Comme chacun le sait, Lampedusa est une petite île italienne, située au sud de la Sicile et à proximité des côtes africaines. De façon quotidienne ou presque, de jour comme de nuit, des bateaux, chargés ou plutôt surchargés d’immigrants africains ou moyen-orientaux,  apparaissent au large de ses côtes, frappant à la porte d’un continent considéré paradisiaque. Le drame d’une immigration sauvage, illégale, terriblement coûteuse pour les immigrés, souvent dangereuse, notamment pour les femmes isolées devenues proies faciles pour les organisations maffieuses, est immense.

Afin d’y voir plus clair, je viens de me rendre sur place. Qu’ai-je constaté ? La petite ville de Lampedusa a été transformée en forteresse militaire, abritant des bateaux de guerre comme des vedettes rapides, des avions et des hélicoptères, des navires hôpitaux, une multitude de radars géants scrutant la mer méditerranée. Sont sur le pied de guerre des marins, des soldats, des gendarmes, des policiers, des forces spéciales, des équipes de médecins militaires. L’île est devenue une importante base militaire, dont les rouages semblent remarquablement huilés.

Cela dit, quel est l’objectif de cette organisation ? Les ordres de mission sont clairs : tout bateau apparaissant dans les écrans radar doit être instantanément secouru avec toutes les forces disponibles possibles, dans des conditions d’accueil optimales. Cela signifie que lorsqu’un bateau est aperçu, l’objectif unique de la base militaire est de se mettre en branle pour aller chercher le bateau en question, transférer les immigrants sur un bateau sécurisé, procéder immédiatement aux premiers soins médicaux et à la première alimentation de base, faire débarquer les personnes sur l’île dans une zone spéciale, les transférer dans le centre d’accueil prévu à cet effet, puis les faire repartir le plus vite possible sur les côtes continentales italiennes, au moyen de paquebots utilisés à cet effet.

Un accueil indigne

L’accueil de ces immigrants est donc remarquablement organisé. Il y manque cependant un maillon essentiel : celui du contrôle, et de l’éventuel refoulement. Sur ces deux points, pourtant fondamentaux,  rien n’est mis en place. Ni contrôle, ni refoulement. Or les forces militaires de Lampedusa le savent bien : parmi les immigrants s’insèrent de nombreuses personnes qui n’ont aucun rapport avec des réfugiés politiques, et devraient donc logiquement être refoulées, mais qui savent que le pied posé sur Lampedusa leur offre toutes les possibilités de rester définitivement en Europe. Pourtant, à ces nombreux immigrants illégaux, l’Union européenne ne pourra offrir ni travail, ni logement décent, ni vie sociale valorisante. Au drame du départ de leur terre va donc s’ajouter le drame d’un accueil indigne, en dehors de tout contrôle et de toute maîtrise de ce flux migratoire.

Ainsi, ces populations immigrées passent de précarité en précarité, et contribuent à déstabiliser un peu plus des nations européennes aujourd’hui bien mal en point. L’Union européenne ferme pudiquement les yeux sur cette situation : son inaction coupable, si elle continue ainsi, ne peut qu’aboutir à un dénouement dramatique pour tous.

François Billot de Lochner

 

 

***