Article rédigé par François de Lens, le 06 mars 2015
Lors du diner du Conseil représentatif des institutions juives de France, François Hollande a utilisé l’expression « Français de souche ». Pour désigner, avec condescendance, une appartenance suspecte. Une bonne raison pour se pencher sur les sous-entendus de l’expression et mieux comprendre la détestation qu’elle induit.
Avant de commencer ce propos, il faut rappeler que le Président de la République n’a employé la formule que pour tenter de faire oublier que la quasi-totalité des agressions antisémites sont faites par de jeunes musulmans. Et de charger M. Dupont de tous les maux.
Dans ce même esprit, l’Obs nous explique que seuls 1% des terroristes en France sont islamistes. En précisant tout de même que ce chiffre est basé sur la période 1792-2013. Du grand journalisme ! Le problème dans notre société n’est peut-être finalement pas celui du voile islamique, mais celui dont nos « élites » politico-médiatiques se couvrent la face, toute honte bue.
Une expression controversée
« Français de souche » est une expression qui date du XIXe siècle. Elle a servi en Algérie française pour différencier les Français d’origine européenne, de ceux de souche nord-africaine. Elle est revenue au goût du jour dans les années 1990, et fait depuis régulièrement polémique. On lui reproche son côté peu scientifique, mais surtout d’être « stigmatisante ».
Qu’est-ce qu’une souche ? Il s’agit de la partie de l’arbre d’où partent les racines, qui ancrent le végétal dans le sol. C’est aussi la partie du tronc qui reste attachée au sol quand la cime de l’arbre a été coupée. La souche a donc des racines, elle est attachée à une terre. Enracinée et patriote, la souche est une abominable réactionnaire ! L’expression prend alors une sève nouvelle.
La souche et ses racines
Le Français de souche est donc celui qui a des racines. Celles de la France sont chrétiennes. Le premier sous-entendu de cette expression ne fait que nous rappeler cette évidence. La France est cette mosaïque où les humbles calvaires côtoient sans rougir les plus imposantes cathédrales. Où chaque village (certains portent parfois le nom de quelque saint) a usé de sa peine pour construire SA chapelle. Faut-il aussi rappeler que la France est la fille aînée de l’Église ? Par la filiation, par son être, par son histoire, par son essence même, la France est chrétienne, catholique, plus précisément. Ce sont ses racines.
Saint Jean-Paul II l’avait rappelé en 2003 : « Les racines chrétiennes sont pour l’Europe la principale garantie de son avenir. Un arbre sans racines pourrait-il vivre et se développer ? » L’Européen — et le Français en particulier — ne peut pas vivre sans ses racines, et ses racines sont chrétiennes. Être Français, c’est se recevoir d’une histoire, d’un héritage : ses racines, donc. Se savoir une origine, d’où l’on vient. On ne peut pas l’être autrement.
La souche, symbole de l’attachement à la terre
Le Français de souche est celui qui est attaché à sa terre. Arracher la souche à la terre, c’est non seulement la tuer, mais c’est aussi affaiblir la terre. Une terre sans arbres ne respire pas.
Le Français de souche est patriote. Il est fils d’une terre, d’une histoire, d’une filiation qui l’a enfanté. Ce n’est pas qu’il déteste les étrangers et leur culture. Il n’a pas spécialement d’antipathie pour l’étranger. Ce n’est pas un nationaliste agressif qui voudrait imposer son modèle aux autres. Il préfère simplement sa patrie à celle des autres. Parce qu’elle est sienne, tout simplement. C’est celle qu’il a reçue en héritage, et il s’y est fait, non sans une certaine fierté. Il est attaché à cette terre charnelle chantée par les poètes, comme Péguy :
« Que Dieu mette avec eux dans la juste balance
Que Dieu mette avec eux dans le juste plateau |
Certains appellent cela l’esprit cocardier, gaulois, franchouillard, chauvin, de clocher. Comme si s’aimer soi-même serait détester l’autre, quand il s’agit de s’accepter pour se donner. Et les contempteurs de la patrie ne se privent pas de conchier quiconque pourrait manifester son amour de la patrie, ou même agiter un drapeau. Que celui-ci soit tricolore ou fleurdelisé, soit dit en passant. D’autres préfèrent se taire, et agissent, discrètement. Un peu comme on nourrit un vieil aïeul devenu incapable, sans tenir compte des bruits du monde qui voudraient laisser crever cette bouche inutile.
Quand l’ordre naturel s’impose à la souche
La souche puise par ses racines son nécessaire pour vivre au quotidien. Certains arbres grandissent sur des terres grasses et fertiles, d’autres se développent sur des sols arides. Mais l’arbre ne choisit pas où il prend racine, il naît là où il est. Il hérite d’un lieu qui a toujours été. Et il fait avec.
Le Français de souche – mais tout homme est « de souche » – est lui aussi héritier de l’immuable. En langage nauséabond, rance et réactionnaire, ces choses immuables s’appellent « l’ordre naturel » : son environnement, sa famille, son corps, son sexe.
Dans le même sens, l’enracinement naturel de l’homme est aussi culturel, au sens où la nation, communauté de culture, est reçue. Animal politique, animal culturel, animal patriote. « La culture, disait Jean Paul II, est ce qui en l’homme fait l’humain. » Comme le dit Xavier Couture sur RTL : « Ce n’est pas la racine individuelle qui compte, c’est l’adoption des coutumes du pays. » Autrement dit, la culture façonne aussi l’individu, ou plutôt se dépose sur lui comme la rosée du matin.
Faire souche, et devenir français
L’expression « faire souche » est très évocatrice elle aussi. Faire souche veut dire s’installer — s’enraciner — dans un pays, une région, et devenir un habitant parmi les autres. Le Français de souche, c’est aussi celui qui fait souche, c'est-à-dire qui, venu d’ailleurs, choisit de s’attacher à un lieu.
Ainsi, certains Français ne le sont de papier que depuis peu, mais ont fait souche, c'est-à-dire qu’ils se sont liés à la France, à sa culture, à ses mœurs, à sa manière de vivre. Parfois, ils ont même versé leur sang pour le pays d’accueil, sans être un « national ». Le meilleur exemple de ces Français ayant fait souche sont les hommes de la Légion étrangère. Français « non par le sang reçu mais par le sang versé [1] ».
Le fait d’être Français de souche n’est pas mesurable. L’ancienneté ne fait pas l’appartenance. Il se mesure aussi à l’amour que l’on porte à son pays. À tout ce qu’on est prêt à faire pour lui, à lui donner. Il se mesure à la manière dont on a adopté sa culture. Entre le Français de vieille famille vautré devant une série américaine tout en lorgnant son smartphone en attendant que la pizza soit livrée, et le légionnaire qui pleure lorsque l’on chante la Marseillaise, il y a fort à parier que s’ils étaient des arbres, le premier serait un arbrisseau hors-sol, condamné à être coupé puis vendu, alors que le second serait un arbre vivace donnant de beaux fruits.
Cette souche crispante
Après réflexion, on comprend mieux pourquoi l’expression produit une crispation dans nos élites politico-médiatiques. Pensez donc ! Un homme enraciné, aimant son pays et peinant pour lui, amoureux de sa culture et respectueux de l’ordre naturel ! Un homme bien différent des décérébrés gavés de Mac Donald, ne sachant pas distinguer Rimbaud de Booba. Justes bons à s’abrutir de télévision, à consommer jusqu’à l’overdose, et à voter de façon autorisée, comme la masse.
Bref, le Français de souche est simplement celui que l’on veut éradiquer, pour le remplacer par un individu consommateur et consommable, une simple pièce dans le processus de production. Un homme hors sol, sans moyens pour se défendre lui-même. Et encore moins défendre le bien commun.
Le combat incessant contre l’expression « Français de souche » est plus qu’une simple question sémantique. C’est un levier comme tant d’autres, utilisé pour « changer de civilisation » par ceux qui désirent que nous allions vers le « meilleur des mondes ». Celui où nous n’aurons plus vraiment notre mot à dire…
Fr. de L.
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[1] "Qui sait si l'inconnu qui dort sous l'arche immense
Mêlant sa gloire épique aux orgueils du passé
N'est pas cet étranger devenu fils de France
Non par le sang reçu mais par le sang versé."
Quatrain tiré du poème "Le volontaire étranger", Pascal Bonetti, 1920.
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