Article rédigé par L'Opinion, le 15 février 2021
Source [L'Opinion] Retrouvez l'interview de Pascal Boniface, le directeur de l’Iris : « On peut imaginer que les géants du digital créent des armées privées en proposant de façon commerciale leur service aux Etats ».
Les géants du numérique bouleversent le système international fondé sur la souveraineté des Etats. Jusqu’où cela peut-il aller ? Pour tenter de le cerner, l’Opinion s’est entretenu avec le directeur de l’Iris (Institut de relations internationales et stratégiques) Pascal Boniface qui vient de publier une Géopolitique de l’intelligence artificielle (Editions Eyrolles, 2021).
Vous avez toujours été sceptique face aux thèses décrivant l’obsolescence de l’Etat dans les relations internationales. Vous semblez pris d’un doute, face à l’émergence des géants du numérique, estimant qu’ils pourraient être « la menace la plus sérieuse n’ayant jamais existé » pour les Etats. Expliquez-nous.
Je n’ai en effet jamais été sensible aux thèses sur l’obsolescence inéluctable des Etats, thèses selon lesquelles ils seraient condamnés à rejoindre le rouet et la hache de pierre au musée de l’histoire du fait de la globalisation. Certes, les Etats n’ont plus, depuis longtemps d’ailleurs, le monopole de l’action internationale, mais ils restent les acteurs pivots de la scène internationale. On a d’ailleurs bien vu avec la crise de la Covid-19 que les thèses sur la fin des territoires ou des frontières étaient pour le moins battues en brèche. C’est vers l’Etat que chacun s’est retourné pour obtenir une aide, une solution, une perspective. Les Etats sont bousculés par la multiplication de nouveaux acteurs internationaux, mais ils restent solidement au gouvernail du navire planétaire.
Mais en effet, les Gafam – ou plus largement les entreprises digitales – représentent une menace pour la pérennité des Etats plus conséquente que celles auxquelles ils ont été confrontés dans le passé. En termes de population, de puissance économique, de services quotidiens rendus, et même de fonctions régaliennes, ces géants sont en train d’empiéter sur le domaine des Etats.
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