Une angoisse identitaire ?

source[France catholique] Est-il vrai que la question de l’identité travaille beaucoup les catholiques, en ce moment ? Plusieurs ouvrages viennent de paraître à ce sujet. 

Je note l’essai de Jérôme Fourquet, par ailleurs directeur du département Opinion de l’Ifop : À la droite de Dieu, le réveil identitaire des catholiques. N’ayant pas lu le livre, je ne retiens que l’idée du titre et je m’interroge. D’abord personnellement, et je suis obligé de faire un aveu. Je n’éprouve quant à moi aucune angoisse identitaire. Dieu merci, je n’ai pas besoin de tranquillisants. Je vis plutôt paisiblement avec mes convictions, sans remue-méninges particulier. Et si je regarde autour de moi, du moins du côté des catholiques que je fréquente – car je ne fréquente pas, loin de là, que des catholiques – je n’ai pas le sentiment d’un trouble profond.

On invoque certes la situation difficile de gens qui se considèrent désormais comme minoritaires dans la société. C’est une réalité dont il faudrait exactement analyser la nature. Être minoritaire, cela ne signifie pas nécessairement vivre comme des émigrés de l’intérieur. Ce n’est pas ce que j’observe, bien au contraire. J’ai plutôt l’impression que les catholiques de conviction sont à l’aise dans la vie sociale, qu’il sont plutôt équilibrés et que leur entourage est plutôt content de leur présence et même de leur rayonnement quand il se manifeste.

Oui, me dira-t-on, mais il y a les grandes questions dites sociétales qui bouleversent les mœurs. Et vos catholiques se trouvent là non seulement minoritaires mais en décalage total avec le consensus général et l’évolution des mentalités. C’est vrai, incontestablement. Mais cela doit-il être vécu comme une faiblesse ? Être en résistance, cela peut vous donner au contraire une certaine force intérieure, d’autant qu’il s’agit très souvent de se déterminer après avoir creusé les sujets controversés, alors que la masse est tentée de suivre le courant sans plus.

Mais, insistera-t-on, il y d’autres menaces qui agitent l’opinion : celle de l’islam, par exemple, et celle des migrants. Là encore, je me méfie des idées toutes faites. Il me semble que les chrétiens sont plus à même de comprendre les musulmans que les incroyants, parce qu’ils sont intimement marqués par le phénomène religieux et souvent mieux équipés intellectuellement pour en comprendre les données. On me dira que je suis bien optimiste. Oui, et je l’assume, jusqu’à preuve que j’ai foncièrement tort.

Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 30 janvier 2018