Jerzy Popieluszko, martyr de la Foi
Article rédigé par Olivier Bault, le 30 octobre 2017 Jerzy Popieluszko, martyr de la Foi

source[Boulevard Voltaire]anniversaire du bienheureux père Jerzy Popiełuszko en Pologne.

La Pologne commémorait, la semaine dernière, l’anniversaire de la mort du bienheureux père Jerzy Popiełuszko, enlevé et assassiné par la police politique communiste le 19 octobre 1984, alors qu’il rentrait d’une visite pastorale à Bydgoszcz. Il fut retrouvé quelques jours plus tard dans un réservoir d’eau de la Vistule, où il avait été jeté pieds et poings liés et lesté après avoir été battu à mort par les trois officiers du « Service de sécurité » (SB) du commando chargé de le liquider.

Ce n’est pas le seul prêtre catholique à avoir été assassiné par le pouvoir communiste en Pologne, et ce n’est même pas le seul à avoir été assassiné dans les années 80. Même en 1989, alors que le pouvoir cherchait déjà à s’entendre avec l’opposition, trois prêtres trop critiques pour le Système ont encore été tués dans des conditions jamais élucidées. La particularité du père Jerzy, c’est que ses messes pour la patrie (c’est ainsi qu’on les appelait) attiraient foule dans sa paroisse du quartier de Żoliborz à Varsovie. Son charisme et sa foi exceptionnels ont été source de nombreuses conversions, y compris à sa mort. Ils étaient peut-être un million de Polonais dans et autour de l’église Saint-Stanisław-Kostka où avait été placé son cercueil lors de la messe du 3 novembre 1984.

C’est le seul cas, dans la Pologne communiste, où, face à la grande émotion suscitée par le martyre de l’aumônier du syndicat Solidarité, ou peut-être en raison de luttes de pouvoir, les assassins de la police politique ont été arrêtés, jugés et condamnés, même si les commanditaires n’ont, bien sûr, jamais été inquiétés. Car dans la République populaire de Pologne, il est totalement exclu que ce commando autonome du département « D » du ministre de l’Intérieur ait pu agir de sa propre initiative. Du reste, on avait déjà attenté à la vie du père Jerzy le 13 octobre, mais sans succès.

Le régime communiste était une mafia et cette mafia a survécu, comme dans tout l’ancien bloc de l’Est, à la transition « démocratique » des années 1989-90, et il a toujours été impossible de condamner les anciens bourreaux du régime après la fin du communisme. Si, dans le cas du père Jerzy, les exécutants ont eu à faire de la prison (quinze ans seulement, après amnistie, pour le chef de l’équipe de tueurs), ils ont toujours respecté la loi du silence, sans quoi ils seraient très certainement morts depuis longtemps. Un général qui avait dirigé le renseignement de la Pologne communiste dira plus tard : « Je ne me souviens de rien de l’époque où je travaillais dans le renseignement. » Avant d’ajouter : « Et c’est sûrement la raison pour laquelle je suis encore en vie. »

 

Le porte-parole du gouvernement communiste sous la dictature du général Jaruzelski, Jerzy Urban, s’est reconverti dans les années 90 dans la presse violemment anticléricale et libérale-libertaire et mène une vie confortable. Dans les mois qui avaient précédé l’assassinat du père Popiełuszko, il tonnait dans les médias du régime contre les « séances de haine » qu’étaient, selon lui, les sermons de ce serviteur du Christ et de la Pologne appelant les fidèles à « vaincre le mal par le bien », ainsi que l’avait enseigné saint Paul dans sa lettre aux Romains : « Ne te laisse pas vaincre par le mal, mais sois vainqueur du mal par le bien. »

Mais déjà, à l’époque, être catholique et patriote, c’était être « nationaliste », voire « fasciste », et tenir un discours de haine. Contre le bien, le mal déchaîne sa colère. Les libéraux-libertaires et les LGBT de nos sociétés actuelles n’ont rien inventé, mais c’est peut-être parce qu’ils ont des liens de parenté idéologiques plus forts qu’ils ne se l’imaginent avec les communistes des anciens pays de l’Est.

« Ma grâce te suffit, car ma puissance donne toute sa mesure dans la faiblesse » (deuxième lettre de saint Paul apôtre aux Corinthiens). Jerzy Popiełuszko n’était pas très grand, il était mince et plutôt maladif. Il souffrait d’anémie et avait le cœur malade, peut-être en partie à cause des mauvais traitements subis pendant son service militaire, alors qu’il était jeune séminariste. Un service accompli dans une unité spéciale réservée aux candidats à la prêtrise, où on cherchait à les faire renoncer à leur vocation. Mais malgré sa constitution fragile, c’est Popiełuszko qui soutenait moralement ses camarades. Chargé, plus tard, de la pastorale des étudiants et des personnels de santé dans ses paroisses successives, il devint aumônier du syndicat Solidarité à l’occasion d’une messe demandée par les ouvriers en grève des aciéries de Varsovie, en août 1980.

Béatifié en 2010, son procès en canonisation est en cours. Les saints de l’Église catholique sont vecteurs de miracles pendant leur vie terrestre mais aussi après. Et pour déclarer qu’une personne est sainte, il faut au moins un miracle documenté. En ce qui concerne le père Jerzy Popiełuszko, plusieurs ont été rapportés. L’un deux s’est déroulé en France, il y a cinq ans. Né un 14 septembre comme le père Popiełuszko, le père Brien avait connu l’histoire du bienheureux Jerzy Popiełuszko par des religieuses polonaises rencontrées dans les hôpitaux de son diocèse de Créteil. Le 14 septembre 2012, le père Brien était à l’hôpital au chevet d’un certain François Audelan, atteint d’une leucémie en phase terminale. Il souffla : « Écoute Jerzy, c’est le 14 septembre, le jour de ton anniversaire et de mon anniversaire. Si tu dois faire quelque chose pour notre frère François, c’est le bon jour ! » Le lendemain, le malade, qui avait reçu les derniers sacrements dans la nuit, s’est levé de son lit complètement guéri.