Le Djihad révélateur de la crise de l’Occident

Les atrocités de l’organisation “État islamique” mettent l’Occident au défi de retrouver les ressources de sa civilisation pour faire face. Dans notre pays, politiques, chrétiens et musulmans doivent coopérer pour refonder un nouveau pacte pour la France, basé sur la loi morale inscrite dans la conscience de l’humanité.

CES TEMPS DERNIERS, torturant et décapitant, les armées de Gog et de Magog déferlent sur la plaine d’Armageddon et « investissent le camp des Saints, la Cité bien-aimée ». Les peuples qui ont fait le choix de Dieu sont exterminés sous nos yeux laïques, soudain compatissants pour des minorités chrétiennes exotiques, prochaines victimes muséographiques de leur classement au patrimoine immatériel de l’humanité.

La souffrance apocalyptique des croyants fidèles révèle la crise de l’Occident aussi sûr de sa technologie qu’aveugle sur le choix « pour ou contre l’homme » dont ils sont les martyrs.

Le feu du ciel délivré par Rafales ne peut pourtant nous rassurer sur notre sort : les djihadistes sont de nouveaux SS, bien de chez nous géographiquement, produits d’une intégration manquée qui signe l’impensé de la société européenne et française :

  • sur la nation ;
  • sur les rapports entre le politique et le religieux ;
  • sur la laïcité dont l’ADN est chrétien.

C’est le pacte social et national qui est en péril ; ces temps de crise multiforme nous placent devant la nécessité de le refonder.

Refonder le pacte social et national

Trois éléments de la société doivent y contribuer de façon décisive : les politiques (ceux qui se risquent dans une réflexion politique également métapolitique), les musulmans et les chrétiens.

Chacun de ces éléments doit mesurer positivement ce qu’il doit apporter à ce nouveau pacte pour la France.

Côté politique, il faut l’engagement en faveur d’une culture fonctionnelle, c’est-à-dire une pensée commune fondée sur la loi naturelle. La loi Taubira répond parfaitement à son objet, un changement de civilisation qui nous fait descendre de l’arbre pour nous ramener à l’état de nature. Que ceux de droite et de gauche qui prétendront désormais nous gouverner sachent que c’est le point discriminant qui distinguera les partisans d’une société capable de s’enseigner en puisant sans reniement dans son héritage culturel constamment revivifié et ceux du « changement de civilisation », de la table rase libertaire.

Les propos sarkozystes ou juppéens sur le « mariage pour tous » ne pourront nous satisfaire et nous leur prêteront bien volontiers, s’ils insistent, les deux neurones qu’ils mendient. Dans la configuration communautariste où l’islam prend une part de marché grandissante dans la nation, ce choix est crucial. C’est la laïcité idéologique, alibi des dérives libertaires, qui est ici en cause : seul le recours à sa matrice judéo-chrétienne pourra la restaurer comme liberté religieuse fondamentale.

Le défi musulman : adopter la loi naturelle

La communauté musulmane de France, de son côté, doit faire acte d’allégeance nationale et, pour sa majeure part, elle y est disposée. Elle doit relever un défi culturel particulièrement exigeant : celui  d’inscrire l’islam comme élément de paix dans notre société. Ce défi nécessite une lecture exégétique et herméneutique du Coran qui permette de l’accorder avec la tradition judéo-chrétienne de laïcité et de liberté de conscience et de se défaire de toute interprétation violente des textes coraniques.

Mme Farida Belghoul montre qu’une voie est possible dans la convergence qui unit chrétiens et musulmans sur la loi naturelle. Un dialogue qui peut faire de la France le lieu d’éclosion d’un islam apprivoisé, conforme à sa mission de protectrice des chrétiens d’Orient.

On peut penser qu’un nouveau type d’ « éducation nationale », purgé de la Pensée 68, est nécessaire pour répondre à cet objet, pour que les jeunes musulmans français adoptent l’histoire de leur nation, avec la volonté d’apporter leur pierre à l’édifice. La paix civile en dépend. Nous devons parier sur l’islam raisonnable capable de faire son aggiornamento. La position de Dalil Boubakeur, recteur de la Grande Mosquée de Paris et président du CFCM, à propos de la décapitation d’Hervé Gourdel, est de bon augure mais le mal est profond, car le ver est dans le fruit.

Chrétiens : le modèle de l'unité libanaise

Quant aux chrétiens — aux judéo-chrétiens —ils doivent d’abord prendre conscience qu’ils sont les garants culturels et civiques du lien social français. Ils doivent d’abord quitter leur ghetto communautariste et monter à l’agora.

Il y a quelques trente ans, au Liban, Béchir Gemayel disait : « Nous avons été attaqués comme chrétiens et nous nous sommes défendus comme libanais. » Cette maxime doit être la nôtre afin que notre cité terrestre reste « le corps et l’essai de la cité de Dieu » (Péguy).

Le Liban reste le modèle de la construction possible d’une amitié politique entre chrétiens et musulmans dans le cadre d’un État de droit, où l’on voit le rôle irremplaçable des communautés chrétiennes du Moyen-Orient, ici comme là-bas.

Nous trouver en guerre avec une organisation terroriste révèle la  fragilité essentielle où nous plonge, tel un gaz incapacitant, l’idéologie post-moderne du tout-démocratique : en exténuant les nations, leurs cultures et leurs États, elle a détruit leurs défenses immunitaires. La responsabilité de ceux qui promeuvent depuis des lustres la société multiculturelle et l’immigration sans condition combinées avec la haine de leur propre culture dans le déni de leurs racines judéo-chrétiennes, pèse lourdement sur le choc des civilisations. Hors une repentance, que peuvent-ils encore nous dire ?

La civilisation, notre espérance

Une fracture profonde traverse l’aire de la civilisation musulmane depuis l’émergence du fondamentalisme. Et cette fracture est mondiale. C’est un fait majeur sans doute salutaire, dans l’ordre eschatologique. Ses ondes sont politiques  et religieuses : elles provoquent notre intelligence de la foi et son articulation sur le politique  pour faire grandir nos frères musulmans français dans le partage de notre tradition laïque.

Avant la parousie, le Djalal — l’Antéchrist musulman façon Big Brother — établira un paradis qui sera un enfer (ou l’inverse) : l’État islamique peut s’y reconnaître.

Tel est le défi du djihad : il appelle notre espérance, notre esprit de paix, et nous n’aurons pas trop de toutes les ressources de nos longs siècles de civilisation pour y répondre.

Em. Tr.

 

 

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