Quand une identité chasse l’autre

Source [Causeur] : Aujourd’hui, on nous répète qu’il faut “déconstruire” les identités, et “identitaire” est devenu un terme d’opprobre. Sauf que les seules identités qu’on nous enjoint de déconstruire sont celles des Européens soi-disant “dominateurs”, tandis que celles des minorités “opprimées” sont à préserver et à louanger. C’est ainsi qu’une civilisation millénaire devient complice de sa propre destruction.

 

La guerre russo-ukrainienne a mis en lumière ce paradoxe : l’identité collective est un bien sacré lorsqu’un peuple agressé défend son intégrité, mais une revendication scélérate en temps de paix et au regard de sa culture et de ses mœurs. Ce premier paradoxe en cache un second puisque les identités « traditionnelles », démantelées en tant que constructions sociales supposées dénuées de fondement naturel et de légitimité morale, volent un peu partout en éclats tandis que des revendications identitaires jusqu’alors minoritaires occupent le devant de la scène : pour de bonnes raisons chaque fois que le droit des individus et des peuples à disposer d’eux-mêmes a été bafoué ; pour de mauvaises s’il ne s’agit que de trouver dans l’identité des autres la cause des malheurs qu’on a endurés. Alors que les civilisations anciennes n’ont survécu qu’en préservant un équilibre toujours fragile entre construction et destruction, la nôtre déconstruit à tout-va comme pour mieux affirmer son besoin illimité de liberté et un sens de l’altérité qu’elle pense exemplaire. N’abandonnons donc pas l’identité aux identitaires, et ne la laissons pas non plus aux mains de ses fossoyeurs ! 

Car la déconstruction va bon train, et sur tous les terrains : celle de la nation depuis des décennies déjà, mais aussi de l’art qui n’a plus de raison d’être que s’il s’autodétruit ; de la culture bien évidemment (« Il n’y a pas de culture française » !), et même du sexe qu’on pensait pourtant la chose la plus naturelle qui soit avant qu’il cède la place au genre (« On ne naît pas femme, on le devient »). C’est maintenant  la mère qui est soupçonnée de capter de manière trop exclusive une affection qui devrait se porter sur « tous ceux qu’on aime » et qui sont tous faut-il croire des « mères » potentielles, à moins qu’on envisage de bannir définitivement ce terme datant de l’âge des cavernes. L’utérus artificiel, qui remplira bientôt la fonction matricielle jusqu’alors réservée à la mère, n’apportera-t-il pas prochainement la preuve que la nidification à l’ancienne est révolue ?

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