Article rédigé par Thomas Flichy de La Neuville, le 09 novembre 2015
Les grandes migrations du début du troisième millénaire sont-elles le signe de l’effondrement de notre civilisation où à l’inverse vont-elles lui permettre un rebond salvateur ?
Les grandes migrations se présentent comme le défi principal auquel sont confrontées les civilisations sédentaires. En effet, la vie est mouvement et la force politique élémentaire d’un peuple consiste en sa mobilité. Qui plus est, l’arrivée dans un pays neuf se présente comme un stimulant extraordinaire pour les migrants.
Dans ces circonstances, comment expliquer que l’Empire romain se soit effondré sous le choc d’une vague relativement faible de réfugiés germaniques et qu’à l’inverse l’Europe Occidentale soit parvenue à bénéficier des invasions plus agressives des Vikings afin de se fortifier ?
Le rôle des élites
Dans ces deux cas, l’attitude des élites a été déterminante. Celles-ci ont dû toutefois composer avec le degré de vitalité de la civilisation qu’elles étaient chargées de perpétuer.
Au cours des deux derniers millénaires, l’Europe a connu deux vagues majeures de migrations : celles qui frappèrent l’Empire romain finissant et celles qui s’attaquèrent à l’empire carolingien au IXe siècle. Puis, pendant un millénaire, une respiration suspendue : les flux de migrants vers l’Europe furent dérisoires.
Malgré tous les efforts consentis par les faussaires de l’histoire du peuplement afin de présenter les États européens comme des agrégats informes d’immigrants, ce récit trompeur n’a pu convaincre que des hommes dépourvus de culture ou de raison.
Depuis plusieurs décennies, les signaux faibles se conjuguent pour nous signifier que nous entrons dans une époque nouvelle. Celle-ci est marquée à l’évidence par une troisième grande vague de migrations. Dès lors, la question qui se pose est simple : les grandes migrations du début du troisième millénaire sont-elles le signe de l’effondrement de notre civilisation où à l’inverse vont elles lui permettre un rebond salvateur ?
Un double déni
À cette question fondamentale fait écho un silence assourdissant. La question des migrations se heurte en effet à un double déni. Le premier provient des élites mortes, trop pusillanimes pour se préoccuper de la perpétuation d’une civilisation qu’elles ont trahie depuis longtemps.
Celles-ci emploient toutes les ressources de la sophistique pour prétendre que les migrants et les peuples auprès desquels ils s’installent sont tout un : des individus prétendument déliés de toute attache culturelle, et simplement connectés à leur propre nombril ou à leur carte bleue.
Le second déni provient de ceux qui ont voulu oublier que les migrants ne venaient pas tout à fait par hasard. S’ils provoquent parfois l’effroi, c’est que chacune de leurs vies ne rappelle aux Européens rien d’autre que les fantômes des enfants qu’ils auraient souhaités avoir et qui se dressent, une fois faits hommes devant eux, avec un visage tout autre qu’ils ne l’auraient imaginé.
L'alternative
Mais il existe une alternative à l’aveuglement où à la terreur : celle du courage et de la raison. La troisième grande migration se présente comme un défi majeur. Si ce dernier est relevé avec justesse par les élites vivantes, alors notre civilisation déclinante pourrait connaître un véritable été de la Saint-Martin.
Thomas Flichy de La Neuville, Université de Paris IV – Sorbonne.
Photo : St-Martin de Tours
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