbac, qui s’effectuent soit en passant un concours pour intégrer une école, soit en présentant son dossier scolaire. La plupart des élèves ont leurs résultats d’admission postbac avant de passer le bac, qui ne devient ainsi que la dernière formalité à valider pour assurer leur passage.
Les concours passés l’année de Terminale sont souvent très exigeants, que ce soit pour intégrer un IEP, une école d’ingénieur ou une école de commerce. De même pour les nombreuses filières sélectives proposées aux lycéens. C’est pour cela qu’il leur faut véritablement travailler, plus que pour le bac. Bien souvent, les générations qui ont connu le bac dans les années 1960-1970 n’ont pas compris que le monde avait changé et que l’organisation du lycée et de la Terminale aujourd’hui n’était plus celle de leur jeunesse. Elles continuent à se focaliser sur le bac sans comprendre que celui-ci n’est plus l’enjeu principal des lycéens. Et s’ils sont admis dans le postbac, pourquoi leur empêcher d’y aller en leur faisant rater le bac ?
Le monde d’aujourd’hui n’est plus celui d’hier
Beaucoup se lamentent sur le fait qu’autrefois le bac donnait accès à un travail, mais c’est oublier que les conditions économiques des années 1960 ne sont plus celles d’aujourd’hui. Il faut aussi comprendre que le monde a changé, qu’il s’est complexifié, et qu’il est nécessaire d’avoir une plus grande formation. À force de toujours vouloir comparer les générations en expliquant que celles d’avant travaillaient plus et étaient mieux formées que celle d’aujourd’hui, on en vient à ne plus comprendre les nouveautés du monde actuel.
Refonder l’école
Cessons donc de mépriser les bacheliers qui, bien souvent, ont fourni un effort proportionnel aux exigences qui leur sont demandées. On ne peut pas exiger, au bac, plus que ce qui leur a été demandé durant leur scolarité. Si l’on veut accroître le niveau, c’est d’abord par le primaire qu’il faut commencer.
Le drame étant pour les 12% de Terminales qui ont échoué au bac, et pour tous les nouveaux bacheliers qui échoueront en licence universitaire, dans leur prépa ou dans leur BTS et IUT. C’est à eux de se préparer pour affronter ces années d’étude qui seront beaucoup plus exigeantes que leurs années de lycée.