Article rédigé par Stanislas de Larminat, le 22 juillet 2015
Le président Hollande réunissait mardi 21 juillet un « Sommet des consciences pour le climat » autour de quarante personnalités morales et religieuses. Cette grand-messe médiatique, voulue pour préparer les esprits avant la Conférence internationale sur le climat (COP21) du 30 novembre prochain, se révèle surtout un sommet d’instrumentalisation de la vérité scientifique, mais aussi des Églises, des pauvres et de l’opinion publique.
Le réchauffement climatique est le postulat de la mobilisation. Supposé faire l’unanimité, il sert de justification aux changements de politique publique nécessaires à la protection de l’environnement, mais sur lesquels personne n’est d’accord, sinon pour se donner bonne conscience en dramatisant les enjeux. Car ce postulat lui-même est très fragile.
Instrumentalisation de la vérité scientifique
Qui, aujourd’hui, soulignera que le GIEC a reconnu lui-même le plafonnement du réchauffement depuis 15 ans ? Le GIEC qualifie de « hiatus » cet évènement, qu’il n’avait d’ailleurs pas prévu.
On parle du consensus de milliers de scientifiques, de climatologues, d’astronomes, d’océanographes, de chimistes et biologistes, d’informaticiens et mathématiciens, de physiciens et thermiciens, d’agronomes et pédologues, pour ne citer que quelques-unes des cinquante disciplines référencées. Tout cela ne fait que quelques dizaines d’experts pour chacune d’entre elles. Il manque au GIEC la cohérence d’ensemble pour apporter la preuve.
Or depuis 2014, une discipline, reconnue dans le monde entier, l’Identification des systèmes complexes, a été ignorée par nos experts. Parmi ses initiateurs, un Français, reconnu mondialement pour son autorité en la matière, s’est attelé à cette vérification et conclut « que l’hypothèse d’un impact insignifiant de l’activité humaine ne peut pas être écartée et qu’on doit considérer comme un fait établi que l’activité solaire constitue l’explication première du “changement climatique” [1] ».
La première des précautions à prendre est donc de ne pas gaspiller 1000 milliards pour le climat, car, en science, un débat n’est jamais clos ! Faire croire à une vérité définitive, n’est-ce pas dévoyer les consciences ?
Instrumentalisation des Églises…
... et du pape François en particulier. Ils se trompent d’encyclique, ceux qui voient dans Laudato si’, le document magistériel signé le 24 mai dernier, une supplique scientifique de la cause humaine des variations climatique. Ils ne veulent pas lire qu’en la matière, « l’Église n’a pas de raison de proposer une parole définitive et elle comprend qu’elle doit écouter puis promouvoir le débat honnête entre scientifiques, en respectant la diversité d’opinions » (Laudato si’, n. 61).
Si le pape reconnaît le fait majoritaire scientifique, c’est pour démontrer que « tout est lié ». Cette phrase lancinante répétée dix fois, qui l’a entendue ? La protection de l’environnement n’a de sens que si c’est l’homme, et le plus faible avant tout, qui est la priorité. « Puisque tout est lié, la défense de la nature n’est pas compatible non plus avec la justification de l’avortement (LS, 120), ... les attaques auxquelles [la famille] est exposée, (213)... l’effacement des différences sexuelles (155), ... la culture du relativisme... l’exploitation sexuelle des enfants ou l’abandon des personnes âgées (123)... »
Qui prépare les esprits pour que la COP21 hiérarchise les véritables priorités en intégrant cette « écologie intégrale » ? Ne retenir qu’une partie de l’encyclique, n’est-ce pas dévoyer les consciences ?
Instrumentalisation des pauvres
L’objectif du sommet est de répondre à la question : “The climate, why do I care ?” La sémantique retenue n’est pas anodine. Il s’agit de cette théorie du Care qui consiste à prendre soin des choses, de la nature et du climat, de la même manière qu’on prend soin des pauvres, des handicapés et des personnes âgées.
Or il est significatif que les négociations internationales pour la santé, l’environnement et le développement placées sous l’égide de l’ONU s’articulent de plus en plus nettement autour d’une vision malthusienne de l’homme et du monde. 2015 est l’année où devraient aboutir un accord mondial de lutte contre les changements climatiques (COP 21) en décembre à Paris. C’est également l’année où les 8 Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) – adoptés en 2000 – arrivent à échéance et où la communauté internationale adoptera, en septembre à New-York, une nouvelle série de 17 Objectifs pour le Développement Durable (ODD) en tenant compte d’enjeux sociaux, énergétiques, environnementaux et climatiques.
Les 17 objectifs présentés prévoient d’autonomiser toutes les femmes et les filles, d’assurer la santé et l’éducation. Mais, derrière cette bonne conscience, se cachent la « santé reproductive » dont on sait qu’elle ambitionne de faire du droit à l’avortement une clef de voûte de ce nouveau système de valeurs mondiales.
Le Pape François, lui, n’est pas dupe. Il a condamné dans son encyclique « les pressions internationales... conditionnant des aides économiques à certaines politiques de santé reproductive » (n. 50). Quant à l’éducation, on se souvient que dans les années 1968, l’Unesco, enseignait la lecture dans le Petit livre rouge de Mao. Aujourd’hui, au Cameroun, l’organisation utilise le manuel de la protection contre le Sida, en demandant à ceux qui alphabétisent de ne pas tant se préoccuper de la grammaire que de la compréhension retenue du texte.
Prendre soin ainsi des pauvres, les traiter de la même manière que les choses, arrêter d’en prendre soin et les jeter quand on en n’a plus besoin : n’est-ce pas dévoyer les consciences ?
Instrumentalisation des opinions publiques
Le discours de nos gouvernants relève du « catastrophisme éclairé » si bien décrit par Jean-Pierre Dupuy : il s’agit d’« obtenir une image de l'avenir suffisamment catastrophiste pour être repoussante et suffisamment crédible pour déclencher les actions qui empêcheraient sa réalisation ». L’ONU, après la peur climatique, nous prépare la prochaine étape avec 9 « limites planétaires ». Rien de tel pour nous faire craindre la surpopulation, et nous convaincre de la nécessité d’une gouvernance mondiale pour y faire face. Mentir juste un peu aux opinions et leur faire juste un petit peu peur, pour mieux leur faire croire qu’on s’occupe d’elles : n’est-ce pas dévoyer les consciences ?
Qui dénoncera un tel sommet d’hypocrisies et de « bonnes conscience » ?
Stanislas de Larminat est ingénieur agronome et bio-éthicien, auteur de L’Ecologie chrétienne n’est pas ce que vous croyez (Salvator, 2014).
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[1] Philippe de Larminat, Changement climatique - Identification et projections, Ed. Iste, 2014.