Paris, le 17 juin 2005 - Monsieur le ministre,

l'une des épreuves du Bac de 1ère, série L, sur la contraception, comportait notamment une question où les candidats étaient tenus de "dégager des arguments en faveur de l'autorisation de l'IVG légale en France".

Or, la formulation unilatérale de la question a doublement porté préjudice aux candidats.

D'abord, la liberté de conscience des candidats a été forcée.

- Il y a eu rupture de l'égalité entre les candidats qui n'ont pas eu la liberté de choisir entre plusieurs sujets susceptibles d'être traités. Il est évident que la justification de l'avortement est un sujet irrecevable pour beaucoup de consciences, en dehors de toute conviction religieuse. Imagine-t-on qu'on puisse choisir de justifier la torture ou la peine de mort sans implication personnelle ? Même s'il est aujourd'hui dépénalisé en France, l'avortement reste par définition un acte homicide, ce que ne conteste pas la loi Veil.

- Le sujet n'a pas été présenté de manière neutre. Le parti a été pris de considérer l'avortement comme un bien - indiscutablement - à "favoriser". La moindre des choses – dans une société libérale - eût été de permettre aux élèves de pouvoir apporter des nuances, voire des critiques, comme ils sont systématiquement invités à le faire par ailleurs dans toutes les autres disciplines.

Un grand nombre de candidats ont donc été contraints soit de ne pas répondre à cette question, au risque de rater l'épreuve, soit de ne pas choisir et de se rabattre sur l'unique sujet restant, soit – ce qui est finalement le plus grave - de passer outre leur conscience et de fournir la réponse attendue.

Ensuite, l'intelligence des candidats a été abusée.

- Le sujet à traiter était accompagné de documents qui présentaient des contrevérités. Ainsi, un article du journal Le Monde fournissait cette citation : "[...] contrairement à ce qu'affirmaient les opposants à l'avortement lors de l'adoption de la loi, la légalisation de l'IVG n'a pas eu d'impact démographique. Une IVG ne constitue pas une naissance en moins mais une naissance reportée à plus tard dans un contexte plus favorable [...]". Autrement dit l'épreuve du Bac a consisté à faire défendre une thèse discutable avec des arguments erronés.

- Enfin, le corrigé (accessible sur le site www.lemonde.fr) lui aussi témoigne d'indigence scientifique... Quand il cite le stérilet comme un moyen contraceptif alors qu'il est un abortif... Quand il présente la maternité choisie comme un apport de l'IVG, alors que les femmes disent qu'elles n'ont pas le choix... Quand il évoque la parentalité conjointe alors que la femme décide seule d'avorter ou qu'il cite l'absence d'incidence de l'avortement sur la fécondité contre l'évidence même...

C'est ainsi que de nombreux principes – liberté de conscience, égalité, neutralité, pertinence des sujets, justesse des corrigés, etc. – ont été transgressés, plaçant des millions de jeunes en situation de se plaindre d'injustice.

Pour que notre pays n'enregistre pas un précédent fâcheux – car il s'agit d'un sujet grave - il serait hautement souhaitable que des instructions soient données afin que les questions 3 et 4 de l'épreuve ne soient pas notées.

A défaut de prendre ces mesures de bon sens, et compte tenu du nombre de réactions de parents et de candidats eux-mêmes dont nous avons eu connaissance, il n'est pas exclu que l'épreuve fasse l'objet de recours en annulation.

Veuillez croire, Monsieur le ministre, à l'assurance de notre haute considération.

Jean-Marie Le Méné, président de la Fondation Jérôme-Lejeune

Francis Jubert, président de l'association pour la Fondation de service politique

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