Article rédigé par CNAFC, le 03 février 2012
Nous tenons à remercier la confédération nationale des associations familiales catholiques pour sa contribution à notre réflexion sur les enjeux de la politique familiale dans le cadre de notre campagne d'information pour l'élection présidentielle.
Etat des lieux
La politique familiale en France se trouve dans une situation paradoxale. D’un côté, elle est saluée pour le rôle qu’elle est censée jouer dans le relatif dynamisme de la démographie française, elle est examinée avec intérêt par nos voisins européens, en particulier ceux qui sont confrontés à un véritable hiver démographique. Mais, d’un autre côté, elle est l’objet de remises en cause importantes (modification de la majoration des allocations familiales suivant l’âge, plafonnement de la majoration de retraite complémentaire pour les parents ayant élevé plus de trois enfants…) ou de tentatives de remises en cause (réforme de la carte famille nombreuse en 2008, propositions visant à mettre les allocations familiales sous conditions de ressources…). Par ailleurs, de nombreuses enquêtes montrent que les familles n’accueillent pas le nombre d’enfants qu’elles souhaiteraient, que l’environnement incertain leur fait envisager l’avenir avec inquiétude, que des jeunes renoncent à fonder une famille... Le contexte économique et les difficultés des finances publiques ont comme dommages collatéraux de rendre la lisibilité de la politique familiale fragile et complexe, et d’accentuer la confusion avec la politique sociale.
Positions en présence
Au-delà des propositions visant à mettre les prestations familiales sous conditions de ressources, des nouvelles pistes sont maintenant ouvertes qui modifient profondément les mécanismes de solidarité entre familles. Qu’il s’agisse par exemple de remplacer le quotient familial par un système forfaitaire ou de supprimer le quotient conjugal, ces différentes propositions renforceraient encore l’individualisation des droits au détriment de la compréhension de la mission sociale de la famille. En termes de financement, le désintérêt de certaines organisations patronales pour la politique familiale, vraisemblablement faute d’une visibilité claire sur ce que les entreprises financent, ajouté aux inquiétudes sur la compétitivité des entreprises françaises et sur la charge croissante que représente le financement de la protection sociale alimentent des réflexions sur la possibilité de transférer tout ou partie du financement de la protection sociale vers l’impôt ou la CSG (familialisée ou pas) ou encore d’adopter une « fiscalité anti délocalisation »… Enfin, certains vont même jusqu’à parler d’un rôle négatif des familles, en particulier des familles nombreuses, en termes « d’empreinte écologique »…
Enjeux
Les aspirations de nos contemporains à l’égard de la famille restent fortes, mais les inquiétudes sur la possibilité de les réaliser le sont aussi et ceci dépasse les seuls aspects matériels : ainsi par exemple, la question de la conciliation vie familiale et vie professionnelle, celle du coût du logement ou des études supérieures... Dans ce contexte, comment favoriser la mise en œuvre d’un vrai choix personnel en matière familiale et éclairer les bienfaits de la « famille durable » pour la société ? La lisibilité de la politique familiale dépend également de son financement dont la charge pèse actuellement essentiellement sur le travail. Ces points éclaircis, les familles pourront remplir leurs missions pour le bien de la société (y compris dans ses aspects économiques) et celui de chacun de leurs membres.
Propositions
Prendre en compte la capacité contributive des familles
- Préserver et développer l’utilisation du quotient familial (pour le calcul des frais de scolarité dans l’enseignement supérieur, des taxes locales sur les ordures ménagères…)
- Familialiser la CSG,
- Etendre les dispositifs existant en matière de fiscalité locale,
- Créer un complément familial de retraite par capitalisation pour répondre à la difficulté des familles de se constituer une épargne suffisante pour préparer leur retraite.
Améliorer le cadre de vie des familles
- Relancer les dispositifs de prêt à taux zéro avec un volet spécifique pour les familles nombreuses,
- Limiter le travail le dimanche,
- Stimuler la construction de grands logements,
- Etendre aux taxes foncières les abattements pour charge de famille existants pour la taxe d’habitation.
Pérenniser le financement de la politique familiale et conforter sa légitimité
- Revaloriser le travail (coût de la main d’œuvre, emploi des seniors …),
- Libérer les capacités de la France à susciter une croissance économique durable et créatrice d’emplois (lutte contre le dumping social, encouragement de l’investissement productif, lutte déterminée contre les déficits publics, source inacceptable d’endettement pour les générations futures …),
- Distinguer le financement des mesures de politique sociale des mesures de politique familiale, les unes relevant de la solidarité nationale, les autres de la solidarité entre actifs, à commencer par les cotisations sociales.
Améliorer la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle pour créer les conditions d’un vrai libre-choix des familles
- Conserver le principe de libre-choix des familles pour les congés parentaux en maintenant la possibilité d’opter pour une durée courte (1 an) ou une durée longue (3 ans) du CLCA,
- Créer un congé parental fractionné permettant aux parents d'être présents aux différents âges de l'enfant (par exemple, outre à la naissance, à l’adolescence),
- Développer la valorisation des acquis de l’expérience et supprimer les mesures discriminatoires pour les parents ayant choisi d’arrêter de travailler pour élever leurs enfants,
- Renforcer l'accompagnement des mères qui prennent un congé parental alors qu’elles occupent un emploi précaire qu'elles ne retrouveront pas à la fin du congé parental,
- Favoriser la formation en cours de congé parental pour une meilleure employabilité,
- Faciliter la réinsertion en entreprise à « temps choisi », en particulier pour les mères de plusieurs enfants,
- Soutenir les initiatives locales de création et de développement de centres de télétravail,
- Soutenir les initiatives locales de développement de dispositifs de garde d’enfants interentreprises.