La France sous pilule, origine et perspective du mal démographique

L’auteur nous invite à un stimulant changement de perspective : la crise démographique dont souffre la France ne repose pas d’abord et exclusivement sur les questions d’immigration ou de politique familiale ; elle s’enracine dans un mal beaucoup plus profond, une mentalité contraceptive qui est devenue la norme et qui pervertit la notion même de transmission de la vie et la survie même de notre société.

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La pilule contraceptive

La contraception orale se présente sous la forme de comprimés à prise quotidienne communément appelés « pilules contraceptives », ou plus simplement « pilule ». Il existe deux types de pilules contraceptives, la pilule combinée, qui contient de l'œstrogène et de la progestérone, et la pilule progestative, qui ne contient que le progestatif.

Au début des années 2020, environ 60 % des femmes françaises âgées de 20 à 44 ans utilisent cette forme de contraception. Cette place prédominante occupée en France par la contraception orale n’a pas d’équivalent à l'étranger, le stérilet étant le premier choix contraceptif au niveau mondial et notamment en Chine.

La pilule agit à différents niveaux.  Elle cherche à bloquer l’ovulation en trompant les mécanismes de retro-contrôles exercés par le cerveau entre les hormones de l’axe hypothalamo-hypophysaire FSH, LH et les hormones des organes cibles, l’œstrogène et la progestérone.

Elle épaissit la glaire cervicale sécrétée par le col de l'utérus, rendant très difficile le passage des spermatozoïdes.

Elle empêche le développement du tissu endométrial, rendant la muqueuse utérine atrophiée impropre à la nidation.

Elle diminue le péristaltisme des trompes utérines, retardant l’arrivée de l’enfant embryonnaire éventuel dans l’utérus.

Enfin elle perturbe chez la jeune fille le fonctionnement du cycle menstruel et le développement de ses cryptes cervicales, favorisant une hypofertilité en raison de la mauvaise qualité de glaire qu’elle produira même si les cycles sont ovulatoires.

La progestérone épaissit le mucus cervical et forme une certaine barrière à l'ascension des spermatozoïdes. A côté du frein à l'ovulation certains auteurs considèrent cet effet comme « l'effet contraceptif principal »" (Lauritzen[1], 1989).

Mais les expériences de Chang et Hunt[2] avec des lapins parlent contre un tel « deuxième effet principal ». Les autopsies ont montré qu’on trouvait chez les lapins traités avec des hormones gestagènes artificiels - des progestatifs comme le norgestrel ou le norethynodrel - des milliers de spermatozoïdes dans les trompes chez les femelles traitées. Ceci prouve que – au moins lors des essais avec animaux - le mucus cervical épaissi ne représente pas de barrière absolue.

Et le professeur Rudolph Ehmann de rappeler : « D'autre part, dans ces réflexions il n'a pas été pris en considération que lors de ces ovulations d’échappement les œstrogènes formés dans les follicules qui se développent peuvent influencer le mucus dans le sens d'une fluidification, de sorte que le cervix devient perméable pour le spermatozoïde. Ceci est prouvé par les grossesses survenues sous pilule, qui ont augmenté en nombre les dernières années à cause du dosage progressivement abaissé des préparations, car sans ascension de sperme, pas de fécondation. »

Il apparaît que si la pilule a un effet contraceptif, elle n’a pas que cet effet. Elle peut également avoir un effet contragestif en cas d’ovulation d’échappement fécondée.

 

L’usage de la pilule en France

Le rapport de l’IGAS (Inspection générale des affaires sociales) de 2009 intitulé La prévention des grossesses non désirées : contraception et contraception d'urgence[3] publie les statistiques suivantes (p. 87) : « parmi les Françaises entre 15 et 49 ans (14 410 079), 71% utilisent une méthode contraceptive (10 231 156), et 57,4% d’entre elles prennent la pilule (soit 5 872 684). ».

On y apprend également (p. 88) que la fréquence des oublis de pilules est de 21% au moins une fois par mois, 21% au moins une fois tous les trois mois, 11% une fois tous les 6 mois et 11% une fois par an.

On y apprend (p. 8) que sur 100 couples utilisant la contraception, 47% sont sous pilule en France, contre 27% au Brésil, 20% aux Etats-Unis, 19% au Canada, 4% au Japon et 2% en Chine. Les autres pays ayant massivement recours à la stérilisation (Canada, Brésil, Etats-Unis, Chine) ou au stérilet (Chine).

Ce rapport présente la contraception comme « une norme de fait » (p. 9), tout en soulignant le décalage entre l’efficacité théorique de la pilule (0,1% de grossesse sur 12 mois) et la réalité (6 à 8% de grossesses en pratique courante, données source OMS). Ces grossesses sous pilule s’expliquent par les ovulations d’échappement qui peuvent conduire à une fécondation.

Selon les pilules et le métabolisme des femmes qui la prennent, cet effet d’échappement peut être plus ou moins grand. Il peut être renforcé par les oublis de pilules. L’indice de Pearl[4], du nom du médecin américain qui l’a proposé, calcule le nombre de grossesses observées pour cent femmes sous contraception pendant une année. Les laboratoires indiquent pour chaque type de pilule l’indice de Pearl théorique et l’indice de Pearl pratique (intégrant les oublis de pilule et la prise en condition de vie réelle). Prenons deux exemples :

  • La pilule combinée Yaz (Ethynylestradiol 0,02 mg, Drospirénone). Elle indique un indice de Pearl théorique de 0,41 et de 0,80 si on y inclut l’échec de la patiente ;
  • La pilule progestative Cerazette (Désogestrel 0,075 mg). La fréquence d'ovulation d’échappement observée est de 1% (1/103).

Ces statistiques peuvent ne pas sembler significatives dans l’esprit du lecteur. Mais il convient de les mettre en perspective avec les données de l’OMS qui annonce 6 à 8 grossesses sous pilule.

Le rapport IGAS (p. 12) déclare que « les données de l’enquête COCON permettent d’éclairer le paradoxe contraceptif français, à savoir la relative stabilité du recours à l’IVG dans un contexte de diffusion massive des méthodes médicalisées de contraception, dont l’efficacité est très élevée (…) On a ainsi montré que les échecs de contraception restent fréquents : aujourd’hui encore une grossesse sur trois est qualifiée de « non prévue » (contre près d’une sur deux en 1975), qui donnera lieu, dans 60% des cas, à une IVG. Deux grossesses non prévues sur trois surviennent chez des femmes qui déclarent utiliser une contraception au moment de la survenue de ladite grossesse. Cette couverture contraceptive reposait dans près de la moitié des cas sur une méthode de contraception médicalisée présentant une efficacité théorique très élevée (pilule ou stérilet) ce qui ne manque pas d’interroger. »

Le Dr Christian Jamin, gynécologue-endocrinologue, déclarait en 2012 : « Aucune personne, si elle est amenée à prendre 8000 comprimés (nombre moyen de pilules contraceptives pris par une femme au cours de sa vie), ne peut dire qu’elle n’oubliera jamais une seule fois ! Le hiatus contraceptif est inéluctable au cours de la vie ! ».

L’oubli de pilule fait partie de la pilule, et renforce mécaniquement le nombre d’ovulations d’échappement. La clef chimique de la pilule qui cherche à tromper les mécanismes hormonaux du cerveau ne fonctionne pas à 100%, cet effet étant variable selon le type de pilule, son dosage (microdosée ou non, progestative ou combinée) et le métabolisme de la femme qui la prend. Chaque cas reste particulier.

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[1] Lauritzen, C., Fragen aus der Praxis, Die Pille : (auch) ein Abortivum ?, Deutsche Medizinische Wochenschrift (1989) 114, 14, 567.

[2] Chang, M.C., Hunt, D.M., Effects of various progestins and oestrogen on the gamete transport and fertilization in the rabbit, in: Fertiliy and Sterility (1970) 21, 683–686.

[3] https://www.vie-publique.fr/sites/default/files/rapport/pdf/104000049.pdf

[4] https://fr.wikipedia.org/wiki/Indice_de_Pearl