Article rédigé par Béatrice Bourges, le 10 février 2012
Le mariage et l’adoption par des couples homosexuels agitent l’opinion. Les candidats sont soumis à la pression des lobbies gays. La gauche est résolue, la droite est divisée : Christine Boutin est nettement opposée, Marine Le Pen est contre, son entourage partagé.
Position des quatre principaux candidats :
François Hollande l’a dit, il le fera dans les premiers mois de son mandat : « plusieurs textes seront proposés au vote du Parlement dans le courant de l’année 2012. Ces textes permettront, notamment, l’ouverture du mariage aux couples de même sexe et la possibilité d’adopter pour tous. Ils seront complétés par l’ouverture de l’assistance médicale à la procréation (AMP) à toutes les femmes [...] une loi permettra le changement de sexe à l’état civil sans qu’il y ait eu, de manière obligatoire et préalable, une opération chirurgicale». Afin de changer la perception sociale de l'homosexualité dans la société, le PS désire permettre une réflexion dès le primaire sur l'orientation sexuelle et la théorie du genre. Ce point éducatif serait soutenu par une loi instaurant une autorité similaire à la Halde afin de définir des motifs de discriminations sur de tels sujets et éventuellement réprimander des propos homophobes. Les partis écologiques, défenseurs de la vie animale et végétale, s'engagent à faire voter le mariage et l'adoption pour les homosexuels dans les cent jours, si la gauche remporte la présidentielle.
François Bayrou est favorable à l’adoption par les couples homosexuels, défavorable au mariage entre des couples de même sexe mais pour un contrat union civile équivalent au mariage. Le MoDem se porte donc garant de légaliser toute forme d'union entre deux personnes pour assurer des droits et des devoirs égaux, en particulier le logement, l’ensemble des droits sociaux, la fiscalité et la transmission du patrimoine avant et après le décès. Pour ce faire, la signature d’un Pacs serait possible en Mairie.
Marine Le Pen y est opposée, son entourage est partagé. Pour autant, le Front National rejette l'idée du Pacs ainsi que la légalisation du mariage et de l'adoption.
L’UMP est divisé sur le sujet.
"Je suis extrêmement confiante, un jour le mariage entre personne du même sexe existera dans notre pays. C’est une question de mois, d’années, mais de toute façon, ça se fera. Je ne m’inquiète absolument pas" déclare Roselyne Bachelot le 15 juin 2011 sur France Info.
Chantal Jouano, Benoit Apparu et quelques autres prônent une égalité parfaite entre couples hétérosexuels et couples homosexuels.
Tandis que sous l’impulsion de Jean-Marc Nesme, député de Saône et Loire et Dominique de Legge, sénateur d'Ile- et -Vilaine, une centaine de parlementaires (et la liste s’allonge de jour en jour) ont signé le « Manifeste pour la défense du droit fondamental de l'enfant d'être accueilli et de s'épanouir dans une famille composée d'un père et d'une mère » ; ils prônent, à l’instar d’Hervé Mariton, une « famille durable » fondée sur l’altérité sexuelle. On connaît également les positions de Christine Boutin, qui, au sein de l’UMP, a toujours été très claire sur ces sujets.
Nicolas Sarkozy se dit opposé au mariage entre personne du même sexe et défavorable à l’adoption des enfants par les couples homosexuels. On peut donc imaginer que le programme présidentiel du futur candidat sur ce sujet y sera défavorable.
Cependant, comme dans le programme de la dernière élection présidentielle, sera certainement proposé un contrat d’union civile qui ressemblera comme un frère au mariage, filiation exceptée.
Etat de l’opinion :
Un sondage BVA du mois de janvier dernier (Chambre des notaires/Le Parisien) nous indique que 63% des français sont favorables au mariage (48% en 2000, 60 % en 2006) et 56% à l’adoption (28 % en 1998, 48% en 2006). Les électeurs de droite y sont en majorité hostiles (54%). Les électeurs de gauche sont majoritairement favorables (74%).
A propos du mariage : y sont favorables 74% d’électeurs de gauche, 51% d’électeurs de droite.
A propos de l’adoption : y sont favorables 65% d’électeurs de gauche, 44% d’électeurs de droite.
L’opinion a donc beaucoup évolué. Mais que pouvait-on espérer d’autre, alors qu’aucun débat réel n’est engagé sur ce sujet et que l’on assiste à un véritable matraquage des esprits.
Qu’en est-il dans les 27 pays composant l’Union européenne ?
Une petite minorité de pays ont légiféré sur ces sujets :
- 5 pays on adopté une loi autorisant le mariage entre couples de même sexe : les Pays-Bas, la Belgique, l'Espagne, la Suède, le Portugal.
- 6 pays autorisent l’adoption par les couples homosexuels : les Pays-Bas, l’Espagne, la Suède, la Grande-Bretagne et la Belgique, le Portugal.
Ce qu’il faut savoir :
Concernant le CUC
Il est l’anti-chambre du mariage homosexuel. Des éléments très simples de droit et les exemples de nos voisins européens prouvent abondamment que le Cuc, loin d’empêcher le mariage des personnes de même sexe lui prépare minutieusement le terrain.
En quoi le mariage des couples de même sexe remet-il en cause les fondements profonds de notre société ?
Avec la reconnaissance du mariage homosexuel, on passe de la notion de droit individuel - le droit au mariage pour chacun - au droit du couple en tant que manifestation amoureuse.
La condition d’altérité sexuelle des époux posée par la loi découle de la signification profonde du mariage qui n’a pas pour rôle d’officialiser une vie de couple mais d’instituer la famille. Le but du mariage est d’aménager un cadre stable et sécurisant pour la famille.
Or, c’est la dimension familiale du mariage qui justifie que ce dernier ne puisse concerner qu’un homme et une femme car seule l’union d’un homme et d’une femme permet la procréation.
Si l’on ne fonde plus le mariage sur l’altérité sexuelle et qu’il ne devient plus qu’une reconnaissance sociale d’un amour, alors, il faut également autoriser le mariage à plusieurs, sous peine de discrimination envers des personnes qui voudraient officialiser un amour à plusieurs.
C’est ainsi qu’en 2007 une union civile à trois a été reconnue aux Pays Bas et qu’un procès se déroule actuellement à Vancouver pour faire reconnaître le mariage à plusieurs.
Le mariage entre personnes de même sexe a pour conséquence directe le droit à l’adoption, notamment en raison de la Cour européenne des droits de l’homme : en effet, une jurisprudence de janvier 2008 a condamné la France à verser des dommages et intérêts à une personne célibataire lesbienne à qui le droit d’adopter avait été refusé, au motif que l’adoption étant ouverte aux célibataires, il était discriminatoire de se fonder sur l’orientation sexuelle pour refuser de donner le droit d’adopter.
Si le mariage est autorisé, alors, cette jurisprudence a toutes les chances de s’appliquer à un couple homosexuel.
Concernant l’adoption des enfants par les couples homosexuels
Il est important de rappeler que, bien sûr, un couple homosexuel peut aimer un enfant autant qu’un couple hétérosexuel. Là n’est pas le problème, mais aimer un enfant est une chose, le structurer en est une autre.
L’amour est essentiel mais ne suffit pas pour structurer un enfant, qui a besoin de se situer dans une généalogie à double lignée, celle du père et celle de la mère (réelle pour la parenté biologique ou symbolique pour la parenté par adoption).
La parenté ne consiste pas seulement à aimer et éduquer : elle crée une filiation. La création de cette filiation est impossible pour des couples homosexuels.
De nombreux philosophes, pédopsychiatres, psychiatres, psychanalystes, psychologues, professionnels de l’enfance, écrivains, juristes, etc., se sont largement exprimés sur le sujet. Qu’il s’agisse de Sylviane Agacinski, Thibaud Collin, Xavier Lacroix, Jean-Pierre Winter, Juan-José Lopez-Ibor, Aldo Naouri, Pierre Lévy-Soussan, Claude Halmos, Agnès Auschitzka, Jacques Arène, Tony Anatrella, Benoît Duteurtre, Françoise Blaise-Kopp, Christian Flavigny, Michel Schneider, Pierre Legendre, Tony Anatrella, Caroline Eliacheff ou également de la Fédération nationale des associations d’aide aux pupilles de l’Etat, de l’Association Enfance et Famille d’adoption, de l’Association espagnole de pédiatrie, de l’American college of pediatricans etc., tous se prononcent sans ambiguïté : un enfant a besoin d’un père et d’une mère, pour se construire au mieux. Affirmer que les spécialistes sont unanimes à penser l’inverse est bien loin de la vérité.
Contrairement à ce que beaucoup pensent, ces sujets, loin de ne concerner qu’un petit nombre de personnes, intéressent la société toute entière car ce sont ses fondements même qui sont remis en cause.
Les plus farouchement partisans d’une légalisation du mariage et de l’adoption, sont également, les plus fervents défenseurs de la théorie du genre….
Béatrice Bourges est porte parole du Collectif pour l’enfant qui regroupe 79 associations, auteur de « L’homoparentalité en question, et l’enfant dans tout ça ? » paru aux éditions du Rocher en mai 2009
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