[Source : Famille Chrétienne]

En pèlerinage dans le Morvan pour leur rassemblement annuel, plus de 1 500 jeunes Routiers Scouts d'Europe et leurs aînés se sont retrouvés au sommet de la colline de Vézelay hier et avant-hier, dans la basilique. Cette année, le Cardinal Sarah était l'invité d'honneur. Reportage.

« C'est une expérience magnifique. Je suis impressionné par la force de ces jeunes. J'ai entendu des témoignages d'une grande maturité humaine et spirituelle. Ils sont l'avenir de la France et de l'Europe. » Le Cardinal Sarah vient de ranger sa mitre, sa crosse et ses habits liturgiques. Nous sommes le lundi 31 octobre, à Vézelay, après la messe de clôture du pèlerinage des Routiers Scouts d'Europe. Touché dans son âme de prélat et de pasteur par ces quelque 1 500 Routiers venus des quatre coins de France et d'Europe, le cardinal guinéen ne cache pas sa joie d'être venu de Rome exprès pour l'occasion.

Trois jours plus tôt, dès le vendredi en début d'après-midi, les pèlerins s'élançaient de différents points du parc naturel du Morvan pour rejoindre la basilique de Vézelay. Sept « tronçons » chacun sous le patronage d'un saint ou d'un bienheureux et rassemblant des régions de France et d'Europe. Soit « 250 km de chemins si on additionne tous les parcours », précise Laurent Garnier, responsable de la communication externe des Guides et Scouts d'Europe.

Jusqu'à l'arrivée à Vézelay, le Cardinal Sarah et le philosophe Fabrice Hadjadj auront rejoint, lors de messes ou d'étapes, chacun des tronçons pour témoigner et enseigner. Bertrand Humeau, commissaire du rassemblement, a beau être Routier depuis 1982, il est marqué par ces interventions. Arrivant sur le bivouac du dimanche soir, sous un soleil radieux, ce consultant dans la vie civile affiche un sourire hospitalier et cordial. Les conférences du philosophe sur la paternité ont fait mouche : « On devient homme quand on devient père et on devient père quand on est capable de s'agenouiller avec son fils pour se recevoir du Bon Dieu, autrement dit pour recevoir le don de Dieu », se souvient avoir entendu ce père de sept enfants.

Dimanche 30 octobre, milieu d'après-midi : les premiers routiers arrivent aux Ruesses, une zone située au pied de la « colline éternelle » en haut de laquelle trône la basilique de Vézelay. Tous arrivent en chantant, baussant ou drapeau de région en tête. Le ciel est magnifique, le soleil encore rayonnant. « Le beau temps contribue à la réussite de cette 41e édition » se félicite d'ailleurs Bertrand Humeau. Les tentes se montent. Le bivouac s'installe. Les aumôniers se mêlent aux jeunes Routiers comme aux anciens revenus pour l'occasion. Ceux qui ont prononcé leur Départ Routier (l'engagement ultime) tiennent un bâton fourchu, « image de la fidélité au sol ancestral et de l'ouverture du cœur » comme le précise le cérémonial. Au loin, on entend jouer des bombardes.

Une séance questions-réponses avec le cardinal Sarah

Petit à petit, l'effervescence gagne le camp : on attend le cardinal Sarah d'un instant à l'autre. Finalement, le prélat apparaît au milieu du camp, sa pourpre cardinalice bien visible. S'asseyant au milieu d'un parterre de jeunes et d'aînés, le Préfet de la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements prend le micro. Après un court témoignage sur sa vocation de prêtre reçue en Afrique dans les années 1950, le cardinal joue le jeu des questions-réponses avec son « public ». Clin d'œil à Famille Chrétienne, quelqu'un l'interpelle sur l'interview accordée il y a quelques mois à notre hebdomadaire, dans laquelle le cardinal parlait de l'orientation de l'autel. Réponse du haut prélat : « La liturgie, ce n'est pas nous regarder, c'est regarder Dieu en premier. Il y a une croissance dans la liturgie mais elle doit traverser les siècles sans se couper des racines ». Une autre question fuse sur l'épineuse question des divorcés remariés et leur accès à la communion. Réponse : « Dans beaucoup de pays, on ne peut pas communier par manque de prêtres ou à cause des persécutions. Des témoins contemporains ont été emprisonnés sans pouvoir communier. Mais tous gardaient une relation authentique au Seigneur. Il ne faut pas oublier que la communion spirituelle existe. »

Une veillée d'une intensité étonnante

Préparé au feu de bois, le dîner est vite avalé. Alors, en début de soirée, sous une voûte d'étoiles, les Routiers se mettent en route sur le chemin de terre et de pierres sinuant le long de la « colline éternelle » pour monter à la basilique. Torches et flambeaux encadrent en début de marche la première croix portée par quatre jeunes. « Mendiez, mendiez, l'humilité du cœur… » chantent à l'unisson les premiers groupes. Vers 20 h 30, tous les Routiers sont au pied de la basilique. Commence alors une soirée puissante de chants, d'abord sur le parvis, puis à l'intérieur suivie d'une adoration nocturne méditée par le Cardinal Sarah. La centaine de prêtres présents dans ce joyau roman écoutent, confessent et donnent l'absolution. À la sortie, Antoine, venu du Beaujolais pour la première fois avoue être « super content » et « impressionné » : « les chants donnent une unité avec le reste des Routiers ». De son côté, Niels, étudiant aux Arts et Métiers à Lille, qui participe aussi pour la première fois à ce pèlerinage, n'en revient pas : « Je ne me doutais pas que ce serait aussi international. » Et de poursuivre : « Cette veillée, c'est très beau et très grand ! C'est une vraie piqûre de rappel pour prendre plus au sérieux sa foi. » De fait, le thème de ce pèlerinage était d'« établir le règne du Christ dans toute sa vie ». Le lendemain, après une messe avec plus de 2 800 participants (des amis et familles venus pour l'occasion s'étaient agrégés à l'assistance) en présence de Mgr Hervé Giraud, archevêque de Sens et Auxerre, les Routiers repartent chez eux, « interpellés et ressourcés dans leur foi » confie Jean-François, Routier belge. Bref, prêts à prendre la Route qui s'offre à eux…

Joseph Vallançon