Au cours de son dernier voyage en Arabie Séoudite, D. Trump a déclaré la guerre au terrorisme islamique, en menaçant de ses foudres, non pas Ryad, mais Téhéran.
J'ai pris cela pour une formule diplomatique, destinée à faire comprendre à l'Arabie Séoudite que son soutien au terrorisme ne serait plus désormais toléré, tout en préservant sa susceptibilité.
La tension qui marque les rapports entre le Qatar et le reste de la péninsule arabique apporte un autre sens au propos de D.Trump.
On aurait pu s'en douter: toute la politique américaine, depuis la fin de la guerre du Vietnam, est inspirée par le prix du baril. C'est devenu encore plus évident depuis 2005, quand les USA ont décidé de se lancer dans l'exploitation des gaz et pétroles de schiste (le prix du baril oscille depuis plus d'un an entre 50 et 55$, ce qui est insuffisant pour l'économie américaine).
Or, la présence de deux gisements faramineux (l'un dans le golfe persique, appartenant pour moitié chacun au Qatar et à l'Iran), l'autre en Méditerranée (qui entoure l'île de Chypre, et qui est situé dans les zones d'influence de la Grèce, de la Turquie, du Liban, d'Israël, ... et même de Gaza - la société américaine Noble Energy, dont Bill Clinton est un des dirigeants, a acquis des droits grecs et turcs, et exploite avec Israël la partie qui revient à cette dernière), vont tirer les prix à la baisse, si les Etats-Unis ne font rien.
La guerre en Syrie présente le double avantage pour les Etats-Unis d'empêcher la Syrie et le Liban de mettre en valeur ces ressources d'hydrocarbures qui leur appartiennent, et de dissuader le Qatar (et la France) de construire le gazoduc qui permettrait d'acheminer de gaz du Golfe d'Ormuz en Europe via la Méditerranée.
La perspective de la fin du conflit syrien est naturellement une source d'inquiétude pour les USA. S'ils acceptent que la paix s'installe au Moyen-Orient, les gaz iranien et qatari finiront par approvisionner massivement l'Europe, ce qui aura pour conséquence de faire baisser le prix de l'énergie, au grand désespoir des Américains, des Russes, (et de l'Arabie Séoudite).
En toute logique, les intérêts pétroliers russo-américains nécessitent, soit que les sanctions contre l'Iran soient maintenues (mais ce qui heurte les intérêts politiques russes au Moyen-Orient), soit que la guerre au Yémen se développe, ce qui aura pour effet de réduire la production séoudite, pour cause d'insécurité.
La quasi déclaration de guerre que l'Arabie Séoudite, forte de son alliance renouvelée avec les USA, a proclamé contre le Qatar, élimine cette dernière solution, au profit de la première.
La solution qui en résulterait serait le statu quo actuel de la guerre en Syrie (j'avais écrit, en 2015, que cette guerre n'était pas faite pour être gagnée, mais pour durer).
Mais ce "gel" de la situation n'est qu'apparent: le rejet du Qatar par les pays d'Arabie le pousse dans la zone d'influence de l'Iran; quant à la Turquie, sa fidélité vis à vis des Américains n'est plus du tout ce qu'elle était il y a seulement trois ans.
La fiabilité américaine s'effrite au Moyen-Orient, et ce ne sont pas les gesticulations de D.Trump qui vont enrayer son déclin.
H. le B.
[source : LP]
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