Puisque depuis plusieurs jours on l’agite de nouveau sous nos yeux pour nous imposer une organisation de l’islam de France et recommencer une campagne pro avortement, je voudrais vous inviter à une réflexion sur cette méthode de gouvernement par la terreur dont le raffinement subtil est français. Si elle avait pu donner lieu à un brevet, la France serait riche de droits d’auteur, tant elle a été copiée, et même « améliorée », ce qui prouve au passage les qualités certaines de son système. Par pédagogie, pour mieux découvrir la puissance de la terreur, faisons un moment son éloge, découvrons sa séduction ! Au point où nous en sommes en France, c’est le seul moyen de faire comprendre que le diable est dangereux, tout simplement parce que sa beauté existe !
La première chose à comprendre en ce qui concerne la terreur noble, la bonne, celle que nous avons inventée, c’est qu’elle vise un bien universel capable d’être instauré partout sur notre terre. L’Église ne parlait et ne parle toujours que de bien commun, pour sa doctrine sociale, ce qui ne peut faire venir à l’esprit que le spectre de la médiocre charité chrétienne. Les maîtres à penser de notre terreur française visent le Bien absolu pour toute l’humanité, sous-entendez pour ceux qui mériteront d’y participer en portant le titre de « vrais hommes », j’y reviendrai, et cela pour la vie en ce monde, voire l’au-delà pour ceux qui y croient d’une manière conforme au pacte de progrès social !
Mais il faut s’arrêter un moment sur l’inventeur de cette Terreur qui inspirera dans la suite des temps ces grands humanistes que furent Lénine, Staline, Hitler, Mao, Pol Pot, je veux parler bien sûr de Robespierre et de son grand discours du 5 février 1794, un rapport sur les principes de morale politique, prononcé à la Convention. Voyez à quelle hauteur de vues notre grand moraliste veut entraîner les députés « Il s’ensuit que la première règle de votre conduite politique doit être de rapporter toutes vos opérations au maintien de l’égalité et au développement de la vertu ». Voilà pour la mise en condition et la préparation psychologique. Voici maintenant pour les travaux pratiques, en révolution à l’époque, mais, si l’on y réfléchit bien, cela peut concerner toutes les périodes de changement visant à la construction d’un monde nouveau et parfait ne pouvant qu’engendrer une société exemplaire. Et voici « l’oracle » qui n’a rien perdu de sa puissance « Si le ressort du gouvernement populaire dans la paix est la vertu, le ressort du gouvernement populaire en révolution est à la fois la vertu et la terreur : la vertu sans laquelle la terreur est funeste ; la terreur sans laquelle la vertu est impuissante » (1).
L’État laïque veut organiser un islam de France. Sur le plan pratique, il a raison, il n’a que trop tardé. Il convient de veiller urgemment au respect des lois, à celui de l’ordre public et à la cohérence de nos politiques avec la « guerre à l’islamisme » déclarée par nos chefs. Ce même État ne peut donc ignorer le droit. En 1905, il s’est déclaré lui-même incompétent en matière religieuse puisque selon les termes mêmes de la loi du 9 décembre de cette funeste année, il ne reconnaît aucune religion (article 2) ! Mais dans son article 1, il est écrit « La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes… ». On pourrait alors comprendre sa démarche de vouloir appliquer cette loi à l’islam, bien que les législateurs d’alors ne l’aient eux même jamais envisagé. Il y faudrait cependant un examen préalable des plus sérieux. L’islam peut se présenter comme un culte, mais il n’est pas que cela, loin de là. Ainsi, la logique, comme l’équité auraient recommandé de proposer des bases de réflexion venant d’islamologues compétents, reconnus comme tels par notre université et nos académies, et de solliciter l’avis des religions historiques de la France, concernées au premier chef par l’implantation de l’islam en France. Car, si la discussion entre spécialistes peut demeurer ouverte sur les origines de l’islam, il est indéniable que l’islam s’est constitué dans sa formation même et tout au long de son histoire contre les Juifs et contre les chrétiens. Le texte même du Coran est là pour l’attester. La démographie des pays musulmans également, qui, hors Egypte, ont vu la quasi disparition des Juifs et des chrétiens (ces derniers constituant initialement la quasi-totalité de la population).
Mais il y avait urgence ! Et la Terreur entre en scène. Il faut combattre l’islamisme et le terrorisme qu’il engendre. On veut donner aux français musulmans, et pas seulement à eux, le moyen de se reporter directement au Coran, en faisant apprendre l’arabe classique aux enfants à l’école publique de peur qu’ils ne l’apprennent dans les mosquées de France, que, subitement, on qualifie toutes d’islamistes après avoir muselé tous les lanceurs d’alerte en la matière. Je fais tout d’abord remarquer qu’il s’agit là d’une reprise plus intelligente, mais néanmoins fausse, du « pas d’amalgame », de l’islam islamiste et dévoyé qu’on devrait opposer au « vrai islam ». Voici en fait la logique du raisonnement de Monsieur El Karoui et de l’Institut Montaigne, érigés depuis peu en tables de la loi de l’islam de la Ve République en France : devenez tous musulmans et vous n’aurez plus à craindre la terreur islamique. Même chanson que celle de Robespierre pour devenir républicain, de Lénine pour devenir marxiste etc…
Et là se pose la question des « vrais hommes ». Qui, dans un système de terreur serait digne de participer de la « vraie humanité » ? Celui-là seul qui fait sienne la terreur qu’on lui impose et adapte ses pensées en conséquence. Sinon c’est un sous homme, dangereux pour le Bien, indigne de la qualité d’homme. Il est alors normal et même nécessaire de l’éliminer : les Vendéens étaient des brigands, et ceux qui n’approuvaient pas Robespierre des suspects qui pouvaient être tués sans jugement. Ainsi en a-t-il été dans les systèmes de terreur, jusque dans leurs avatars modernes, dont certains n’ont même plus besoin de tuer pour exclure et éliminer. Admirable terreur qui fait passer l’envie de poser des questions gênantes…
Revenons à la réforme « islam de France » et aux questions gênantes qu’elle suscite. Celle de l’apprentissage de l’arabe à l’école publique, présenté comme remède à l’islamisme. Pourquoi, comme le suggère une petite affiche humoristique, les gardiens du temple de la Laïcité ne proposent-ils pas alors l’apprentissage généralisé du latin pour combattre l’intégrisme catholique ? Et que dire de la question financière ? La fameuse taxe sur le halal ? Nous touchons là à une nébuleuse… Certes, on connait les trois mosquées qui se partagent l’attribution du label en France mais la distinction réelle entre ce qui est « halal » et ce qui ne l’est point est pour le moins opaque au niveau des ventes. En clair, pour ce qui relève de la viande, on vend comme non halal ce qui a été abattu comme tel et taxé en conséquence. Et pour le reste, hors viandes –cosmétiques, produits agroalimentaires, etc. – on voit se multiplier une labellisation très discrète, nourrissant le communautarisme, et qui, là encore n’est pas clairement affichée. Les labels « non halal » ou « filière traditionnelle » étant quant à eux interdits au nom de la lutte contre les discriminations ! Ainsi, des non-musulmans subventionnent-ils le culte musulman en achetant viande et produits de grande consommation sans le savoir. Ce flou pourrait certes être levé. Non seulement il s’agit d’un préalable indispensable à toute réforme « islam de France », mais également d’une mesure de simple bon sens. Mais comme le flou et le doute profitent à beaucoup, on n’entend guères de voix s’élever en ce sens.
Plus généralement, des voix musulmanes se sont jusqu’à présent fait entendre suite au projet de Monsieur El Karoui. Elles lui sont plutôt hostiles, préférant le doute et le flou d’un statu quo confortable. Elles ressentent ce projet comme un reste des mauvaises habitudes coloniales françaises. Il serait fastidieux d’entrer dans le détail de cette contestation. Retenons en déjà que le monde musulman français est très divers et que les enjeux de pouvoir sont parfaitement ressentis. Parmi tous les antagonistes de cette affaire, et j’y inclus l’État, c’est celui qui saura le mieux manier la terreur qui gagnera, et il ne sera pas interdit d’être intelligent. Sur ce sujet lui-même, la première chose à faire pour l’État serait de prendre acte, textes à l’appui, que le projet proposé par l’Institut Montaigne s’inscrit tout à fait dans les plans de l’OCI (l’organisation de la Coopération Islamique qui regroupe les 57 pays musulmans) pour islamiser les pays non musulmans (2). Et donc de prendre quelque prudente distance diplomatique avec ces pays, plutôt que de les impliquer directement dans « l’islam de France ». Il faudrait aussi inviter certains parlementaires à la réflexion et sans doute à plus…!
Mais encore faudrait-il que cet état laïque fût crédible quant à son souci de la liberté des consciences pour prétendre intervenir dans le domaine religieux. Ce qui est arrivé récemment au docteur Bertrand de Rochambeau est sur ce sujet pour le moins inquiétant. Je laisse volontairement de côté la manière dont s’est déroulé l’interrogatoire, il suffit de le visionner intégralement. A sa fin, ce médecin, bien que président d’un syndicat a pris le droit, et il en avait à mon avis le devoir, d’exprimer sa pensée personnelle sur l’IVG. Et ce d’autant plus que l’inquisitrice lui demandait alors explicitement sa position personnelle. Comme médecin, il pouvait dire « nous ne sommes pas là pour retirer des vies » et contredire l’avis de la journaliste lui affirmant que comme femme elle considérait qu’avoir un embryon dans le ventre ne signifiait pas qu’elle portait une vie. Il avait pour lui la clause de conscience prévue par la loi Veil, et que bien évidemment Madame Véronique Séhier co-présidente du Planning familial voudrait supprimer parce que cela porte ombrage au fait que l’avortement soit « un droit légitime » (le tout en célébrant la mémoire de Madame Veil, ne cherchons pas ici de cohérence…). Suite à cette interview, il y eut une avalanche de commentaires instituant une véritable terreur intellectuelle et aboutissant au lynchage médiatique de ce médecin courageux. Pourquoi cette fureur ? Tout simplement, parce qu’en vérité, avec le recul, on se rend compte des dégâts psychologiques créés par l’avortement banalisé et utilisé comme moyen de contraception, le tout en opposition absolue avec les intentions de la loi Veil. Des médecins, de plus en plus nombreux, refusent donc de pratiquer cet acte homicide, car c’est bien le nom qu’il faut lui donner. La manière dont deux ministres du gouvernement sont intervenus dans cette affaire m’a paru exagérée. « Nous ne devons laisser passer aucune attaque, d’où qu’elle vienne, contre le droit des femmes à accéder librement à l’avortement ». Un simple rappel de l’existence de la loi permettant cet acte aurait été suffisant. Mais l’utilisation d’un pareil vocabulaire est hautement critiquable. On fait un procès d’intention au docteur de Rochambeau, qui n’a formulé qu’une opinion personnelle et justifié son refus de pratiquer un avortement en expliquant que pareil acte ôtait la vie. On peut bien évidemment en déduire qu’il ne considère pas l’avortement comme faisant partie des droits de la femme. Mais je rappelle alors à Mesdames les ministres qu’il n’est pas le seul à penser ainsi. C’est en effet la position de l’Église catholique. Je rappelle le texte du code de droit canon de 1983 article 1398 : « Qui procure un avortement, si l’effet s’en suit, encoure l’excommunication latae sententiae ». La jurisprudence, comme l’encyclique de Jean Paul II Evangelium vitae(25 mars 1995), rendent justiciables de cette peine non seulement la personne qui avorte (devant avoir au moins seize ans), mais encore ceux qui l’aident, famille et corps médical (3). Cette peine « d’excommunication automatique » dès que l’acte est commis prive de tous les sacrements, sauf bien sûr de la pénitence qui permet aux coupables de ces homicides d’enfants de demander pardon à Dieu et de recevoir l’absolution si le repentir est réel. À mes yeux, et je ne pense pas être le seul catholiqueà penser ainsi, elle prive aussi de l’honneur des funérailles chrétiennes, le prêtre ne pouvant dire les prières des morts qu’en privé ! La porte de nos églises devrait rester fermée pour les cercueils de celles qui, ayant avorté, n’ont donné aucun signe de repentir. De même pour ceux de leurs complices. Pendant l’année 2016, année de la miséricorde, le Pape François avait donné pouvoir à tous les prêtres d’absoudre une telle faute. Je crois que cela a été l’occasion de constater pour beaucoup de prêtres, moi-même en particulier, l’étendue des dégâts psychologiques, pour ne parler que d’eux, provoqués par l’avortement. Si Madame le Ministre de la santé en avait la plus petite idée, elle n’aurait certainement pas emboîté aussi vite le pas et le style de sa collègue, au nom de la médecine qu’elle exerce elle aussi à un haut niveau, comme l’est également celui des frais de santé ( ceux de l’avortement lui-même et de ses conséquences). 240 000 avortements par ans, cela se paie très cher….et pas qu’en euros. Et le terrorisme intellectuel légalisé met tous les français à contribution forcée. Où est la liberté des consciences ?
Quand deux ministres d’un État comme la France font si peu de cas de cette liberté, comment ce même État peut-il espérer qu’on lui fasse confiance pour organiser la pratique d’un culte et « assurer la liberté des consciences » garantie par la loi de 1905 ? Certes, les musulmans n’ont pas des règles identiques à celles des catholiques sur l’IVG. Ils ne considèrent pas pour autant qu’on se débarrasse d’un fœtus comme d’une verrue ! Même chose pour les Juifs, et pour les chrétiens non-catholiques. Ce qui vient de se passer autour des propos du docteur de Rochambeau s’ajoute à la longue liste des immoralités qui nourrissent la propagande islamique contre l’Occident, et dont la loi Taubira a constitué un des points d’orgue. Que ces réactions contre notre actuelle civilisation soient sincères ou teintées d’hypocrisie n’a strictement aucune importance. Quand deux formes de terreur s’affrontent, c’est la plus forte qui l’emporte, et la vérité ne compte pas. Pour que cette dernière recouvre ses droits, il faut exclure la terreur et revenir au moins à la Loi naturelle qui seule peut ramener à la Loi de Dieu. La raison peut alors reprendre ses droits, et par elle Dieu. Le signe en sera que jamais une femme enceinte ne pourra dire que ce qu’elle porte n’est pas la vie ou encore qu’une mère ne revendiquera le droit de pouvoir tuer son enfant. Et il ira de soi qu’un Dieu bon et miséricordieux ne peut jamais demander qu’on assassine en son Nom ! Que l’État comprenne alors que la promotion et la défense de telles idées relèvent de sa mission concernant l’ordre public, et que ce n’est pas déroger à sa sacro-sainte laïcité que de les mettre en œuvre – et encore moins de les laisser s’exprimer. Il est encore temps de changer de cap, de mettre fin à l’éloge de la terreur, forme d’éloge d’une folie qui nous coûtera de plus en plus cher, jusqu’à nous détruire complètement. Car une fois dépassé un certain stade, la pente ne se remonte plus, la terreur devient sa propre raison et ne s’éteint qu’une fois que tout est consumé.
(1) Père Michel Viot, L’heure du royaume de France est-elle venue ?, Éditions Via Romana, 2018, p.149
(2) « Stratégie de l’action islamique culturelle à l’extérieur du monde islamique » de l’ISESCO (Organisation Islamique pour l’Education, les Sciences et la Culture, issue de l’OCI – Organisation de la Coopération Islamique, qui regroupe les 57 pays musulmans), à télécharger sur le site l’ISESCO : https://www.isesco.org.ma/fr/wp-content/uploads/sites/2/2015/05/Strat%C3%A9gieExtVFLR1.pdf
(3) Cette peine ne vise bien sûr que les catholiques accomplissant l’acte d’avortement ou y coopérant sciemment . Les coupables peuvent obtenir la levée de la sanction si le repentir est réel et qu’ils s’engagent à réparer le mal causé dans la mesure de leurs possibilités.
Le prochain Journal de Lumière et de l’Espérance diffusé sur Radio Courtoisie le dimanche 30 septembre 2018 en direct de 12h à 13h30 poursuivra l’étude commencée le 2 septembre sur la question de l’islam de France tant les réactions des auditeurs ont été importantes.