Article rédigé par Mgr Jean Laffitte*, le 26 juin 2006
La nouvelle des premières autorisations de recherche sur l'embryon données en France le 20 juin dernier par l'Agence de la biomédecine à six équipes françaises de chercheurs est un nouveau pas vers la banalisation et le mépris de la vie humaine, réduite à un simple matériau biologique et traitée comme telle [1].
Survenant logiquement quelques jours après le vote au Parlement européen du financement de la recherche sur les cellules-souche provenant en particulier des embryons surnuméraires [2], cette mesure de l'Agence de la biomédecine est une violation des principes éthiques qui ont toujours prévalu dans le domaine de la recherche médicale, à savoir :• le principe qui interdit de faire prévaloir les intérêts de la recherche au détriment de la vie humaine,
• et le principe qui interdit de conduire des expériences sur des êtres humains incapables d'exprimer un consentement, et pour lesquels ne serait licite qu'une recherche pouvant bénéficier directement au bien du sujet soumis à l'investigation.
* Mgr Jean Laffitte est vice-président de l'Académie pontificale pour la vie.
Pour en savoir plus :
[1] La France instrumentalise l'être humain, par Jean-Marie Le Méné, Décryptage, 23 juin 2006 (Ndlr).
[2] L'Europe en marche vers le financement de la recherche sur l'embryon humain, par Élizabeth Montfort, Décryptage, 23 juin 2006 (Ndlr).
■ Déclaration du cardinal Jean-Pierre Ricard, président de la Conférence des évêques de France et ci-dessous, 29 juin 2006 (Ndlr).
Communiqué
Conférence des évêques de France
Déclaration à propos des récentes autorisations de recherche sur les cellules souches embryonnaires
Paris, le 29 juin 2006
L'Agence de la biomédecine, créée dans le cadre de la loi relative à la bioéthique du 6 août 2004, vient de délivrer ses premières autorisations de recherche sur les cellules souches embryonnaires.
Depuis le vote de la loi, et jusqu'à la publication des décrets d'application en février 2006, quatorze autorisations d'importation de telles lignées cellulaires avaient été délivrées, selon une procédure temporaire, par un comité créé à cet effet. Ces lignées sont obtenues à partir d'embryons humains, ce qui conduit à leur destruction.
La nouvelle Agence de la biomédecine vient d'autoriser cinq équipes à entamer des recherches sur des lignées importées de l'étranger et une en utilisant des embryons surnuméraires obtenus en France dans le cadre d'une fécondation in vitro.
Ainsi se poursuit la mise en place du processus de réduction de l'embryon humain à l'état de moyen, ce qui constitue une grave transgression éthique. Nous devons redire que l'embryon humain ne peut être considéré comme un simple matériau de laboratoire. "Tout embryon est déjà un être humain. Il n'est donc pas un objet disponible pour l'homme. Il n'est pas possible de décider d'un seuil au-delà duquel l'embryon serait humain et en deçà duquel il ne le serait pas [1]." "Nul n'a le pouvoir de fixer les seuils d'humanité d'une existence singulière [2]."
Cette dérive vers l'instrumentalisation de l'embryon humain se trouve renforcée également par la récente décision du Parlement européen (15 juin 2006) d'autoriser un financement communautaire de la recherche sur les cellules souches embryonnaires, alors même que ce type de recherche reste interdit dans un certain nombre d'États membres de l'Union européenne. Parce que "l'utilisation et la destruction des embryons humains est un sujet qui touche à l'inviolabilité de la vie et de la dignité humaines et concerne les convictions les plus profondes de nombreux citoyens de l'Union européenne, l'Union européenne a le devoir moral de s'abstenir de promouvoir par le biais d'un financement communautaire ce type de recherche [3]".
"En refusant que l'on porte atteinte à l'intégrité de l'embryon, l'Église catholique ne veut en aucune façon être une entrave à la recherche [4]." Les bénéfices thérapeutiques espérés des recherches envisagées sur les cellules souches embryonnaires demeurent aléatoires et d'autres modes de recherche, sans difficultés éthiques particulières, doivent être davantage encouragés. La science peut progresser tout en respectant pleinement la dignité humaine.
Cardinal Jean-Pierre Ricard
archevêque de Bordeaux,
président de la Conférence des évêques de France
[1] Déclaration de Mgr Jean-Pierre Ricard, président de la Conférence des évêques de France, le 27 janvier 2003.
[2] Jean-Paul Il, Discours à un groupe de travail de l'Académie pontificale des sciences, le 20 novembre 1993.
[3] Communiqué de la Commission des épiscopats de la Communauté européenne (COMECE), le 15 juin 2006.
[4] Déclaration du cardinal Philippe Barbarin, archevêque de Lyon, le 9 décembre 2003.
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