Légion d’honneur remise au prince d’Arabie saoudite. Pour sévices ou services rendus ?

[source : Boulevard Voltaire]

Les nations européennes sont soumises.

Mohammed ben Nayef, prince héritier d’Arabie saoudite, vice-président du Conseil des ministres et ministre de l’Intérieur de la pétromonarchie islamique, a été décoré de la Légion d’honneur, vendredi dernier, par François Hollande en personne. Peut-être gênées, les équipes du président de la République n’avaient pas communiqué sur cette réception, le Journal officiel ne relatant même pas l’événement. De son côté, l’agence de presse saoudienne, beaucoup moins timide, se félicitait de l’événement. L’an dernier, de la même manière, François Hollande remettait la Légion d’honneur à Akbar al-Baker, PDG de Qatar Airways, entreprise qui entend desservir les aéroports français au grand dam d’Air France. Le Président entretient d’excellentes relations avec les monarchies du golfe Persique. Il sait donc se montrer généreux en compliments.

Interrogé, l’entourage du Président déclarait que la décoration avait été remise au prince héritier selon « une pratique protocolaire courante », rappelant que le président de la République avait, pour sa part, été « décoré de l’ordre suprême du Royaume » lors d’une visite à Riyad. En plus de ces déclarations d’usage en matière diplomatique, François Hollande n’a pas manqué d’évoquer « les dernières évolutions de la situation au Proche-Orient et les efforts déployés par les deux pays amis ». Curieux exercice de « realpolitik » de la part de François Hollande, pourtant enclin à délivrer ses pathétiques leçons de morale aux pays du monde entier. À commencer par la Russie, actuellement frappée par un embargo qui handicape sérieusement notre agriculture.

Je suis suffisamment critique, à l’encontre de François Hollande, pour sa propension maladive à s’ingérer dans les affaires intérieures d’États souverains au nom de grands principes hypocrites pour ne pas tomber dans les mêmes travers vis-à-vis de l’Arabie saoudite. Mais enfin, doit-on pour autant passer sous silence la véritable nature de cette théocratie ? Les récipiendaires étrangers de la Légion d’honneur doivent avoir rendu des services à la France ou encouragé des causes qu’elle défend. Le prince héritier est-il décoré pour son « féminisme », comme celui que défendait récemment François Hollande en couverture de Elle ?

Riyad collabore en ce moment avec des groupes armés proches d’Al-Qaïda, en Syrie et au Yémen. Riyad est en guerre ouverte contre toutes les minorités non sunnites du Moyen-Orient. Riyad a récemment fait condamner Mohammed al-Nimr, opposant politique de confession chiite, à une peine de « décapitation et crucifiement », son corps devant être ensuite « exposé publiquement jusqu’au pourrissement de ses chairs ». Riyad entretient un jeu particulièrement trouble avec l’État islamique depuis la création de ce dernier. Riyad ne respecte pas les droits de l’homme. Est-ce donc un pays modèle sur lequel s’appuyer dans cette région du monde ? Je ne le crois pas. Est-ce donc un pays que la France peut se flatter d’avoir pour « ami » ? Certainement pas.

Dans le même esprit de soumission, la Belgique faisait Erdoğan chevalier de l’ordre de Léopold en octobre 2015. Ce même Erdoğan qui massacre les Kurdes. Ce même Erdoğan qui fait donner l’assaut de sa police contre le journal Zaman. Ce même Erdoğan qui trafique avec l’État islamique. Ce même Erdoğan qui enjoint ses ressortissants à créer des États communautaires turcs au sein des États européens.

Les nations européennes sont soumises. Dans un célèbre discours prononcé à la Chambre des communes en 1938, Winston Churchill dit :« Vous avez eu à choisir entre la guerre et le déshonneur ; vous avez choisi le déshonneur, vous aurez la guerre. » Par leurs politiques étrangères déshonorantes, couplées à une irresponsabilité totale en matière de politique migratoire, les pays d’Europe, au premier rang desquels se trouvent la France et l’Allemagne, nous livrent à la guerre. Distinguer avec une telle déférence la dynastie des Al Saoud, revient à distinguer une idéologie qui nous menace très directement, ainsi qu’un système politique planétaire aux pratiques quasi mafieuses. L’argent corrompt l’homme. François Hollande n’est qu’un homme.