Article rédigé par Fabrice Sorlin, le 02 juin 2016
[Source: Nouvelles de France]
Chers amis,
C’est toujours un honneur pour moi de revenir parler à Tbilissi, chez mes amis Géorgiens.
« Culture de vie et culture de mort » : le thème de cette session n’a probablement jamais été autant d’actualité qu’en ce moment.
Dans un monde de plus en plus globalisé et homogénéisé, où la diversité de pensée et la contradiction n’ont plus de places, les paradigmes politiques sont en pleine mutation.
Pour comprendre ces mutations, je vous propose de revenir dans un premier temps sur les fondements idéologiques de l’Union Européenne, ce qui nous permettra d’aborder en seconde partie les conséquences de ces idéologies sur la politique familiale au sein de l’Union Européenne, et en final de nous attarder un peu sur les raisons que nous avons d’espérer aujourd’hui.
Quels sont les fondements idéologiques de l’Union Européenne ?
L’Union Européenne comme chacun sait, a germé dans l’esprit de ses fondateurs après la deuxième guerre mondiale, avec comme objectif principal de préserver la paix sur le continent européen. Si un tel but est bien évidemment louable, le constat qui a été fait en amont, pose lui un réel problème.
La philosophe Hanna Arendt, au début du XX° siècle, a qualifié l’idéologie « comme un mode de manipulation de la pensée des individus, consistant à réduire celle-ci à la logique d’une seule idée ». Pour elle, gouverner à partir d’une idée trop simple devient dangeureux à partir du moment où l’on fonde sa politique dessus. Car cette idée nécessairement « vraie », devient une idée fixe, un but à atteindre, à tel point qu’il peut même justifier l’usage de la terreur.
Le meilleur exemple que nous pourrions citer est celui du Bolchévisme dont le postulat de départ était pourtant si simple : la propriété aliène les hommes, il faut donc la supprimer. Toutes les décisions prises ensuite, l’ont été à partir de ce point de départ erroné. Et toutes ces décisions sont allées à contre-sens de la réalité la plus criante et du bon sens le plus élémentaire. Les conséquences, nous les connaissons, des dizaines de millions de personnes en ont payé le prix fort.
En pointant l’Etat-Nation comme étant le seul responsable de deux conflits mondiaux les partisans de cette Union Européenne ont cherché eux aussi à détruire cette cause soi-disant mauvaise, pensant ainsi préserver la paix perpétuelle.
Mais comment des nations multiséculaires, dotées d’une langue et d’une histoire propres, d’une culture et d’une identité fortes ont-elles pu s’effacer au profit d’une Europe supranationale ?
C’est la dénaturation lente mais progressive des personnes qui se sont mutées en individus qui a permis un tel changement.
Car la personne s’oppose à l’individu. En effet, ce qui fonde notre personne, c’est d’être en relation avec Dieu, en relation avec les uns et les autres, et en relation avec le monde créé. Ce qui fonde l’individu en revanche, ce sont le consumérisme et le matérialisme qui entraînent le repli sur soi. Comme l’a dit le philosophe français Emmanuel Mounier, l’individualisme produit un homme « sans attache ni communauté naturelle, tournant d’abord vers autrui la méfiance, le calcul et la revendication ».
S’il est intrinsèque à la personne d’être attachée à sa famille, à sa terre, à son pays, il n’en est évidemment pas de même pour l’individu, qui cherchera avant tout le confort et la jouissance. Peu importe donc où cela se trouve, dans son propre pays ou ailleurs à l’étranger. Les frontières n’ont alors plus lieu d’exister entre les pays.
Mais comment donc cette dénaturation s’est-elle opérée ?
La réponse se trouve en partie dans les pages les moins glorieuses de l’histoire de France.
Comme nous l’avons dit plus haut, chaque personne est intrinsèquement d’abord liée à Dieu, aux autres ensuite, et prioritairement à sa famille.
La destruction de la religion et de la famille a coupé la personne de ses racines, de sa substance même, et l’a ainsi rendu vulnérable et fragile.
Or, c’est en 1789, pendant la révolution française et quelques années plus tard en 1793 au moment de la terreur, que la haine anti-chrétienne s’est propagée d’abord en France puis dans l’Europe entière par des fanatiques idéologisés. Les relations qui unissaient les hommes entre eux, auparavant dictées par les valeurs de charité fraternelle, d’amour du prochain et de pardon mutuel ont disparu progressivement en même temps que disparaissait la Chrétienté. La négation de la transcendance des êtres humains a eu pour conséquence de cesser de rendre les hommes égaux devant Dieu. Et les hommes ont ensuite cessé d’être égaux entre eux.
Plus récemment, c’est lors de la révolution de Mai 1968 que la famille, cellule de base de la société a été le plus violemment attaquée. Les slogans scandés par des étudiants exaltés résument à eux seuls cet épisode tragique : « il est interdit d’interdir », « vivre sans temps mort et jouir sans entrave » ou encore « un monde sans règle, une liberté sans limite, un monde sans entrave ».
Regardons maintenant quelles sont les conséquences de ces idéologies sur la politique familiale de cette même Europe.
Les héritiers idéologiques des révolutions de 1789 et de 1968, qui ont porté un coup fatal à la religion et à la morale en Europe, sont ceux qui majoritairement aujourd’hui votent les lois à Bruxelles.
Les élites européennes ainsi idéologisées et auto investies d’une mission sacrée qui consiste à supprimer les États-Nation, au nom de la paix et du bonheur des peuples, agissent bien souvent malgré lui ou même contre lui, et presque toujours sans lui.
L’union Européenne impose des lois aux peuples européens sans même les consulter.
Ainsi, dans sa volonté farouche de détruire les familles pour les remplacer par des individus déracinés et consuméristes, elle impose partout où elle le peut les idéologies LGBT, modèle d’individualisme et de matérialisme.
C’est pourquoi, elle intègre systématiquement le droit de ces homosexuels aux conditions demandées pour rentrer en son sein.
Les Croates gardent ainsi l’amer souvenir de 2002, année où leur fut imposé l’organisation de la première Gay-Pride de leur histoire, afin de pouvoir présenter leur demande d’adhésion à l’Union Européenne l’année suivante.
Plus récemment en Serbie, une des premières exigences imposées par l’Union Européenne pour entamer les pourparlers d’entrée dans l’UE concernait le droit des homosexuels.
Enfin, sur les barricades encore fumantes d’une Ukraine déchirée, la première demande de la délégation de l’Union Européenne a été de rappeler aux autorités ukrainiennes, leur obligation d’adopter une législation anti-discrimination en raison de l’orientation sexuelle.
Comme toutes les idéologies, sa mise en place forcée suit un mode opératoire quasi identique à chaque fois.
Ainsi en France, une loi anti-discrimination a été promulguée en 2004. Cette année là, une autorité administrative soi-disant « indépendante » est créée, dénommée Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l’Egalité. Elle sera compétente pour connaître et dénoncer toutes les discriminations directes ou indirectes, prohibées par la loi. Sous couvert de protection des minorités homosexuelles, c’est en réalité une arme efficace et redoutable dont se sont dotés les lobbies homosexuels. Il devient aujourd’hui impossible en France et dans tous les pays qui adoptent cette loi, de s’opposer à la promotion de l’homosexualité, ou aux revendications des lobbies, sans être taxé d’homophobe, et de tomber sous le coup de la loi, libérant ainsi la voie à toutes les revendications possibles.
Alors me direz-vous qu’en est-il de l’Union européenne et de ces raisons d’espérer dont je vous parlais tout à l’heure ?
Elles viennent d’un constat simple : l’Union Européenne se meurt.
Elle se meurt tout d’abord au niveau identitaire. Car cette Europe supranationale, qui a imposé une culture de mort à tous ses membres depuis des décennies, a scié la branche sur laquelle elle était assise. En maltraitant les familles et le droit à naître des enfants innocents, au profit des homosexuels et de l’individualisme, elle a vu sa démographie lourdement chuter ces dernières années. Les forces vives ne sont plus, et sont remplacées par une population vieillissante et de plus en plus égoïste. Les tentatives complètement folles de combler ce déficit par l’ouverture des frontières à une immigration non contrôlée, entraînent de nombreux incidents et le fort mécontentement des peuples européens qui cherchent chaque jour d’avantage le retour aux États-Nation, derniers refuges dans la tempête.
Elle se meurt ensuite au niveau économique. Elle ne tient que sous respiration artificielle depuis des années et notamment depuis les crises grecques et chypriotes. Malgré tous les efforts entrepris, la défiance est telle, que de nombreux peuples aspirent maintenant à en sortir.
Elle se meurt enfin au niveau politique. L’idéologie par essence ayant horreur des contradictions, les élites européennes ont voté des multiples lois coercitives et liberticides, comme nous l’avons montré plus haut en ce qui concerne les attaques contre les familles. Ces lois ont fini par imposer dans l’Union Européenne une chape de plomb si pesante, que plus personne n’ose sortir du rang. Y compris les politiques eux mêmes qui se sont fait piéger à leurs propres règles.
Les clivages qui opposaient traditionnellement les différents courants politiques en Europe sur les grands thèmes que sont l’économie, la politique intérieure ou la politique internationale n’existent quasiment plus. Les cartes sont brouillées et les peuples sont politiquement orphelins. Livrés à eux-mêmes par une élite qui n’inspire plus confiance, les peuples européens s’en retournent aux choses simples, celles qui régissent la vie quotidienne, aux principes fondamentaux intangibles, à savoir la vie et la famille. C’est ainsi qu’en dormition depuis des décennies, les valeurs traditionnelles sont en train d’émerger à nouveau, et en passe de s’imposer comme le fondement même du renouveau politique qui se dessine.
Cette forte poussée des peuples vers un retour aux valeurs traditionnelles incite des politiques de plus en plus nombreux à avoir le courage d’affirmer tout haut ce qu’aucun n‘osait penser tout bas il y a encore quelques années. Des victoires se dessinent ça et là en Europe lorsque le peuple est directement sollicité lors de référendums populaires ou de suffrages universels. Certes, le chantier reste gigantesque mais nous savons que l’Union Européenne en tant que construction idéologique ne cherche pas la preuve du bien fondé dans le bon fonctionnement mais dans une fuite en avant. En avançant à marche forcée contre l’avis des peuples, elle continuera à commettre de nombreuses erreurs et alors, tel le colosse au pied d’argile, elle finira par s’écrouler à terre, libérant ainsi des peuples déjà mûrs pour reconstruire une Europe soucieuse des familles et des nations.
Merci pour votre attention.
Fabrice Sorlin