Article rédigé par Hélène Bodenez*, le 22 octobre 2011
Après le Conseil Constitutionnel, le nouveau Sénat entend s'imposer sur le dossier.
La bataille du dimanche n'est pas éteinte. Le groupe Communiste Républicain Citoyen (CRC) a déposé une proposition de loi au Sénat. Visant à garantir le droit au repos dominical, le texte a été enregistré à la Présidence ce 20 septembre 2011.
La CFTC se félicite que cet "excellent texte" reprenne son argumentaire : Les sénatrices et sénateurs reprennent par exemple, l'amendement CFTC au plan d'action 2011/2014 adopté par le Congrès de la Confédération Européenne des Syndicats, réaffirmant "la nécessité de préserver le dimanche comme journée de repos pour les travailleurs-euses, afin de préserver la vie familiale, personnelle, associative et spirituelle".
La nouvelle majorité sénatoriale se livre à une réécriture de certains articles dont le premier, élargissant le nombre des bénéficiaires du repos dominical appelé à n'être plus seulement donné dans l'intérêt des salariés mais également dans celui de leurs familles et de la société . Dont acte. Mais pourquoi ne pas revenir tout simplement au texte d'avant le 1er mai 2008 supprimé par ordonnance: Le repos dominical doit être donné le dimanche . Réintroduire le verbe doit , ce serait vraiment opposer une fin de non recevoir à la généralisation des dérogations pour n'autoriser que les légitimes exceptions.
Travail du dimanche : principales dates des offensives et des résistances
1979 – Offensive des magasins d'ameublement dans le nord.
1991 – Les socialistes sont à la manœuvre (Michel Rocard Premier Ministre), des magasins comme Ikea et Virgin Megastore font pression pour ouvrir le dimanche. Le publiciste Jacques Séguéla invente alors le fameux refrain des magasins ouverts d'un côté de l'Avenue des Champs-Elysées, fermés de l'autre.
Janvier 2008 – La commission Attali réunie par le Président Sarkozy préconise en ses décisions 136 et 137 de généraliser le travail le dimanche en France. Depuis 2002, échecs de différents projets de loi.
2008 – Nouveau moyen mis en œuvre, la proposition de loi portée par un parlementaire, Richard Mallié (Bouches-du-Rhône, UMP). Objectif ? permettre aux entreprises de déroger à la durée légale du travail , à autoriser ainsi plus largement le travail du dimanche en France .
Fin 2008 – Fronde d'un groupe de parlementaires au-delà des clivages politiques.
Mobilisation générale : la CFTC (Joseph Thouvenel), le CAD (Jean Dionnot – Étienne Neuville), Radio Notre-Dame (Élodie Chapelle, Julien Chavanne, Anne Gavini ... et toute la rédaction), Famille chrétienne (Emmanuel Pellat-Samuel Pruvot), la Vie se mobilisent. Liberté politique (Philippe de Saint-Germain-Hélène Bodenez) entre dans la bataille.
2 décembre 2008 Sondage Ipsos/CFTC/Famille chrétienne /RCF/Radio Notre-Dame
— 84 % des personnes sondées estiment primordial ou important que le dimanche reste le jour privilégié de la vie familiale, associative, culturelle ou religieuse.
— 64 % des salariés ne sont pas d'accord pour travailler régulièrement le dimanche . Ce qui confirme l'avis du Conseil économique et social et du Credoc.
— Les populations urbaines d'Île-de-France : 68,1 % des sondés se déclarent opposés à travailler le dimanche et sont 65,6 % dans l'agglomération de Paris.
Report sine die de la proposition de loi.
Janvier 2009 – Coup de théâtre : la proposition de loi n'est pas enterrée. Nicolas Sarkozy s'obstine, la veut coûte que coûte et amadoue les frondeurs qui en signent une nouvelle version, un compromis. Les ambitions sont certes revues à la baisse. Le principe du repos dominical réaffirmé serait sauf. Écran de fumée.
Les débats peuvent avoir lieu aux deux Chambres et se déroulent alors en procédure accélérée, pendant les grandes vacances, de nuit. Défense du repos dominical au Sénat par André Lardeux qui ose s'élever contre son camp UMP.
Été 2009 – L'Assemblée nationale adopte la loi à une très courte majorité le 15 juillet 2009 (282 voix contre 238) et le Sénat le 22 juillet (165 voix contre 159 voix). Le président Sarkozy signe la Loi 2009-974 le 10 août 2009, (JO du 11 août).
Europe, 19 décembre 2008 – la Directive sur le temps de travail s'est clairement opposée au repos dominical. Le secrétaire général de la Commission des épiscopats de la Communauté européenne (COMECE), le père Piotr Mazurkiewicz, déclare : Le dimanche comme jour de repos hebdomadaire privilégié ne sera pas mentionné dans la future Directive sur le temps de travail, alors même que l'objectif affiché de cette Directive est de permettre la réconciliation entre travail et vie familiale. C'est une incohérence et un acte manqué lorsqu'on sait à quel point les citoyens européens attendent aujourd'hui une Europe sociale qui protège les travailleurs et leurs familles.
Europe, (février – avril 2010) – Déclaration écrite visant à protéger le dimanche comme pilier du système social européen, caduque. De nombreux députés européens ne signent pas. En mars, une conférence internationale autour de la sauvegarde du dimanche réunit plus de 350 personnes au parlement de Bruxelles.
2010 – Les recours judiciaires se multiplient en France. Les inégalités se creusent entre zones et communes touristiques, PUCE. Les absurdités ne sont donc pas réglées. À preuve, les salariés de supérettes toujours en grève.
Le front européen s'organise alors que Paris pense à ses grands magasins Boulevard Haussmann et à un futur hypercentre dérogeant au repos dominical. Guerre entre les tenants de l'ouverture des magasins le dimanche et Bertrand Delanoé qui tient bon.
L'OIT semonce la France. Le travail du dimanche n'est pas travail décent .
2011 – Le repos dominical est malgré tout réaffirmé principe constitutionnel par les Sages de la rue Montpensier. Les employées d'ED/DIA (d‘Albertville (Haute-Savoie) et d'Oyonnax (Ain) ont gagné les unes le droit de ne plus travailler le dimanche, les autres d'être indemnisées pour licenciement abusif).
Lancement de l'European Sunday Alliance dont L'AFSP fait partie.
Photo : © Jg281 / Wikimédia Commons / Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported, 2.5 Generic, 2.0 Generic and 1.0 Generic license.
***