Populations humaines et environnement : de la sidération à l’espérance

L’obsession écologique a pris pour principal ennemi la croissance démographique. Le salut de la planète doit-il se faire au détriment de la reproduction de l’espèce humaine ?

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             Au dernier trimestre de chaque année, tombent des dates savamment calculées. Il y a le seuil fatidique de novembre à partir duquel les femmes sont censées travailler gratuitement. Cette date  rendrait compte des inégalités salariales[i]. Une autre date tombe sur nos consciences, entre août et septembre. C’est le « jour du dépassement » : à partir de ce jour, l’humanité « vit à crédit » consommant des ressources naturelles que la planète est incapable de produire en une seule année. Cette date arrive de plus en plus tôt. Il y a quelques années, certains « experts » sonnaient aussi le compte à rebours de la fin des temps. Si le glas de l’apocalypse sonnait aux douze coups, alors il était, on s’en doutera, minuit moins une.

            Chaque fin d’année égraine ainsi les minutes de notre culpabilisation collective. Extinctions des espèces, épuisement des ressources, réchauffement, sexisme, oppression patriarcale, racisme, xénophobie. Le point commun à toutes ces calamités ? Notre explosion démographique.

            Éric-Emmanuel Schmitt, dans le premier tome de La Traversée du temps, vient d’accomplir le prodige d’agréger le déclinisme économique, démographique, et l’idéologie inclusive à une posture archéologique. Le paradis perdu (tome I) correspondrait à cet âge béni où nous étions chasseurs cueilleurs : pas de frontière, ni de territoire, tous nomades et donc forcément, tous tolérants, comme les bobos du quartier Bastille. À cette époque, régnait une égalité entre hommes et femmes. Les femmes avaient peu d’enfants et elles étaient libres, au contraire de la période suivante, enfer de la sédentarisation. Certaines thèses féministes vont jusqu’à supposer que la moindre masse musculaire des femmes serait due au fait qu’elles ont été privées de viande par le patriarcat – thèse qui, curieusement pour de la « science », oublie le facteur génétique XY. Les taureaux et les lions imposent aussi l’injuste patriarcat... Dans le paradis perdu fantasmé par Schmitt, les hommes étaient moins nombreux, plus égaux, et sans doute – pourquoi pas, ils ne viendront pas nous dire le contraire – plus libres dans leurs mœurs et leurs croyances. Noam et les siens bénéficiaient d’une nature généreuse : « ils avaient beaucoup de temps pour la jouissance, pour la rêverie ». Tout est lié. Noam ne se pensait pas distinct de la nature : peu importe à Schmitt que les hommes aient enterré les leurs en les distinguant des bêtes. On réinterprète le chamanisme comme un antispécisme et Éric-Emmanuel Schmitt projette sur le néolithique la « légèreté » de Diderot et son hédonisme matérialiste. Revoici le mythe rousseauiste du bon sauvage. De l’autre côté de cette histoire, notre humanité est devenue à la fois plus nombreuse et plus injuste, destructrice, violente et inégalitaire. Au XXIe « l’homme n’a plus besoin de Dieu pour détruire la nature ». Pour la première fois de sa vie longue de 8 000 ans, en pénétrant « l’anthropocène », « Noam a peur ». Nos contemporains confondent allègement les conséquences dramatiques de la modernité née des Lumières et de Descartes avec les sociétés traditionnelles, et notamment chrétiennes, que cette modernité avait haïes et détruites.

            En un siècle l’humanité est passée de 1,7 milliards et 7,7 milliards. L’ONU table sur 10 milliards à la fin du siècle. Tout découle de là. La surpopulation tue Gaïa. Ce sera elle ou nous. Évident, non ? Chaque être humain en plus – en trop, faudrait-il dire ! c’est un consommateur de plus, entendez, un pollueur, un émetteur de CO2. Un destructeur. Surtout s’il mange de la viande, ou, pire de tout, s’il prétend avoir des enfants. Il y a deux ans l’ONU faisait savoir que, pour réduire notre empreinte carbone, le plus efficace était, de très loin, « avoir un enfant de moins ».

[i]Cet écart est très précisément évalué à une hauteur qui va de 6 % pour certains économistes à 25 voire 30 %.

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