À en croire la majorité des politiques européens et des médias, nous serions en train de basculer du vieux monde de l’énergie vers celui de la transition énergétique. Penser qu’une politique aussi cruciale que la politique énergétique puisse se résumer au slogan simpliste « Sauver la planète » témoigne d’un manque de vision de la marche du monde…
Une analyse de Samuel Furfari pour Causeur, en partenariat avec la revue Conflits.
Espérer que l’urgence climatique pourra tout faire changer rapidement est naïf, car l’unité de temps du système énergétique est au mieux la décennie.
La transition énergétique politique appelée aussi décarbonation est un vœu pieux qui ne se réalisera pas pour une série de raisons que nous voulons résumer dans cette tribune. Cette affirmation semblera saugrenue tant elle va à contre sens de la pensée dominante. Une tribune ne peut démontrer, mais seulement alerter. Le lecteur pourra se référer s’il le souhaite aux démonstrations qui se trouvent dans une quinzaine de livres et de nombreuses tribunes.
La demande en énergie ne peut que croître
L’énergie c’est la vie. Tout — absolument tout — ce que nous faisons consomme de l’énergie. Même notre alimentation est une consommation d’énergie dont notre corps a besoin pour vivre. Nous avons appris au cours de physique que l’énergie est la même notion que le travail, c’est-à-dire ce qui permet de déplacer une force (un poids). Sauf à mourir de faim, il faut travailler et donc il faut de l’énergie. Dans le temps, l’énergie était fournie par la force des animaux ou de l’homme. Pour la cuisson on utilisait ce qu’on appelle aujourd’hui bioénergie, c’est-à-dire le bois. Grâce à la révolution énergétique, on a complètement changé le monde. Aujourd’hui certains qui n’ont jamais retourné à la bêche un lopin de terre prônent le retour à « l’énergie musculaire ». C’est leur choix. Il est respectable, tant qu’ils ne l’imposent pas.
On estime pour l’instant qu’il y a dans le monde 1,3 milliard d’humains qui n’ont pas accès à l’électricité dont 290 millions en Inde. Pour la cuisine, 40 % de la population mondiale dépend des énergies renouvelables : bois vert, charbon de bois, ou bouses séchées. Cela brûle en dégageant des fumées toxiques qui causent des pollutions atmosphériques et des décès prématurés. Il y a une urgence d’électrifier l’Afrique comme je l’ai écrit dans un livre en 2019.
Leur recherche de qualité de vie et leur démographie galopante induisent une augmentation de la consommation d’énergie. Les dirigeants de ces pays — Inde en tête — le savent et n’ont qu’un souci : croître et donc consommer de l’énergie, celles peu chères que nous avons nous-mêmes utilisées pour assurer notre développement : énergies fossiles et nucléaires.
La question énergétique n’est pas née avec la décarbonation
La transition énergétique n’est pas une nouvelle quête. Ce qui est nouveau c’est de l’appeler décarbonation, c’est-à-dire abandonner complètement les énergies fossiles.
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