Attentat d'Arras : Ingouchie, Tchétchénie, quand l'Histoire fabrique des bombes humaines

Source [Marianne] : L’assassin de Samuel Paty, Abdoullakh Anzorov, était tchétchène. Celui de Dominique Bernard, Mohammed Mogouchkov, le 13 octobre dernier à Arras, est lui ingouche. Ces deux régions voisines du Caucase russe, qui comptent respectivement 1 million et un demi-million d'habitants, partagent une même histoire entachée de d'humiliations, de répression et de sang.

Les assassins de Samuel Paty et trois ans plus tard, de Dominique Bernard, sont respectivement originaires de Tchétchénie et d'Ingouchie : deux régions voisines de la Fédération de Russie, situées au Caucase et qui partagent, outre l'islam, une histoire récente marquée par la violence. Accusées de collaboration avec l’envahisseur allemand pendant la Seconde Guerre mondiale pour se détacher de la tutelle russe, les deux populations, Tchétchènes et Ingouches, ont été massivement déportées par l’État soviétique. En 1944, l’URSS les expédie loin de leurs terres. Des milliers de familles sont parquées dans des trains destinés au transport des bestiaux. Le voyage vers le nord de l’URSS dure entre quatre et cinq semaines. Ils sont 355 000 Tchétchènes et Ingouches à arriver au Kazakhstan, et 76 986 au Kirghizistan. Sur place, rien n’est prévu pour loger femmes, enfants et vieillards amaigris ou malades après ce terrible voyage. « Les autorités du Kirghizistan et du Kazakhstan ont été prévenues à la dernière minute de ce convoi massif. Tchétchènes et Ingouches et d'autres peuples déportés ont raconté qu’ils devaient creuser des trous pour pouvoir s'abriter du vent et du froid et y dormir pendant les premières nuits. Les dix-huit premiers mois ont été terribles et les populations de déportés décimées », relate Aurélie Campana, professeure de science politique à l’Université de Laval au Québec. On estime que 30 à 50 % des déportés ne survivront pas à la déportation même ou l’année qui suivra l’exil.

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