Source [Contrepoints] Jamais les libertés publiques n’auront autant été attaquées que par ce gouvernement que l’on dit libéral.
Platon a écrit l’allégorie de la caverne il y a plus de 25 siècles. Et malgré le nombre impressionnant d’intelligences remarquables qui se sont penchées depuis sur le savoir, la sagesse, la connaissance, la morale… les gens continuent à croire que la vérité est une évidence et qu’une fois qu’elle a été décrétée, elle doit être admise par tout le monde, par la force ou par l’enseignement : que l’on peut et même que l’on doit transformer tous les idiots en savants à coup de bâton et en leur tendant des carottes, que l’éducation, le comportement et les opinions ne sont qu’une question de moyens et d’autorité.
On a même perverti un mot pour décrire ce dogme : l’altruisme, la profonde conviction qu’il faut aider les autres malgré eux. Cette mission sacrée a surtout l’avantage d’opposer et de neutraliser deux sentiments contradictoires : la culpabilité d’être supérieur aux autres et de savoir ce qui est vrai et bon alors que les autres ne le savent pas et la certitude d’être le seul au monde à posséder un pouvoir de décision sur les actions que l’on entreprend alors que tous les autres êtres humains en sont dépourvus.
La croisade contre la bêtise a en fait un but très clair : faire reconnaître à tous que l’on est supérieur aux autres.
LE PHARE DU MONDE LIBRE
Sous l’impulsion de Jean-Jacques Rousseau, la France a depuis deux cent ans décrété unilatéralement être le champion du monde de l’arrogance et du narcissisme appliqué en politique. Elle est d’ailleurs passée depuis sous l’impulsion de cette certitude, du rang de première puissance mondiale à celui où elle est actuellement.
Le gouvernement actuel entend donc bien démontrer une fois pour toutes son magistère moral en reprenant la tête du volontarisme progressiste que l’on croyait pour l’instant être l’apanage de l’élite Old Money de Cap Cod. Il faut dire que la place est à prendre depuis que Donald Trump a renvoyé dans leurs certitudes les maîtres à penser juste et bien d’outre-Atlantique.
Un nouvel épisode de cette guerre des sachants contre la boue se déroule en ce moment dans les travées de l’Assemblée nationale avec l’adoption de la loi anti-haine, lieu où les députés de la majorité luttent avec courage et abnégation contre une opposition totalement inexistante et secrètement envieuse d’une telle audace liberticide (voire même en étant très excités à l’idée de participer activement au concours d’interdictions, de sanctions et de brimades).*
CENSURE, ÉGALITÉ, IMPÔTS
Laëtitia Avia, icône de la diversité de la nouvelle assemblée et « résultat d’un modèle de politique publique » a été propulsée pour l’occasion en orbite par Emmanuel Macron pour défendre un projet de loi qui s’inscrit dans la droite ligne des actions pour l’égalité des droits et des chances dont elle est une fervente partisane. Elle aura réussi en quelques discours à faire ce que tous les dictateurs en herbe avait toujours rêvé sans jamais avoir osé le faire : dynamiter la liberté d’expression, interdire officiellement la contradiction et par la même fracturer encore plus la société française en mettant hors-la-loi la différence d’opinion.
Il faut dire qu’il était temps d’agir. On n’était pas passé très loin de la catastrophe avec le mouvement des Gilets jaunes. Il fallait absolument réduire au silence cet abomination anti-démocratique (entendez par là, qui ne suit pas les règles de la démocratie officielle) que sont les réseaux sociaux. Car il est clair que la désapprobation populaire qui a agité le pays pendant six mois ne pouvait venir que d’une seule et unique cause : la haine.
SENTIMENTS INTERDITS
Car c’est la haine qui est à l’origine du ras-le-bol fiscal : si on est altruiste, on paie ses impôts avec joie et bonheur.
C’est la haine qui est à l’origine de la dénonciation de l’excuse taxe carbone : si on est altruiste, on retourne à l’Âge des cavernes pour éviter à la planète de griller par notre faute.
C’est la haine qui est à l’origine de la dénonciation de l’obésité étatique : si on est altruiste, on est pour un État qui fait tout pour les gens à leur place, ceux-ci étant incapables de s’en sortir par eux-mêmes.
C’est la haine qui fait que les provinciaux prennent leur voiture pour aller faire leurs courses au supermarché : quand on est altruiste, on roule en vélo, on mange local, bio, végan et équitable.
C’est la haine qui est à la source de l’extrême droite, de l’extrême gauche, de l’ancien monde, des traditions, des opinions, des habitudes, des valeurs, bref c’est la haine qui est à l’origine de notre société.
Éliminons la haine et nous éliminerons cet enfer : les autres.
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