Le titre est honorifique, dit-on. S'il s'agit bien plutôt de symbolique, il possède un sens qui dépasse les contingences du temps. Le christianisme est apparu en Gaule avec les martyrs de Lyon, saint Pothin et sainte Blandine, et le souvenir de saint Irénée s'impose à nous comme la figure même des origines chrétiennes, que révèrent également Orient et Occident.

C'est pourquoi, cette église implantée entre Saône et Rhône nous est particulièrement vénérable.

Elle n'a cessé depuis le IIe siècle d'être fidèle à sa vocation sanglante, en suscitant de nouvelles initiatives apostoliques. L'époque la plus récente a été particulièrement féconde, à tous points de vue. Qu'on l'on songe à un Frédéric Ozanam, une Pauline Jaricot, un Antoine Chevrier, un Joseph Folliet, deux jésuites de Fourvière, à un abbé Couturier.

Volontiers, nous saluons aussi la mémoire des trois derniers archevêques qui ont résidé sur la colline de Fourvière, les cardinaux Decourtray, Balland et Billé. Ils furent tous trois de bons et fidèles serviteurs de l'Évangile. Et les voilà accompagnés d'un jeune successeur, dont le passage à Moulins aura préparé la nomination à ce siège prestigieux.

Mgr Philippe Barbarin s'est dit surpris de cette décision du Saint-Père. Mais de ce genre de surprise, nous serions, quant à nous plutôt friands, persuadés que la promotion de l'évêque de Moulins correspond à un dessin bienveillant de la Providence. Il nous a, en effet, été donné d'apprécier très tôt le père Philippe Barbarin sur ses champs d'apostolat. Nous l'avons vu à l'œuvre auprès des jeunes du Val-de-Marne, suscitant leur générosité, leur apportant une solide formation biblique et doctrinale.

Partout où il est passé, le nouvel archevêque a démontré la forme singulière du témoignage de l'Evangile, montrant que l'Esprit en toutes circonstances pouvait faire des choses nouvelles. Son séjour de quatre années à Madagascar a contribué à renforcer son amour de l'Eglise universelle.

S'il l'on voulait bien nous permettre une confidence, nous invoquerions le témoignage du cardinal de Lubac qui avait connu Philippe Barbarin, séminariste et qui, il y a une vingtaine d'années, nous confiait qu'il le considérait, au plus tôt, destiné à l'épiscopat. Le grand théologien ne songeait probablement pas encore au siège de Pothin et d'Irénée, mais on imagine son émotion s'il avait pu entrevoir une telle conjonction. C'est dire que crédité d'un tel patronage – auquel s'ajoute celui du cardinal Urs von Balthasar dont il était également très proche – le nouvel archevêque de Lyon peut accepter avec confiance cette lourde charge dont il est investi.

Nous prierons avec ferveur pour son apostolat, le clergé et les fidèles de son diocèse. Nous ressentons comme un signe la prise de responsabilité d'une nouvelle génération, consciente de son héritage, mais aussi avertie des exigences de l'évangélisation d'un monde qui devrait redécouvrir la beauté du message que les premiers témoins vinrent révéler pour qu'il soit transmis jusqu'à l'aube de notre troisième millénaire.

Gérard Leclerc est éditorialiste à l'hebdomadaire France Catholique. Dernier livre paru : Les Dossiers brûlants de l'Eglise au soir de la vie de Jean-Paul II, Presse de la Renaissance.