La résurrection des syndicats est un théâtre de grands boulevards

Source [Novopress] : Cette fois, ce sont les agriculteurs qui débarquent ce mercredi à Paris. Ils entendent protester contre l’inflation des normes phytosanitaires imposées sous la pression des écologistes, notamment aux producteurs de betteraves sucrières qui supportent des importations déloyales.

Ce « monde du travail » des champs n’est pas moins respectable que celui des villes qui emplit les médias. L’apparente résurrection de la CGT, de la CFDT ou de Sud dans les manifestations « du peuple » masque l’absence d’une partie des classes populaires. Celles-ci se tiennent à l’écart de ces antiques processions conservatrices.

Cette France d’en bas, rappelle le géographe Christophe Guillhuy (1), « ne demande pas la charité, mais un travail correctement rémunéré et encadré par le droit qui lui offre une sécurité ». Le rejet du travail supplémentaire, clef de voute des mouvements qui mobilisent prioritairement la fonction publique et les salariés des grandes entreprises privées, n’est pas une obsession partagée par tous. Le « droit à la paresse », revendiqué par Sandrine Rousseau (EELV) en même temps que l’assistanat, est un idéal citadin qui n’est pas celui de la France rurale et travailleuse. Celle-ci est largement plus préoccupée par son effacement politique, l’inflation qui vient, voire la guerre qui se précise. Les agriculteurs mécontents révèlent une partie de cet autre monde oublié. Ils font partie de cette France modeste qui porte un idéal qui dépasse les seules revendications matérialistes ou consuméristes.

A Paris, les défilés de mardi ont rassemblé 57.000 manifestants, dans un rituel syndical immuable depuis des décennies. Reste que ce théâtre de grands boulevards s’essouffle. La CGT menace d’ailleurs de « monter d’un cran » et de radicaliser les oppositions. Les députés de la Nupes ont déjà pris de l’avance en semant à l’Assemblée un désordre qui contraste avec la bonne tenue de la rue. En réalité, la capitale n’est plus le lieu où se lançaient jadis les grands mouvements de protestation, voire les révolutions. Déjà il y a quatre ans, les Parisiens s’étaient gardés de rejoindre les Gilets jaunes débarqués des provinces pour tenter de réveiller le monde d’en haut. 10.000 « foulards rouges », bourgeois de Paris affolés par la plèbe, avaient même défilé aux cris pavloviens de : « Le fascisme ne passera pas ! » (voir mon blog du 28 janvier 2019). En fait, les plus modestes ont été chassés des grandes métropoles, et de la capitale tout particulièrement, devenue financièrement inabordable. Comme le remarquait Pierre Vermeren dans Le Figaro du 1er février, « cette situation a contribué à la disparition du peuple de Paris au tournant du XXI e siècle, un des plus grands phénomènes sociologiques de notre temps. Avec lui, la gouaille, l’humour et l’impertinence ont quitté les rues de la capitale ». L’OPA des syndicats sur le peuple ne doit pas faire illusion.

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