«L'autoconservation des ovocytes aggraverait la dépendance des femmes à la technique»

Source [Le Figaro] Le Comité d'éthique se dit favorable à la possibilité de cryogéniser ses propres ovocytes en vue d'une grossesse future. Pour Marianne Durano, cette technique risque de renforcer la pression que subissent les femmes, sommées de choisir entre la maternité et leur vie professionnelle.

FIGAROVOX : Dans son avis rendu mardi, le CCNE ouvre la voie à une autoconservation par congélation de ses propres ovocytes. Pourtant, dans un avis précédent, il s'y était refusé compte tenu des nombreux risques que présente cette technique…

Marianne DURANO.- La raison d'être du CCNE est d'émettre des réserves qui seront bafouées lors de son prochain rapport. C'était déjà le cas avec l'extension de la PMA, et le CCNE récidive sur la question de l'autoconservation des ovocytes. Dès lors qu'on accepte l'idée d'une «révision» systématique des lois bioéthiques, on tolère l'idée que ce qui était impensable il y a peu devienne légitime aujourd'hui: le CCNE se condamne ainsi à n'être qu'une caisse enregistreuse des évolutions sociétales. Ses avis sont toujours déjà caducs. Il est évident que cette logique vaut également pour la pratique des mères porteuses ou l'insémination post mortem, aujourd'hui condamnées par le CCNE avec autant de vigueur que l'était hier l'autoconservation des ovocytes.

Ce qui est particulièrement désarmant, lorsqu'on lit les avis du CCNE, c'est que ses arguments sont toujours très pertinents. Dans sa préhistoire, c'est-à-dire en 2017, le CCNE alertait la société sur les problèmes considérables soulevés par l'autoconservation des ovocytes: surmédicalisation de la procréation, coût et prise en charge des opérations de prélèvement et de cryogénisation des ovocytes, effets secondaires mal maîtrisés de l'hyper-stimulation ovarienne, risque de pressions sociales et professionnelles sur les malheureuses qui préféreront procréer jeunes, dangers liés aux grossesses tardives, devenir des ovocytes non-implantés, etc. Qu'importe, tout comme pour la PMA, le CCNE piétine ses conclusions un an plus tard, au nom de la sacro-sainte «autonomie individuelle». Drôle d'autonomie, qui soumet le corps des femmes et leur désir d'enfant à des procédés techniques de pointe, dont elles dépendront ultérieurement pour procréer... On peut également s'interroger sur les priorités d'un gouvernement qui rogne sur le remboursement de certains actes médicaux, d'une part, et qui pourrait, d'autre part, légaliser des opérations médicales pour des femmes qui ne sont pas malades...

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