Article rédigé par , le 05 avril 2017
[Source : Nouvelles de France]
L’effondrement du bloc soviétique après la chute de la plupart des dictatures militaires dans le camp occidental en Europe, en Asie et en Amérique Latine avait paru donner raison à Francis Fukuyama et à la fin de l’Histoire qu’il prophétisait sous la forme d’une victoire de la démocratie et du libéralisme promis à être les versants politique et économique d’un monde unipolaire.
Vingt-sept ans après, le mirage s’est dissipé. L’illusion a laissé place à un monde composite et dangereux. Des adversaires de la pensée unique, de la démocratie mondialisée et des Etats-Unis perçus comme le moteur de ce mouvement historique se sont dressés. Mais, plus profondément encore, c’est la bonne conscience démocratique qui s’est fissurée. Le « monde libre » en voulant exporter son modèle n’a-t-il pas surtout étendu son impérialisme et répandu la guerre ? N’a-t-il pas confondu les ingérences salvatrices avec les intrusions dominatrices ? N’a-t-il pas noué d’étranges alliances avec des régimes et une pensée aux antipodes de ses valeurs proclamées mais conformes à ses intérêts économiques les plus dénués de considération éthique ? Dans les grandes démocraties occidentales, la lutte entre les oligarchies de plus en plus arrogantes et les populismes méprisés n’a-t-elle déchiré le voile d’un système toujours plus hypocrite ?
La Syrie est sans doute le pays qui aura le mieux révélé ce retournement du prétendu sens de l’Histoire. Dernier domino des dictatures militaires nationalistes arabes à tomber, elle devait achever la libération du Moyen-Orient comme la Roumanie avait apparemment réalisé celle de l’Europe communiste. C’était en 2011. En 2017, de passage en Turquie, le nouveau Secrétaire d’Etat américain, Rex Tillerson, nommé par Donald Trump, vient de mettre un terme à la chevauchée « démocratique ». Désormais, la priorité de Washington n’est plus de faire tomber Bachar Al-Assad, mais d’écraser le djihadisme et de laisser aux Syriens eux-mêmes le soin de déterminer leur avenir. Ce message de bon sens repose sur plusieurs constats et constitue un salutaire examen de conscience. Le premier constat consiste à reconnaître l’échec du « printemps arabe » salué et soutenu par Obama d’une main d’autant plus molle que le verbe était incantatoire. Les dictatures ont laissé la place à l’islamisme, à l’anarchie, à la guerre ou sont revenues. Deuxième constat : les alliances nouées depuis l’Afghanistan avec les islamistes contre les soviétiques sont devenues un danger mortel pour le monde libre. Elles ont développé le terrorisme sur son sol et souligné ses contradictions internes en matière de libertés et de droits. Elles ont affaibli les démocraties. Troisième constat : face à l’uniformisation du monde, des résistances identitaires se sont levées. C’est la Chine, c’est l’Inde, immenses, ce sont les pays latino-américains, si loin de Dieu et si près des Etats-Unis, comme disait Porfirio Diaz de son Mexique. C’est l’Iran chiite, la Turquie sunnite. C’est surtout la Russie, qui au lendemain de la chute du communisme était prête à rejoindre le grand mouvement, et qui de mauvais coup en humiliation, a retrouvé son rôle d’adversaire. Grâce au Président Poutine, cet adversaire, relevé, réarmé, solidement appuyé sur son patriotisme et l’affirmation de son identité politique et culturelle, a tenu tête, en Crimée, dans le Donbass, et surtout en Syrie où seul intervenant à la demande du gouvernement légal, conformément au droit international, il est parvenu à imposer son point de vue à l’Amérique et à ses alliés. L’Etat islamique va être détruit. Les rebelles divisés entre prétendus démocrates et islamistes, dépourvus du soutien occidental, vont reculer. Il est probable que dans un premier temps, une solution fédérale tenant compte de la répartition des forces sera mise en oeuvre, en dépit de la volonté de Damas, à court de moyens, et au grand dam de la Turquie, ulcérée par la montée en puissance des Kurdes à ses frontières.
Les Etats-Unis d’Amérique sont une démocratie. Ils ont pour Président un milliardaire populiste élu par une minorité patriote et conservatrice dans une majorité d’Etats contre la candidate de l’oligarchie soutenue par la plupart des médias. Cet événement a ébranlé la domination du politiquement correct et de la pensée unique, ce doux asservissement des peuples au mondialisme c’est-à-dire aux intérêts d’une caste qui par-delà les identités, qu’elle croit surannées, affirme l’idéologie de ses intérêts et son mépris des nations. Donald Trump semble avoir pris conscience du fossé grandissant entre ceux qui ressentent le plus douloureusement les effets de la mondialisation et ceux qui surfent sur le chaos qu’elle entraîne. L’Amérique de Trump n’est plus le champion de la démocratie abstraite et universelle dont les privilégiés sont seuls à vérifier l’existence. Elle fixe pour priorité de protéger avant tout les Américains. La France va voter dans quelques semaines. L’oligarchie antinationale fait feu de tout bois pour assurer la victoire de son champion, un ectoplasme politique, une créature des médias. Le vieux peuple français, la vieille démocratie française vont-ils se laisser piéger par la manoeuvre ? C’en serait fini de l’illusion démocratique !