Article rédigé par Jean-Marc Nesme*, le 15 avril 2005
Paray-le-Monial fut certainement, pour Jean Paul II, une étape essentielle dans son cheminement spirituel et dans l'exercice de son sacerdoce. Cardinal, Karol Wojtyla s'était déjà rendu à deux reprises dans la cité du Cœur de Jésus avant d'être élu pape, en 1978.
C'est le 5 octobre 1986, devant 150 000 fidèles devant deux millions de chrétiens qui écoutent son homélie retransmise en Mondiovision, qu'il redonne au message spirituel de Paray-le-Monial sa pleine dimension universelle. Il déclarait : "Toute l'histoire de la spiritualité chrétienne en témoigne : la vie de l'homme croyant en Dieu, tendu vers l'avenir par l'espérance, appelé à la communion de l'amour, cette vie est celle du cœur, celle de l'homme "intérieur". Elle est illuminée par la vérité admirable du Cœur de Jésus qui s'offre lui-même pour le monde."
Six ans plus tard, en 1992, il canonise Claude la Colombière, directeur spirituel de sainte Marguerite-Marie et confirme ainsi la sainteté de celui qui avait recueilli ses confidences et ses révélations. Voulait-il une fois de plus montrer l'importance qu'il convient d'attribuer au message spirituel du Cœur de Jésus révélé à Paray-le-Monial ?
À l'occasion de cette canonisation, je me suis rendu à Rome avec une délégation de 200 parodiens. Après la cérémonie à la basilique Saint-Pierre, Jean-Paul II nous a reçus en audience particulière. Devant nous, il a évoqué son voyage à Paray-le-Monial en 1986 et le bonheur qu'il a éprouvé en foulant notre terre.
En messager de la paix dans le monde, il nous a répèté les paroles qu'il a prononcées le 5 octobre 1986 : "Partout, dans la société, dans nos villages, dans nos quartiers, dans nos usines et nos bureaux, dans nos rencontres entre peuples et races, le "cœur de pierre", le cœur desséché, doit se changer en "cœur de chair", ouvert aux frères, ouvert à Dieu. Il y va de la paix dans le monde. Il y va de la survie de l'humanité."
Personnellement, j'ai rencontré à trois autres reprises le pape Jean Paul II, soit au Vatican soit à Castel Gandolfo dans sa résidence d'été. Ces rencontres ont eu lieu au titre de mes activités parlementaires, dans le cadre des relations entre le Parlement français et l'État du Vatican. Ces audiences privées ont permis de donner à nos entretiens un caractère plus libre et détendu. Les liens spirituels du Saint Père avec Paray-le-Monial, ville dont il savait que j'étais le maire, ont crée d'emblée entre nous une amitié particulièrement sensible et chaleureuse.
" Vous avez la chance d'être le maire de la ville du Sacré-Cœur ", me disait-il, un jour et de poursuivre : " Mon pays, la Pologne, fut le premier à reconnaître la dévotion au Cœur de Jésus. "
" Saint-Père, reviendrez-vous à Paray le Monial ? ", lui ai-je demandé lors de notre dernière entrevue. " Il me reste tant de lieux saints à visiter et tant de peuples dans la détresse à rencontrer sur les cinq continents ", me répondit-il.
L'un des voyages qui lui semblait tenir à cœur était se de rendre à Ur. Il m'avait confié que ce voyage était sa grande ambition : "La visite de la Bible doit débuter à Ur où tout a commencé." Ur est au sud de Bagdad (Irak) dans l'ancienne Mésopotamie ; c'est le lieu couramment désigné comme celui de la naissance d'Abraham, le père des religions du Livre, pour les chrétiens, les juifs et les musulmans.
Sachant que je m'y étais rendu, dans le cadre d'une mission parlementaire en Irak, quelques années après la guerre du Golfe, le Pape m'avait demandé de lui dire ce que j'avais vu à Ur et quelles impressions cette ville éveillait en moi.
L'on sait que Saddam Hussein lui a refusé l'entrée en Irak, à la veille du jubilé de l'an 2000. Le Pape en fut meurtri.
Nos conversations ont été également plus politiques. La foi de Jean-Paul II n'ignorait rien des problèmes contemporains, lui qui avait vécu dans son pays natal, d'abord l'oppression nazie et ensuite l'oppression communiste, il aimait répéter "N'ayez pas peur". Avec ce cri qui a vaincu les totalitarismes, il fut l'artisan de la chute du communisme en Europe de l'Est.
Les prises de position du pape sur les questions sociales morales et éthiques lui valurent l'hostilité haineuse de certains groupes de pression. Peu importe, les foules, et tout particulièrement les jeunes, n'ont cessé de venir l'écouter. Aucun chef d'État dans le monde n'a été capable de réunir de telles foules. Le message de paix et d'amour qu'il n'a cessé de proclamer en tous lieux continue son œuvre dans le monde.
Aumônier des jeunes au début de son sacerdoce, il restera pour tous les jeunes de la terre, leur pape, celui qui à travers les J.M.J. a cherché à leur faire découvrir un sens à leur vie. N'a-t-il également, par sa vie et son pontificat, redonné à beaucoup d'hommes l'espérance, malgré les épreuves et les conflits, pour vivre ce troisième millénaire ?
*Jean-Marc Nesme est député de Saône-et-Loire, maire de Paray-le-Monial.
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