La Croix consacre un article à ces étudiants en médecine, catholiques, confrontés à l’avortement.
Adèle, interne en gynécologie-obstétrique d’un CHU parisien, balaie du regard le planning du jour, affiché au bloc opératoire. La crainte dormante qui l’accompagne se réveille. Son nom y figure, accolé à une interruption de grossesse, prévue pour l’après-midi même. Pour éviter de procéder à cet acte qui heurte sa foi et sa conscience, elle va devoir négocier, « magouiller » comme elle dit, en échangeant son intervention avec un de ses collègues internes, « plus ou moins compréhensifs ».
Il est en effet compliqué pour des étudiants de faire valoir la clause de conscience :
En théorie, une clause de conscience spécifique aux interruptions de grossesse les protège, édictant qu’aucun soignant n’est forcé d’y participer. En pratique, c’est plus nébuleux. « Le terme” clause de conscience” sonne très formel et juridique mais ce n’est rien d’autre que la force de dire “non” à chaque fois que la situation se présente, décrit Adèle. Concrètement cela signifie marchander dans un couloir avec un co-interne ou un chef, en évitant de se faire remarquer et en espérant que cela ne pose pas trop de problèmes. » En période d’apprentissage, ces jeunes, qui ont tout à prouver, ne se sentent pas forcément légitimes au refus. Une autocensure entretenue par l’organisation même de leur formation à l’hôpital : « En stage, nous sommes notés sur chaque journée de garde et elles se déroulent à chaque fois avec un référent différent, ça ne favorise pas la confiance ou les confidences », explique Iris, étudiante sage-femme.
« Certains chefs nous font comprendre qu’en gynéco l’interruption de grossesse fait partie du “package” inhérent au métier et que si cela ne nous convient pas, il aurait fallu choisir une autre carrière », explique Clara, externe en stage de gynécologie-obstétrique.
Bertrand de Rochambeau, président du Syndicat national des gynécologues-obstétriciens de France, indique que l’avortement
« reste une tâche ingrate dont on se débarrasse bien volontiers sur d’autres ».
Gilles Grangé, gynécologue à la maternité de Port-Royal, ajoute :
« On ne veut pas embêter les titulaires avec ces opérations glauques. Ce n’est facile pour personne. Certains ont la nausée les premières fois ».
Une étudiante précise :
« Il n’y a quasiment que les internes qui font les IVG par aspiration. Pour les titulaires, ce n’est ni technique, ni noble et cela prend du temps sur la “belle chirurgie”. »
Les étudiantes sages-femmes sont elles aussi concernées. L’une raconte :
« à chaque stage, j’arrivais le matin la boule au ventre de peur que ça me tombe dessus. J’ai réussi à dire que je ne voulais pas délivrer la pilule abortive aux patientes, éviter les IMG de bébés trisomiques mais je n’ai pas pu échapper à tout. »
La Croix ne le précise pas, mais ces étudiants en médecine peuvent rejoindre le collectif de soignants opposés à la culture de mort : Nos mains ne tueront pas.
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