Article rédigé par Étienne de Baudus, le 27 août 2011
Avec un titre pareil on ne s'étonnera pas que le festival du Hellfest qui s'est tenu à Clisson du 17 au 19 juin – seul festival français de musique metal –, ait suscité en juillet une vive polémique entre les pour et les contre. De nombreux riverains se plaignent du caractère provocateur du festival qu'ils sont obligés de subir. De nombreux chrétiens s'émeuvent des insultes et de l'appel à la haine contre l'Eglise dont il est l'occasion. L'entretien du Président du collectif Provocs Hellfest ça suffit que nous avons publié (le 1er juillet 2011) a suscité de très nombreuses réactions de métalleux .
Leurs commentaires n'étaient pas tous publiables. Nous ne pouvons pas en effet nous prêter aux injures et aux propos calomnieux de ceux qui appellent à la haine contre Dieu, l'Eglise et ses membres, ou à des propos erronés sur ce qu'est le metal. Cependant, tous ces commentaires ont été lus. Certains sont hors de propos, certains manifestement sont sincères, même si le ton est parfois agressif, nombre d'entre eux justifient une réponse.
Nous remercions les auteurs des commentaires, qui nous ont apporté des informations et des critiques constructives. De nombreux arguments se recoupent, si l'un ou l'autre des commentaires postés n'est pas traité directement, nous prions son auteur de nous en excuser.
A propos des réponses de Louis Peramet à nos questions :
- Le nombre des festivaliers :
Si le nombre maximal de personne était chaque jour de 25 000 personnes, et qu'en effet le festival du Hellfest fut plein pendant les trois jours, cela ne fait pas pour autant 75 000 personnes présentes, mais seulement 75 000 tickets vendus en trois jours. En effet, la plupart des festivaliers ont passé les 3 jours à Clisson afin de profiter pleinement du festival. Il est difficile d'estimer dans quelle mesure il s'agissait des mêmes personnes tout au long du festival. 25 000 est un chiffre a minima, sans doute sous estimé, mais le chiffre de 75 000 ou de 90 000 festivaliers différents tout au long du festival n'a certainement pas été atteint.
- La drogue :
La détention de drogue, le nombre d'interpellations et le taux d'alcool ne sont pas les raisons pour lesquelles le festival pourrait être fermé, ni pour lesquelles il est actuellement critiqué. Comme beaucoup l'ont dit, d'autres festivals sont bien pires de ce point de vue. Même s'il faut déplorer la consommation abusive de drogue et d'alcool, il faut reconnaître que les chiffres du Hellfest sont relativement peu élevés.
- Haine des festivaliers :
Aucun mot de l'entretien ne diffuse un message haineux envers le metal, ou les metalleux (festivaliers ou autres). Seuls certains groupes de metal sont visés dans l'interview, en raison de leur message et non par simple volonté de nuire.
Nous sommes d'accord pour dire avec certains commentaires que la musique metal n'est pas nécessairement satanique, ni les metalleux tous christianophobes, mais que le rock metal est un style musical qui a sa culture et ses fans. Cependant, une haine et une violence anti-chrétienne voire anti sémite est véhiculée.Il ne faut pas oublier que Hellfest signifie festival de l'enfer .
- Un festival rock plus dangereux que les autres ?
La lutte contre la discrimination ne concerne pas que le Hellfest. D'autres styles de musique que le metal ont aussi leurs groupes sectaires voire dangereux. Le Hellfest n'est donc aucunement stigmatisé par la demande du Collectif, ou par notre article.
- Interdiction du Hellfest :
Comme le spécifie bien le commentaire d'Innerlight à propos de l'interview du Président du collectif que nous avons publié, le témoignage de Pneumatis, et l'intervention du curé de Clisson ne signifient pas qu'il faille interdire le Hellfest. Ce n'est pas non plus le but premier du Collectif : le collectif veut éviter les débordements et les discriminations anti-chrétiennes de certains groupes qui peuvent exister dans le festival.
- La question des subventions publiques :
Les subventions publiques ne peuvent être allouées que si le festival respecte la loi. L'appel à la haine, la discrimination publique d'une communauté quelle qu'elle soit est en France condamnée par la loi. Si le Hellfest ne respecte pas la loi, il n'y a pas de raison que des subventions lui soient attribuées. Cela ne signifie pas qu'il faille supprimer toutes les subventions du festival, mais que le festival ne peut accepter des groupes prônant la discrimination.
A propos des commentaires reçus sur notre site et des questions soulevées par les métalleux
- Les critiques contre l'Eglise
L'opposition au Hellfest ne vient pas de l'Eglise mais de riverains catholiques ou non qui se passeraient bien de ce festival sous leur fenêtre et durant lequel on leur demande pour pouvoir circuler d'apposer sur la vitre de leur voiture des croix à l'envers, symbole que chacun comprend très bien. Il s'agit donc de légalité et non d'opinion religieuse ou d'égalité par rapport à d'autres festivals européens.
Dire que l'Eglise a bien assez de choses à se reprocher afin de pouvoir l'insulter ou de lui demander de se taire est une défense du festival, injurieuse, et hors de sujet. Nous invitons les auteurs de telles critiques à se renseigner sur l'origine ou les raisons des reproches calomnieux qu'ils adressent aux chrétiens et à l'Eglise.
- Le droit de croire en Satan ?
Certains groupes au programme, sont désignés par le Collectif Provocs Hellfest, ça suffit ! comme satanistes et/ou anti-chrétiens. Un certain nombre de commentaires ont affirmé une incompréhension face à cette critique. En effet pour ces métalleux si les chrétiens croient en Dieu, pourquoi les satanistes ne pourraient-ils pas croire en Satan ? Pourquoi interdire le satanisme ? En quoi est-ce que cela dérange les chrétiens qu'il y ait des chansons anti-chrétiennes, ne suffirait-il pas qu'ils ne les écoutent pas ?
Le Collectif considère que les groupes satanistes metalleux présents au Hellfest doivent être interdits et supprimés du programme. La critique porte notamment sur le groupe Therion, accusé de réaliser un véritable rituel satanique lors d'un de ces concerts. Les avis sont partagés. Le témoignage de Pneumatis, les commentaires nombreux ainsi que d'autres témoignages sur le même concert ne permettent pas de trancher le débat. Cependant, que le groupe Therion ait fait ou non un rituel satanique durant son concert, la mise en garde de Pneumatis à ce sujet demeure pertinente.
La Miviludes (Mission Interministérielle de VIgilance et de LUtte contre les DÉrives Sectaires) appuie cette mise en garde, et écrit en conclusion de son guide satanisme et dérive sectaire :
Face au phénomène sectaire, l'État ne doit pas baisser la garde : les dangers sont réels. De même, face au satanisme, qui s'illustre par la mise en pratique d'actes troublants manifestement l'ordre public et de surcroît attentatoire aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales, l'État a le devoir d'être vigilant et d'entreprendre une action répressive à l'encontre des dérives sectaires. [...] En effet, sans céder à des amalgames rapides entre gothics, métalleux et satanistes, les risques de passage à l'acte délictuel ou criminel restent sérieux. Les familles, les associations, l'Éducation nationale et l'administration en général doivent offrir des repères aux mineurs en pleine construction identitaire et leur rappeler, de façon compréhensible et intelligible, les limites légales à ne pas dépasser ainsi que la réalité de frontières invisibles qui peuvent soudainement faire basculer l'individu libre et éclairé dans le monde utopique des adeptes aveuglés et robotisés.
Bien évidement, d'un point de vue légal, le satanisme n'est pas interdit. La liberté de conscience et la liberté religieuse sont des fondements de notre Etat de droit. Mais le nombre d'actes violents, blasphématoires, meurtriers ou suicidaires posés sous l'inspiration de groupes satanistes, ou de satanistes ayant entendu des voix incite à ne pas prendre à la légère les groupes tenant des propos sataniques ou se disant tels. L'Eglise Catholique, bien entendu, y porte attention.
Ainsi, le satanisme n'est pas une religion comme une autre. Elle est porteuse d'un nombre important de dérives sectaires. Le culte à Satan participe d'un esprit de destruction et de l'exaltation du néant. D'un point de vue chrétien, il se comprend comme une révolte contre Dieu, et spécialement contre le Christ, d'une volonté de transgresser le décalogue, et de détruire la chrétienté.
- Les christianophobes et les satanistes peuvent-ils être censurés ou interdits ?
1° Certains groupes chantent des textes christianophobes au Hellfest
Relativement à l'article Hellfest 2010, florilège (http://www.libertepolitique.com/actualite/55-france/6083-hellfest-2010-florilege) publié sur ce site le 8 juin 2010, certaines paroles de groupes metal sont, sans conteste, christianophobes, c'est à dire non seulement contre la chrétienté - La Division Panzer Marduk continue sa croisade triomphante, contre le christianisme et votre humanité sans valeur. -, mais également contre les chrétiens eux-mêmes, dans leur personne: Les serpents chrétiens peuvent fuir ou rester et faire face aux océans de feu, sang et fer qui les effacera à jamais.
2° Les paroles christianophobes sont indissociables de la musique des groupes métals
C'est ce qu'explique le Père Benoît Domergue, spécialiste de la question, dans son article intitulé Hellfest : une assimilation dangereuse du 5 juillet 2010. Ce que confirme d'ailleurs Morgan, du groupe Marduk, dans un autre article.
Une autre explication a été proposée aux messages anti-chrétiens : Le metal est par principe rebelle à toute espèce d'ordre et de valeurs. Or notre société étant largement fondée sur un ordre et des valeurs judéo chrétiennes la révolte et la haine contre l'Eglise en a été et en est toujours l'inspiratrice.
3° Le refus des valeurs chrétiennes
Cependant, le refus des valeurs dominantes dans une société ne justifie pas l'intolérance envers ceux qui les acceptent. Si certains, à titre personnel, refusent le fondement chrétien de notre civilisation, ils ne peuvent pas pour autant appeler à la haine, à la violence ou à la discrimination contre ceux qui ne partagent pas leur avis, ni se poser en victimes, quand on leur en refuse le droit. Cela s'applique également chez les chrétiens.
4° La haine de l'Eglise
A ceci il faut ajouter que le passé d'un peuple ou d'une communauté de croyants comme l'Eglise Catholique, largement méconnue des festivaliers au vu de leurs commentaires, ne peut pas non plus justifier la haine actuelle envers l'Eglise, ses prêtres et ses membres laïcs. Tous les peuples, toutes les nations, toutes les civilisations ont connu dans leur histoire des épisodes malheureux ou condamnables. Pour autant on ne peut pas prôner la haine et la vengeance contre tous les peuples, contre toutes les civilisations et contre toutes les religions.
5° Lecture au second degré et catharsis ?
Selon certains enfin les textes de la musique metal ne seraient pas à lire au premier degré. Ils serviraient de catharsis à comprendre dans l'entièreté des textes, et seraient à ne pas sortir du contexte.
Plusieurs cas de figures se rencontrent dans les groupes concernés. Soit il s'agit de textes extrêmements violents, prônant la mort et l'avènement de l'apocalypse comme the return of Darkness and Evil de The Bathory. Dans ce cas, il ne s'agit pas de discrimination à l'égard des chrétiens. Mais on peut légitimement se poser la question du bien fondé de telles paroles.
La catharsis qui est l'un des buts de la tragédie, n'est possible que dans un ordre des valeurs clairement établi. Or ce n'est pas le cas dans la musique métal qui est une révolte contre toute espèce d'ordre.
Loin d'une catharsis, il s'agit de textes ouvertement contre la religion chrétienne, qui, au nom de Satan, de l'antéchrist, de la vengeance, ou de la simple haine des religions, cherchent sa destruction, et la destruction de ses symboles. Si le refus de la foi chrétienne est permis, la volonté de détruire ses symboles, y compris ses prêtres et les chrétiens, comme le montre Jesus Christ... Sodomized ou Fistfucking God's planet de Marduck, relève pleinement de la discrimination et de la christianophobie.
4° De tels propos ont des conséquences :
Il est clair qu'il y a des propos christianophobes dans les paroles de certains groupes au programme du Hellfest. Ces propos ne sont pas sans conséquences. S'il n'est pas systématique qu'ils soient suivis d'actes violents envers les chrétiens, ils sont néanmoins une incitation à de possibles débordements.
De plus, la conséquence directe de tels propos est la propagation d'une image fausse et discriminatoire des chrétiens, les considérant comme un groupe uniforme, à détruire au nom de leur religion.
Enfin, ces propos et parfois ces actes violents, blasphématoires, très souvent insultants, peuvent blesser les personnes concernées. Lorsqu'un groupe chante Je vous surveillerai toujours, jusqu'à ce que la dernière église soit brûlée, jusqu'à ce que les coupables meurent noyés dans le sang que doit-on en conclure ? Chaque semaine des églises et des tombes chrétiennes sont profanées. Si le mot église était remplacé par mosquée , temple , ou synagogue , que dirait-on ?
Le folklore ou le second degré n'excusent pas tout et n'autorisent pas la stigmatisation et la discrimination d'une communauté.
Les metalleux nous ont écrit pour se plaindre que le Président du collectif Provocs Hellfest les considère tous comme des sataniques et des violents,ce qui ne serait pas juste. Or, à aucun moment, il ne l'a fait. En revanche, de très nombreux commentaires de métalleux enferment tous les chrétiens et toute l'Eglise dans la même réprobation. Quand un groupe de metal adresse des messages de morts destinés aux chrétiens considérés comme un seul bloc à détruire, il est légitime que certains de ceux-ci se sentent menacés et protestent. Il n'y a besoin ni d'être chrétien ni d'être métalleux pour le comprendre.
5° Ces conséquences sont punies par la loi
La christianophobie, comme toute discrimination ou racisme, est punie par la loi. Aux articles 23 et 24, de la loi du 29 juillet 1881, la loi dit ceci : §24 : [...]Ceux qui, par l'un des moyens énoncés à l'article 23, auront provoqué à la discrimination, à la haine ou à la violence à l'égard d'une personne ou d'un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, seront punis d'un an d'emprisonnement et de 45000 euros d'amende ou de l'une de ces deux peines seulement .
§23 : Seront punis comme complices d'une action qualifiée crime ou délit ceux qui, soit par des discours, cris ou menaces proférés dans des lieux ou réunions publics, soit par des écrits, imprimés, dessins, gravures, peintures, emblèmes, images ou tout autre support de l'écrit, de la parole ou de l'image vendus ou distribués, mis en vente ou exposés dans des lieux ou réunions publics, soit par des placards ou des affiches exposés au regard du public, soit par tout moyen de communication au public par voie électronique, auront directement provoqué l'auteur ou les auteurs à commettre ladite action, si la provocation a été suivie d'effet. Cette disposition sera également applicable lorsque la provocation n'aura été suivie que d'une tentative de crime prévue par l'article 2 du code pénal. [source]
Donc il faut interdire ces paroles, et ces groupes, s'ils persistent à diffuser des textes christianophobes. Si à Clisson ou ailleurs des groupes de metal incitent à la violence contre les chrétiens, ils peuvent donc être interdits et, leurs auteurs, poursuivis.
Il ne s'agit pas de goût musicaux, ni de religion mais d'ordre public.
Le Hellfest n'est pas en danger pour autant. Il suffit qu'il respecte la loi et l'ordre public mais s'il ne le fait pas il est anormal que l'Etat français ou les collectivités locales le subventionnent avec de l'argent public. Il est légitime que des citoyens, chrétiens ou non, demandent que cette manifestation respecte la loi.
***