Article rédigé par Laurent Ottavi, le 05 juillet 2013
Le Collectif des maires pour l'enfance s’organise pour défendre leur liberté de conscience, avec l’aide de La Manif pour tous et de plusieurs parlementaires. Au programme : requête en annulation au Conseil d’Etat, question prioritaire de constitutionnalité et proposition de loi.
Le collectif des maires pour l’enfance a déposé mardi une requête en annulation pour excès de pouvoir au Conseil d’Etat (cf. infra). Elle vise le ministre de l’Intérieur, et plus précisément, la circulaire du 13 juin 2013 relative aux « conséquences du refus illégal de célébrer un mariage de la part d’un officier d’état civil ». Ce document indiquait que le refus de célébrer des mariages entre deux personnes de même sexe serait passible de cinq ans de prison et de 75.000 euros d’amende.
Le collectif, rassemblant près de 20 000 maires et adjoints, de droite comme de gauche, revendique la liberté de conscience des officiers d’état civil. Pour son président, Frank Meyer, élu d’une commune de Seine-Maritime, « maire sans conscience n’est que ruine de la République ». Il rappelle que le chef de l'Etat avait évoqué cette liberté de conscience devant le congrès des maires de France, avant de faire piteusement machine arrière, sous la pression d'un groupuscule LGBT [1]. « François Hollande ne nous a pas promis la liberté de conscience, il a dit que nous l’avions ! » souligne Meyer.
La Manif pour tous, dont la présidente Ludovine de la Rochère était présente aux côtés de Frank Meyer lors de la présentation du recours au Conseil d'Etat, mardi 2 juillet, soutient le collectif pour l’enfance dans son combat, et promet de mettre à disposition des maires opposés à la célébration de mariages homosexuels les moyens d’informations juridiques et de communication nécessaires. Une pétition a également été lancée en faveur de la liberté de conscience des élus.
« Droit de la conscience »
Xavier Lemoine, maire de Montfermeil (Seine-Saint-Denis) et Jean-Michel Colo, maire d’Arcangues (Pyrénées-Atlantiques) étaient également présents pour évoquer les situations concrètes dans laquelle les place la loi Taubira. « La loi heurte déjà beaucoup dans son principe, mais encore davantage dans son application » a expliqué le premier. Il s’est étonné qu’on lui « demande de défaire d’une main, ce que les maires passent leur temps à construire », à savoir « le lien social ».
Le maire d'Arcangues avait refusé de marier deux hommes dans sa commune. Confronté aux pressions « des médias, des pouvoirs publics, du procureur, judiciaires et financières » il a dû céder face à la menace d’une astreinte de 1000 euros par jour et par personne. Un adjoint, « en désespoir de cause » selon l’expression de son avocat, maître Henri de Beauregard, a finalement accepté de procéder au « mariage Taubira ». Jean-Michel Colo, soutenu massivement par courriels (plus de 70 000), a demandé à être reçu par Manuel Valls dans une lettre rendue publique. Sans réponse du ministre de l’Intérieur jusqu’à maintenant.
« Organiser la liberté de conscience qui existe »
Autre initiative du Collectif des maires : une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) sur l’atteinte à la « liberté de conscience » de certains articles du code civil à la suite de la loi Taubira fera l’objet d’un traitement du Conseil constitutionnel. La question de la liberté de conscience n’avait pas été abordée par les Sages lors de l’examen de la loi ouvrant le mariage et l'adoption aux personnes de même sexe.
Le 27 juin 2001, le Conseil constitutionnel avait pourtant affirmé que la « liberté de conscience constitue l’un des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République ». Il se fondait notamment sur l’article 10 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi ».
Enfin, le député UMP Philippe Gosselin, un des membres fondateurs du Collectif des maires pour l’enfance, déposera avec ses collègues parlementaires une proposition de loi pour « organiser la liberté de conscience qui existe ». « Des maires et des adjoints, étant, de droit, officiers d’état civil, il n’y a pas besoin de délégation » a-t-il assuré. En revanche, dans le cas où ni le maire ni les adjoints ne souhaiteraient marier deux personnes de même sexe, « le mariage aura(it) bien lieu dans la commune mais ce sera(it) un délégué qui, dans des conditions équivalentes, le fera(it) ou un magistrat ». Mais il existe peu de probabilités qu’une telle proposition de loi soit adoptée : des amendements similaires proposés lors de l’examen de la loi Taubira avaient tous été sèchement refusés par la majorité socialiste.
L. Ot.
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[1] François Hollande au Congrès des Maires de France : « La loi s’applique pour tous dans le respect de la liberté de conscience », « les possibilités de délégation existent et peuvent être élargies. »