Article rédigé par François Martin, le 08 mars 2012
Ici même la semaine dernière Thierry Boutet ouvrait le débat sur la question de l’immigration. Thierry Boutet le sait, je ne partage pas totalement son point de vue et il me donne cette semaine l’occasion de lui répondre dans le cadre du débat qu’il désire poursuivre sur ce site.
Pour Thierry Boutet, la population de l’Europe a été globalement stable tout au long de son histoire. Elle a formé une communauté culturelle d’origine chrétienne. Aujourd’hui se produit en Europe un radical bouleversement démographique et culturel.
Dans l’avenir, deux communautés culturelles vont devoir cohabiter, l’une « chrétienne » peu convaincue de son identité, l’autre « musulmane » déterminée à s’imposer.
Thierry Boutet parle à la suite des analyses de John Caldwel de « changement de peuple » et conclut sur la nécessité d’une politique d’affirmation forte de l’identité culturelle européenne et de ses racines chrétiennes. Je rejoins Thierry Boutet dans ces conclusions mais je ne partage pas, en totalité, son analyse et sa manière de parler de l’islam. Je souhaiterais compléter ce qu’il écrit.
1. les chiffres, qu’il ne donne pas d’ailleurs, mais qu’il suggère, ne sont pas selon moi aussi alarmistes. Beaucoup d’immigrés, y compris musulmans, s’intègreront et même s’assimilerons sans que cela ne pose de problèmes.
2. Il n’y a pas un mais des islams comme il le reconnaît lui-même. Il est donc dangereux de parler de l’Islam. Il stigmatise l’islam comme une globalité intangible et, reprenant John Caldwel, affirme qu’il forme « une communauté enracinée, confiante en elle, avec une volonté forte de convertir les autres peuples à sa foi ».
Décrire ainsi l’islam n’a pas vraiment de sens et c’est même dangereux. La situation est beaucoup plus complexe. De nombreux musulmans ne souhaitent convertir personne et encore moins de force, et aspirent à s’intégrer et même à s’assimiler. Il y a donc un risque en parlant ainsi de l’Islam de dresser des murs au lieu d’ouvrir le dialogue. Méfions-nous des approches globalisantes.
3. Plutôt que de favoriser une barrière entre chrétiens et musulmans nous devons favoriser comme le suggère Mgr Sabbah « un front de chrétiens et de musulmans face à un front exclusivement musulman, pour ne pas dire islamiste ».
Mgr Sabbah oublie-t-il pour autant que la terre qu’il habite est d’abord chrétienne ? A-t-il abdiqué, cherche-t-il à composer face au pouvoir de l’islam « modéré » ? Ignore-t-il ce qu’il y a dans le Coran ? Est-il moins résistant que nous ? Non, bien sûr. Il évoque la possibilité du martyre pour les chrétiens, mais il voit simplement la réalité ; il voit des hommes, tous frères. Par ailleurs, c’est sur la question des valeurs républicaines, de l’amour de notre patrie, et aussi de l’ordre public, auquel tous les hommes de bonne volonté sont attachés, que nous pouvons et devons-nous retrouver. Nous n’avons d’ailleurs pas d’autre choix.
Pour le reste, le fait que nous sommes héritiers d’une civilisation chrétienne qu’il faut affirmer, que « l’islam n’est en aucune façon la culture de l’Europe », que « cette cohabitation inévitable exigera des marqueurs politiques clairs de notre identité dans le respect de chacun », et aussi que les « décrues » visibles du laïcisme et de l’athéisme nous donnent maintenant une belle opportunité, pour cela, et aussi sur le fait que nous sommes bien mal engagés , que nous avons beaucoup trop attendus et qu’il est plus que temps d’agir, je ne peux qu’être d’accord avec Thierry Boutet, tout comme je le suis avec l’essentiel des propos de Jean-François Chemain.
Commentaire de la rédaction
Le site Liberté politique est un site où des hommes et des femmes partageant la même espérance et les mêmes convictions sur l’homme et sa place dans la création peuvent débattre dans le plus grand respect de l’autre et dans la recherche d’une commune vérité. Sur des sujets complexes et contingents comme la question de l’immigration, cela n’exclut pas des différences de points de vue et d’appréciation. C’est pourquoi nous souhaitons ouvrir un débat. François Martin répond ici à mon éditorial et dans une certaine mesure aux articles de Jean François Chemain. Nous poursuivrons ce débat dans les semaines qui viennent. Au-delà des questions de forme qui sont c’est vrai importantes, Il n’y a pas de désaccord entre nous mais plutôt des questions qu’il nous faut creuser ensemble.
1. Chrétiens et musulmans, unis ensemble, peuvent-ils, à l’avenir, faire la France ? François Martin le pense, je ne le crois pas. La France est chrétienne et le restera ou sera musulmane pour des raisons à la fois démographiques et religieuses. C’est une première question.
2. Le respect des valeurs de la République suffit-il à nous protéger de l’islamisation ? François Martin estime que c’est un problème politique et d’ordre public. Certes, mais en ce qui me concerne je ne crois pas que les valeurs de la République suffiront à nous préserver d’une islamisation de la société française. Sur ce point nous ne divergeons pas, puisque François martinest aussi persuadé que moi de l’importance d’affirmer notre culture et de notre histoire. La République coupée de ses racines culturelles chrétiennes ne court-elle pas le risque de devenirune République islamique. ? Car, l’islam n’est-il pas comme le soutien Eric Ze imour « un communisme avec Dieu, c’est-à-dire une théorie égalitaire, collective qui contrôle la liberté de ses affiliés avec un dieu tutélaire ». C’est une seconde question.
3. Peut-il y avoir en France comme le suggère Mgr Sabbah pour les pays du Moyen Orient « un front de chrétiens et de musulmans face à un front exclusivement musulman, pour ne pas dire islamiste ».
François Martin le pense, parce que nous n’avons pas d’autre choix que de « faire société ». Je crois qu’il est possible de dialoguer avec des musulmans mais non avec un « islam de France » sous la pression de sa frange fondamentaliste. Chrétiens et musulmans ont 1 600 ans d’histoire commune au Moyen Orient. Ce n’est pas notre cas. Les Chrétiens d’Orient sont des dhimmis . Devons-nous accepter de l’être ? Mgr Sabbah indique que ce dialogue peut-aller jusqu’au martyre. Les Français sont-ils prêts à cette offrande ? C’est une troisième question.
Thierry Boutet
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