L’épisode du navire de migrants arrivé vendredi dans le port de Toulon met en exergue l’échec de la stratégie présidentielle en matière d’immigration. Refusé par l’Italie, le bateau « Ocean Viking » a dû être accueilli en France, mettant dans l’embarras le président de la république. Le succès d’Emmanuel Macron a reposé, jusqu’à récemment, sur une posture ambigüe en la matière. Un positionnement qui vole aujourd’hui en éclat…

L’attrape-tout centriste

La force d’Emmanuel Macron depuis 2017 réside dans sa formule : « en même temps ». Une déclinaison positive du « ni droite, ni gauche » de Marine Le Pen, qui a fait de la formation politique du président actuel un attrape-tout centriste et a participé de ses succès électoraux comme de son ascension fulgurante. Cette posture permet d’emprunter un peu à droite, un peu à gauche mais se heurte à un mur quand il s’agit de faire des choix. La question migratoire fait partie des sujets sur lesquels une grande partie de l’opinion n’admet pas l’entre-deux. Avec l’avènement d’une droite et d’une gauche musclées à l’Assemblée nationale, les positions tranchées sur la question migratoire ont un écho plus puissant et mettent en lumière les limites de la majorité sur le sujet. A gauche, on juge l’annonce de l’accueil des clandestins trop tardive, à droite on dénonce la faiblesse présidentielle sur la question.

La panne au centre ?

Le parti présidentiel s’est bâti sur un équilibre entre débauchés de droite et débauchés de gauche, avec comme point commun pour la majorité du personnel une certaine appétence pour la gamelle. Dans ce théâtre, chacun a son petit rôle, incarnant des sensibilités variées du spectre politique français qui permet de répondre aux différents besoins des multiples segments électoraux. Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, censé incarner un centre dur qui tire vers la droite, est le grand perdant de cet épisode. Ce transfuge de la droite LR, qui fanfaronnait devant Marine Le Pen estimant qu’elle était « trop molle », se retrouve critiqué par l’un de ses prédécesseurs, issu, lui, du Parti Socialiste : Gérard Collomb. L’ancien maire de Lyon estime que le gouvernement « ouvre une brèche créant un précédant » en matière d’immigration. En 2018, Emmanuel Macron avait refusé d’accueillir le navire de migrants « Aquarius », affirmant que le contraire aurait donné un signal de faiblesse aux passeurs. Aujourd’hui, il l’a envoyé. Déplorable vis-à-vis des trafiquants d’êtres humains et de leurs complices des ONG, le message est aussi probablement symptomatique des limites d’une posture politique qui semble avoir fait son temps…