La rentrée approche… nous voyons bien sûr l’horizon considérablement obscurci par les restrictions politico-sanitaires, mais elles ne sont pas les seuls maux dont nous avons à souffrir. En effet, pour les enfants et les parents de France, la liberté d’enseignement n’a jamais été en aussi mauvaise posture.

Dans une indifférence générale, en dehors des milieux qui se tiennent sur le qui-vive sur ces questions, la loi sur le « séparatisme », destinée à « conforter les principes de la République » a été votée le 24 août, et met fin à la liberté d’enseignement en famille, jusque-là (pensait-on) garantie constitutionnellement.

Dans le contexte général de restriction des libertés que nous vivons, cette mesure, qui vient considérablement alourdir la barque, est tout sauf anodine. La pression générale qu’exerce le gouvernement sur la société tout entière à la faveur de la campagne vaccinale et de l’imposition du passe sanitaire s’étend aussi à nos enfants. Déjà, les mineurs sont concernés de 12 à 17 ans. Si la France s’engage sur la voie tracée par Israël, les plus jeunes suivront, avec une propagande savamment déployée dans les établissements scolaires. Mais il n’y a plus d’alternative possible car l’Etat en a décidé ainsi : pas d’instruction possible en dehors de lui, en dehors de l’école dite républicaine. Les horizons sont bouchés.

Mettant fin à une tradition remontant à Jules Ferry, pourtant le chantre de ladite école républicaine, le gouvernement d’Emmanuel Macron a décidé d’exécuter en direct l’instruction en famille. Cela n’émeut guère les foules. Chaque année, 70 000 parents choisissent de faire l’école à la maison. Ce ne sont pas tous de la graine de djihadistes. Trop d’élus, y compris de droite, se sont tus sur ce dossier, un peu trop enclins à enfourcher le cheval de la lutte contre l’islamisme qui justifierait toutes les mesures, de même que les angoissés de la pandémie applaudissent des deux mains au passe sanitaire sans affronter lucidement ses dérives. Une fois de plus, il ne s’agit pas d’un problème d’adaptation aux circonstances, d’une exception nécessaire face à un mal plus grand, mais d’une question de principe. Comme le rappelle fort justement Lionel Devic, ancien président de la Fondation pour l’école, dans une tribune pour Aleteia : l’intérêt supérieur de l’enfant, au nom duquel le gouvernement a plaidé cette restriction, est que les parents soient justement reconnus dans leur dignité de premiers éducateurs de leurs enfants. Cette vérité éternelle, qui devrait être sacrée, a été piétinée par le législateur, qui bafoue, les uns après les autres, tous les principes supérieurs qui donnent un sens ultime et sa dignité à notre société.

Mais le combat n’est pas fini. Il faut le rappeler à ceux qui estiment que la partie est perdue : pour l’instant, il est encore possible de faire l’école à la maison à la rentrée 2021. La loi ne va s’appliquer qu’à partir de la rentrée 2022, n’en déplaisent à certaines académies qui font déjà du zèle, à l’image de Créteil, qui a déjà mis en ligne des formulaires d’autorisation qui pour l’instant ne sont pas applicables. D’ici la rentrée 2022, il y a une échéance intermédiaire de taille : l’élection présidentielle, qui peut rebattre les cartes. Il ne s’agit donc pas de baisser les bras. Là aussi, l’heure est à l’organisation.

L’Etat, qui faillit sur un nombre toujours plus important de ses missions, ne cesse d’en élargir outrageusement le champ, notamment au motif qu’il faut répondre à de l’exceptionnel. Mais si toute la politique consiste à louvoyer cyniquement au gré d’ajustements de modalités à géométrie variable, temporaires et exceptionnels, il n’y a plus de véritable liberté possible, car cette dernière est garantie par quelques principes intangibles. Aujourd’hui, la règle semble être de croire que l’on peut faire dire tout ce que l’on veut au droit, et ce travers se renforce dans toutes les directions. Nous sommes dans une ère du prétexte, de l’occasion saisie par le politique pour faire le mal, pour pousser des pions le plus loin possible et créer de l’irrémédiable.

De ce fait, nous entrons, progressivement mais sûrement, dans une ère où la dissidence doit faire partir intégrale de nos modes de pensée, de nos réflexes pratiques, sociaux et politiques. Il nous faut préparer, tant que cela est encore possible, les lieux d’exercice de notre résistance : maintenir l’instruction en famille tant qu’elle est encore possible dans les faits, préparer l’avenir, éduquer la conscience de nos enfants. Voilà notre liste de tâches pour la rentrée des classes !

Constance Prazel